27 juil. 2012

Les pâturages brassicoles de la Lituanie - Pasvalys et les environs


Avertissement de difficulté: cette portion du guide de voyage n'est pas pour le voyageur exigeant la spontanéité à tout coup. Sans préparation, vous risquez fort bien de vous buter à des portes closes et à des regards peu accueillants. Et même si, comme nous, vous avez un guide et conducteur qui peut contacter tous les brasseurs à l'avance, ainsi qu'un interprète et brasseur-maison qui peut traduire des simples salutations aux détails plus techniques de brassage, des péripéties comme celles décrites ci-dessous pourraient survenir... 

Pasvalys est situé entre Pakruojis, où oeuvrent des brasseurs aux bières -- et aux histoires -- assez particulières, et Biržai, officieusement connue comme la capitale brassicole de la région, là où quelques multinationales brassent aux côtés d'artisans aux méthodes rustiques. Les brasseurs présentés ci-dessous travaillent tous soit à Pasvalys même, soit dans un village tout près.


J. Morkūno 
Photo de Jonas Morkūno lui-même, gracieuseté de Martynas Savickis

Dans un bâtiment sans inscription commerciale, aux allures de bloc à appartements, vit et travaille depuis quelques décennies Jonas Morkūno, brasseur campagnard. Il concocte une seule bière, la Morkūno Alus. Lors de notre passage en mars dernier, il nous a convaincu qu'il n'avait plus de bière à vendre ou à nous faire goûter. Qu'il avait brassé pour la dernière fois il y a quelques semaines et qu'il attendait le retour de l'été parce que les ventes étaient très calmes à l'hiver et au printemps. Pourtant, une fois revenu à Vilnius quelques jours plus tard, nous avons trouvé sa bière toute fraîche servie au Šnekutis du quartier Užupis... Cette bière portait l'insigne levurée terreuse commune aux Kaimiškas Alus (bières de la campagne lituanienne), en plus d'être sertie d'angles citronnés et herbacés, le tout dans un corps légèrement gazéifié, très facile à boire. Tellement bon qu'on ose espérer un jour déguster à grandes lampées cette bière rafraichissante lors de températures plus clémentes, près de son lieu de confection. Si Monsieur Morkūno veut bien nous en vendre, évidemment...

Joalda 

Tard le soir, dans la noirceur presque complète d'une petite rue non éclairée aux abords du village de Joniškėlis (à quelques kilomètres à l'ouest de Pasvalys), nous sommes arrivés chez ce brasseur qui, de toute évidence, produisait de la bière pour une autre clientèle que les brasseurs traditionnels de la campagne. Nous avions adoré sa Pasvaliečių Lengvas lorsque nous l'avions bue en fût à Vilnius. Une bière blonde très propre livrant des malts subtilement miellés aux connotations de foin, construisant un corps soyeux. Entre d'autres mots, une bière facile d'accès mais construite avec énormément de soin à partir d'ingrédients de qualité. Nous étions évidemment bien curieux du reste de sa production, quoique nous aurions été bien heureux de s'abreuver toute la soirée de cette Lengvas à même la source. 

Après une visite dans la zone de production, nous avons remarqué que différentes bières étaient brassées sur place, pour la consommation locale. Des bières fortes, titrant toutes au-dessus de 8% d'alcool. Notre interprète nous avoua que ces types de bière sont très populaires dans la région; certains hommes du coin disent même qu'une 'vraie bière' doit titrer au moins 8% d'alcool. Évidemment, ces bières viriles se vendent en rien de moins qu'un litre et sont parfois dans des contenants en plastique de deux(!) litres... C'est en s'attendant à une version lituanienne d'une Wildcat Strong donc que nous avons approché notre dégustation des Galutinis Tiklas, Soprano et Vulkano. Dans les trois cas, la blondeur immaculée impressionnait autant que celle de la Lengvas à 5% et les céréales étaient légèrement miellées entrelacés d'un fruité herbacé très doux. À part les pourcentages d'alcool sur les étiquettes (8,1%, 8,3% et 8,7%), rien ne semblait distinguer une bière de l'autre... Mais elles étaient toutes agréables à boire, sans aucun défaut ou note d'éthanol exagérée.

Mais pourquoi donc faire trois produits 'différents' avec les mêmes ingrédients et les mêmes saveurs?! Sachant que le gouvernement lituanien perçoit des taxes à chaque brassin selon le pourcentage d'alcool de la bière produite et que, n'ayant pas de laboratoire bien équipé, les brasseurs ne peuvent prévoir exactement quel pourcentage d'alcool les techniciens du gouvernement découvriront, il nous apparaît plausible que certains brasseurs comme Joalda, Biržų Alus et Rinkuškiai, pour ne nommer que ceux-là évoluant dans la région, produisent des étiquettes démontrant des noms et des taux d'alcool différents afin de ne pas se faire prendre en faute par le gouvernement. Ce ne serait donc pas des bières réellement différentes, mais plutôt la même bière ayant fermentée un tout petit peu plus ou un peu moins. Pour l'instant, c'est ce que vos humbles détectives de la broue tirent comme conclusion sur ce sujet.


Dvareliškiu Alus 

Voilà un autre brasseur campagnard qui nous a marqué, mais pour des raisons insoupçonnées. Blotti au fond d'un chemin boueux non sans rappeler certaines cabanes à sucre traditionnelles du Québec, cette brasserie concocte des Kaimiškas Alus, ces bières de la campagne du nord-est qui, selon ce que nous avions appris au préalable, étaient parfois non bouillies et fermentées à l'aide de souches de levures ancestrales mutées par le temps et, sûrement, le surmenage. 

Notre guide l'avait contacté à l'avance; nous étions attendus. À notre arrivée en face de la modeste brasserie, aucun signe de vie. Le silence... et quelques bouteilles de plastique, remplies, sur les dalles de béton en face de la porte d'entrée. Après quelques minutes d'attente, un homme rabougri en salopettes de travail sort d'une porte en haut de l'escalier extérieur (photographié ci-dessus) puis, sourcils froncés et d'un ton direct, nous dit une ou deux phrases de toute évidence peu accueillantes, pointant vers les bouteilles. Avec l'approbation de nos deux accompagnateurs lituaniens, nous avons finalement pu prendre ces bouteilles afin de les déguster plus tard dans la journée.

Leurs trois bières, une Šviesus (blonde), une Tamsus (brune) et une Su Medumi (au miel) étaient toutes empreintes des notes terreuses communes à ces Kaimiškas Alus, enduites de sucres miellés et d'angles minéraux, le tout dans un corps à peine gazéifié. Elles ne possédaient pas la cohésion des excellentes Jovaru Alus ou Morkūno Alus, par exemple, mais leur origine était claire: ce sont des bières de la campagne lituanienne. Rien d'autre au monde ne leur ressemblent.

Linkuvos Alus (E. Mozūro) 

Dans le hameau de Linkuva, un autre brasseur de Kaimiškas Alus s'affaire à offrir sa bière à son voisinage. Faute de temps, nous n'avons pu le visiter en personne, mais nous avons tout de même fait preuve de chance. Notre arrivée à Vilnius, la capitale, coïncidait avec la gigantesque foire artisanale Kaziuko Mugė, foire qui domine de nombreuses rues et places publiques de la ville pendant trois jours. Et un kiosque parmi les quelques centaines représentait, vous l'aurez deviné, la brasserie de M. Mozūro. Nous avons donc pu découvrir sa bière qui nous fascinait avant même de l'avoir bue. 

Elle nous fascinant tout simplement parce que nous avions entendu dire qu'il était possible que ce brasseur ne rajoute pas de levures pour fermenter sa bière... Des rumeurs couraient à l'effet que 'le mur' de sa brasserie contienne tous les micro-organismes nécessaires à la transformation fermentaire. Malheureusement, vos détectives de la broue doivent s'avouer vaincus n'ayant pu élucider ce mystère lors de ce premier voyage en Lituanie. Cependant, la piste gustative laissée par la bière de Mozūro est profonde. L'intense rusticité de son caractère fermentaire (rappelant la terre mouillée et la poussière) rendait la dégustation difficile, ce qui est chose rare dans ces contrées. Les céréales miellées et les houblons herbacés avaient beau tenter d'insuffler une personnalité accueillante à cette bière, mais... disons pour l'instant qu'elle nous rappelait vaguement le caractère de l'ouvrier rabougri rencontré chez Dvareliškiu Alus.

Raginelis

Raginelis est un autre brasseur campagnard du coin de Pasvalys brassant une bière captivante par son terroir évident. Celle-ci s'appelle la Kaimynu Sventinis. Subtile et équilibrée, elle propose des céréales miellées et bien toastées, signature des malts d'orge de Lituanie, agrémentées de délicats esters de banane et d'une touche terreuse aussi commune aux Kaimiškas Alus. Nous avons également pu découvrir sa bière grâce à la foire du Kaziuko Mugė à Vilnius. En se promenant à Pasvalys, notre guide nous a confié que ce brasseur ne voulait tout simplement pas accueillir d'étrangers. Avec les histoires que nous avions vécues et entendues depuis le début du périple, il n'y avait rien de surprenant dans cette révélation. Un autre cas à reléguer au dossier 'Second voyage d'exploration brassicole en Lituanie'...

La suite de ce guide de voyage brassicole nous amènera à Biržai, tout juste à l'est de Pasvalys. Dans cette petite ville oeuvre une multinationale, une microbrasserie d'envergure, deux autres plus modestes et des brasseurs-maison ne pouvant vendre leurs bières commercialement. Mais rien ne les empêche de nous inviter chez eux pour échanger quelques sourires, croyez-nous! 

13 juil. 2012

La St-Joachim, de la Microbrasserie des Beaux Prés, à Ste-Anne-de-Beaupré



Attablés sur la terrasse du brouepub, hypnotisés par le fleuve qui coule à quelques mètres, difficile de ne pas tomber sous le charme de la jeune Microbrasserie des Beaux Prés. Mais comment se fait-il, dites-vous, qu'une toute nouvelle brasserie produise des bières de ce calibre? La réponse est simple: Luc Boivin a un des parcours professionnels les plus étoffés de la scène brassicole québécoise. Il gagnait des concours de brasseurs maison avant même que le Québec ne connaisse sa révolution microbrassicole. Certains disent qu'il peut remonter une boîte électrique plus vite que Chuck Norris... Préparez-vous à une salve de grands crus de sa part au cours des prochaines années!

Style : Dunkler Weizenbock. Si vous préférez, une bière de blé d'inspiration allemande, forte en alcool et de couleur foncée (dunkler).

Disponibilité : Ceci est le tout premier brassin commercial de St-Joachim, alors nous espérons bien motiver Luc Boivin à en rebrasser afin d'en faire un classique de la maison. Elle est disponible en fût seulement sur place.

Le coup d’œil : Un voile de mousse s'installe pour la durée de la dégustation sur la robe acajou aux reflets marrons et pourpres.

Le parfum : Clou de girofle, confiture de fraises, bananes flambées et raisins secs se fondent les uns dans les autres, construisant un arôme d'intensité modérée.

En bouche : Un corps des plus soyeux accueille des saveurs de blé et des esters de banane aux côtés des arômes notés précédemment, déjà bien installés. La texture est riche, certes, mais n'abuse pas des sucres résiduels.

La finale : Les mêmes saveurs s'expriment, ne perdant jamais d'ampleur. Une légère amertume de houblon feuillu se fraie un chemin créant un arrière-goût complexe.

Accords : Bien que le menu du brouepub possède quelques éléments qui peuvent accompagner cette Weizenbock avec aplomb (l'assiette de 2 terrines et 2 fromages avec pain, gelée, fruits séchés et noix, entre autres), rien ne peut surclasser l'effet  de la terrasse jouxtant le fleuve. Aaaaahhh... qu'il fait bon s'y perdre en pensées!

Pourquoi est-ce un grand cru? : L'équilibre et l'expression claire de chaque saveur et de chaque ingrédient impressionne grandement. Cette Weizenbock est un tantinet plus sucrée que la Aventinus de Schneider (demandez-la à la SAQ) et elle est moins effervescente puisque servie d'un fût, mais elle nous apparaît aussi bien construite et savoureuse.

Si vous avez aimé, essayez aussi : La DumDuminator, de Brasseurs du Temps (à Gatineau), la Weizenbock, des Trois Mousquetaires (version plus liquoreuse, de Brossard) et la Dubbel Reserve, d'Allagash (une double d'inspiration belge, de Portland, au Maine, munie de similaires notes de clou de girofle et de malts subtilement fruités).

9 juil. 2012

Les pâturages brassicoles de la Lituanie - Pakruojis et les environs



Un des passages sur la 'Colline des Croix', à quelques kilomètres à l'ouest de Pakruojis

Avertissement de difficulté: cette portion du guide de voyage n'est pas pour le voyageur exigeant la spontanéité à tout coup. Sans préparation, vous risquez fort bien de vous buter à des portes closes et à des regards peu accueillants. On nous a même informé, en demi-blague, que le lituanien moyen de la région voit le monde d'une position couchée, gisant sur le sol, regardant vers le haut, avec un nez amoché... Sympathique, non? Pakruojis est un bled d'environ 6000 habitants, mais plusieurs petites brasseries y opèrent, que ce soit dans le centre ou dans le nano-quartier de Jovarai. Elles brassent toutes, sans exception, des bières complètement différentes de leurs voisines... 

Jovaru Alus
Cette brasserie est à l'arrière de la maison de madame Udriene

Rescapée d'une maison en flammes à un jeune âge, Aldona Udriene fût plongée dans un coma et alitée dans sa chambre. Ses parents ayant perdu espoir, ils achetèrent un cercueil et le mirent dans la chambre de l'adolescente, attendant l'inévitable. La légende dit ensuite qu'Aldona se réveilla, vit le cercueil et demanda avec consternation: "mais c'est à qui cette chose?". Tel est le caractère de cette dame que l'on surnomme maintenant la 'reine des brasseures' de la campagne lituanienne. Sa bière, la Jovaru Alus, utilise une levure jalousement gardée depuis des générations, levure qui a jadis été cultivée par un ancêtre dans les bois environnants... Nous vous raconterons son histoire dans un billet futur.

Particulier comme bière? Attendez de connaître la suite. Premièrement, elle ne bouille pas son moût. Elle ajoute un thé de houblon à l'empâtage et dans le fermenteur. Elle fermente d'ailleurs sa bière à 29 degrés Celsius (température très élevée, semblable à certains bières belges!), dans des bacs à aire ouverte. Autrefois, elle gazéifiait sa bière de façon naturelle grâce à la température chaude d'un sauna non loin. Aujourd'hui, une simple chambre chaude à la brasserie fait le travail. Sa bière ne démontre aucun signe d'acidité ou d'infection bactérienne. Elle se boit plutôt comme une Extra Special Bitter, bien maltée et subtilement houblonnée. La version au miel (Su Medumi) est servie tiède à sa maison, avec quelques épices. Les saveurs de la bière de base sont rehaussées par le miel forestier, surtout le houblon qui ressort puissamment en finale. La bouteille de plastique avec laquelle on peut repartir n'offre pas vraiment la même expérience cependant.

En plus d'accepter que les visiteurs l'ayant contactée à l'avance, Madame Udriene ne publicise plus le fait qu'elle brasse de la bière. Sa maison n'a pas d'enseigne visible de la rue et elle ne s'affiche nulle part dans le village, sauf à l'intérieur de sa maison, bien entendu. Elle dit qu'elle craint que les gens de son entourage ne détruisent ses artéfacts... Il faut donc connaître son adresse et être accompagné d'un lituanien qui lui expliquera la raison de votre visite (au téléphone, préférablement). Mais la récompense, une fois les obstacles franchis, vaut l'effort. Madame Udriene est une femme chaleureuse, fière de son métier et de son héritage. Et ses bières reflètent sa passion.

Madame Udriene nous racontant des histoires de sa famille

Le minuscule salon de dégustation de Jovaru Alus


Algio Grigonio

À quelques maisons de celle de madame Udriene, vous apercevrez peut-être, si vous savez où regarder, la mention 'Alaus Darykla', sur un bâtiment derrière une maison grise au toit rouge. Si vous vous souvenez de notre lexique de la bière lituanienne, cela devrait vous mettre la puce à l'oreille. C'est la brasserie d'Algio Grigonio. Cet homme est peu enclin à accueillir les étrangers, mais un ami de la famille nous a gentiment fait visité, même si son regard trahissait son incompréhension totale quant à notre présence. Le seul lien qui l'unirait avec la brasserie de Madame Udriene, outre son emplacement, est sa méthode de brassage. Lui non plus ne bouille pas son moût et fermente le tout dans des bacs à aire ouverte avec des levures de souches 'mystérieuses'... En d'autres mots, il ne semblait pas connaître leur origine exacte.


Sa bière phare, la Šinkorių Alus, tire davantage sur le blond que la Jovaru Alus, et propose une expérience gustative... hmmm... mémorable? Versée d'une bouteille fraîche (en plastique, contenant un litre), elle propose des houblons herbacés subtils et des malts miellés sur un fond terreux, légèrement animal. Elle est également très peu gazéifiée, ce qui est monnaie courante pour ces Kaimiškas Alus (bières de la campagne). "Vieillie" quelques jours, elle devient absolument cacophonique, libérant des notes acidulées, de maïs en crème et de cire à souliers. De toute évidence, elle est conçue pour être consommée dès sa mise en marché à la brasserie. En la buvant, on peut facilement se sentir transportés à une époque révolue où les brasseurs ne contrôlaient pas toutes les étapes de brassage et concevaient des produits à boire le plus rapidement possible, entre autres parce que l'eau n'était pas potable... Depuis peu, Grigonio brasse une bière au gingembre (Imbierinis Alus) qui se veut plus amicale, sertie de flaveurs florales, épicées et miellées bien agréables.

Grigonio fermente ses bières dans des bacs à aire ouverte; d'ailleurs plusieurs brasseurs de la campagne du nord-est font de même

Davra
Le propriétaire et maitre-brasseur, Vidmantas, nous sert sa sublime Daujotu

La microbrasserie connaissant le plus grand succès commercial de Pakruojis porte le nom de Davra. Située dans un bâtiment industriel dans le centre du village, elle possède un superbe salon de dégustation à l'arrière du bâtiment, disponible sur appel. Il y a même une terrasse donnant sur le lac du village! Le propriétaire, prénommé Vidmantas, concocte des bières impeccables, toutes munies d'un caractère malté fascinant. Aucune levure étrange ne semble être utilisée ici; toutes ses bières sont polies et raffinées. Sa Daujotu, bière blonde, explose de saveurs toastées et miellées avec un accent d'huile de noix. Une délice dans la catégorie des bières de soif, qui ne ressemble aucunement d'ailleurs à ce que font les tchèques, les allemands, les britanniques, les belges, etc. Même constat pour la Linksmieji Vyrukai, une bière ambrée partageant des saveurs de foin, de pain toasté et de miel dans un corps soyeux et facile à boire.

Sa Varniuku quant à elle, la lager brune de la maison, propose une personnalité aussi prenante, remplie de flaveurs de pain toasté, de toffee, de rôti, avec quelques accents fruités rappelant les raisins secs. Cette bière, nous a raconté Vidmantas, a récemment été conçue pour un festival printanier de la région dans lequel les gens tirent sur des bébés corneilles afin de les frire dans l'huile et ainsi déguster leur viande tendre le jour même. De toute évidence, le genre de festivité qui donne soif! ;)

Trêve de plaisanterie, les bières de Davra, toujours disponibles en bouteille de plastique d'un litre, méritent d'être découvertes par le reste de la planète autant que celles de Jovaru Alus. Les deux devraient être des priorités dans votre périple gustatif.


Le salon de dégustation à l'arrière de la brasserie est seulement ouvert sur réservation



Rozalimo Alus
Le bar de la brasserie est situé dans le tout petit bâtiment de droite

Situé dans la bourgade de Rozalimas, tout juste au sud de Pakruojis, ce brouepub concocte une seule bière: la Rozalimo Alus (original, n'est-ce pas?), une bière blonde bien construite de malts miellés aux accents d'amandes et de houblons herbacés. Fait intéressant à noter: cette minuscule brasserie possède un bar (Alaus Baras) ouvert tous les jours de 8h à 22h. Armez-vous d'une bonne carte géographique et déambulez à travers les rues du village remplies de petites maisons jaunes en bois, à la recherche du bâtiment rouge ci-dessus. Son adresse est le Pievų gatvé 1.

Les quatre tables de ce bar accueillent seulement des locaux, évidemment. N'ayez crainte, la petitesse du village ne requière pas davantage de sièges, sauf l'été, où quelques tables supplémentaires se remplissent à l'extérieur. Le prix pour un verre de la bière de la maison? Environ trente cents. Trente. Cents. Boire une bière de soif de cette qualité, dans un minuscule pub aux allures de cabane à jardin en bois, à un prix absolument dérisoire... Ça donne le goût de courir les boires encore longtemps!

Un baril décoratif que la brasserie exhibe lors des festivals

À part ces brasseries artisanales, il est possible de trouver des bars à Kaimiškas Alus près de la station d'autobus ou à l'entrée de la ville. Comme celui photographié ci-dessous, par exemple. La façade, où il est inscrit "Pilstomas Alus" (bière en fût) a bien l'air d'un bar fermé depuis belle lurette, mais il faut passer par une porte arrière pour avoir accès à la salle et aux fûts. Peut-être une façon de dire aux étrangers de ne pas s'y aventurer? Même un lituanien de l'ouest (Martynas, du blog Tikras Alus, qui nous a gentiment offert cette photo) s'est fait regardé tel un agent secret du KGB en pénétrant les lieux et s'est senti assez intimidé pour ne pas attendre sa pinte de Joalda Soprano que tout le monde semblait boire. Se souvenait-il de l'histoire du lituanien de la région gisant sur le sol le nez amoché?

Un bar de Pakruojis servant de la bière de la campagne en fût. Invitant, n'est-ce pas?


Si vous n'avez pas lu notre reportage sur Vilnius, la capitale, cliquez ici. Pour notre prochain billet de guide de voyage brassicole, nous nous dirigerons à quelques kilomètres à l'est de Pakruojis, dans le village de Pasvalys. Il y a tellement de brasseries fascinantes dans ce coin de pays...

6 juil. 2012

La CoHop V - Rouge de Mékinac, d'À La Fût, à St-Tite



Cinq ans déjà qu'À La Fût brasse dans les anciens locaux d'un magasin général dans le centre du village de St-Tite. Le temps passe vite, sûrement encore plus pour les membres de cette coopérative! Une création hors norme était de mise pour célébrer l'occasion et l'amateur de bières de dégustation est servi avec cette Rouge de Mékinac. Les brassins spéciaux d'À La Fût sont souvent dispendieux, mais nous vous avouons que celui-ci vaut vraiment chaque sou exigé.

Style : L'étiquette et le nom de la bière évoquent peut-être la 'Rouge des Flandres', mais la Rouge de Mékinac n'en est pas une dans les règles de l'art. Simplement, le jus de griottes n'est pas supposé rentrer dans la composition d'une telle recette pour ce style (les levures devraient faire le travail à elles seules). Qu'à cela ne tienne, le plus important est que nous avons ici une excellente bière fruitée qui semble être née d'une blanche d'inspiration belge (avec blé, graines de coriandre et écorces d'orange) à laquelle on a rajouté le jus de griottes et les levures sauvages dans les barriques de chêne. Vous aurez compris que la composition céréalière de cette Rouge semble  différer également des Rouges des Flandres typiques.

Disponibilité : Brassée pour leur 5e anniversaire et vieillie 17 mois en barriques de chêne, on ne s'attend pas à la revoir régulièrement. Cependant, nous espérons bien qu'À La Fût nous fasse le cadeau de la ressortir à tous les 17 mois, ou moins, préférablement.

Le coup d’œil : Une tuile de mousse devient un anneau sur la robe rouge aux reflets roses.

Le parfum : Un profil épicé aux allures d'orange et de graine de coriandre s'allie aux levures sauvages et aux griottes afin de créer un arôme vif et fruité.

En bouche : Les levures sauvages construisent des notes de conifère aux côtés du blé(?) biscuité, alors que le fruité des griottes penche même vers la canneberge. Le tout est équilibré, d'une intensité moyenne. De plus, le corps est sec et digeste, signe d'un travail efficace des brettanomyces.

La finale : Acidulée par la griotte, empreinte de brettanomyces et de petites bulles piquantes, la Rouge de Mékinac se termine de façon complexe mais facile d'approche pour amateurs de bières de caractère. Le meilleur des deux mondes, quoi!

Accords : Une petite salade verte avec un vinaigre de cerise, tiens. Il fait chaud après tout! Sinon, une paire de lunettes de soleil lui iront à merveille aussi. ;)

Pourquoi est-ce un grand cru? : L'agencement des multiples ingrédients est harmonieux et aucune note ne domine le tout. La recette est créative et l'exécution sans failles. Que demander de plus!

Si vous avez aimé, essayez aussi : La Solstice d'Été aux Framboises, de Dieu du Ciel! (Montréal et St-Jérôme), la Framboise, d'Hopfenstark (L'Assomption), la Rouge des Cantons, de Boquébière (à Sherbrooke) et la Cerise Cassée, de Cambridge Brewing (à Cambridge, au Massachusetts).

3 juil. 2012

Les pâturages brassicoles de la Lituanie - Vilnius, la capitale




Si vous avez manqué les premiers billets de ce guide de voyage brassicole sur la Lituanie, cliquez ici et ici.

Le centre historique de Vilnius, protégé par l'UNESCO, est un petit trésor peu visité encore par les touristes occidentaux. C'est ici que l'on trouve la plus grande quantité d'endroits spécialisés en bière artisanale lituanienne, parfois des estaminets aux allures bien européennes, mais parfois aussi des bars au décor inusité, plein de personnalité, qui ne ressemble en rien à ce que peut offrir les Prague, Munich, Bruxelles, etc.

Avant de commencer à vous présenter nos coups de coeur de cette menue capitale, sachez qu'un des meilleurs moments de l'année pour visiter la ville et y découvrir une panoplie de bières d'artisans de la campagne est à la fin de l'hiver. En effet, à tous les débuts de mars, le Kaziuko Muge rassemble des centaines d'artisans et entrepreneurs, ainsi que des milliers d'acheteurs potentiels et festivaliers dans les rues et boulevards de la ville. C'est l'occasion rêvée de rencontrer une douzaine de brasseurs campagnards autrement cachés dans leurs pâturages, ou du moins de goûter à leurs bières, sans avoir à s'aventurer dans des hameaux n'ayant que rarement vus des étrangers... En mars dernier au festival, nous avons pu goûter à des bières de certains brasseurs qui ont même refusé de nous accueillir lors de notre passage en campagne quelques jours plus tard!

Une marchande au festival Kaziuko Muge

Donc, Vilnius est sans contredit LA ville lituanienne où un dégustateur peut découvrir le plus grand nombre de bières du pays. Les endroits décrits ci-dessous sont nos coups de coeur. Dans presque tous les cas, vous y retrouverez une intelligente sélection de bières campagnardes aux côtés de bières de microbrasseries lituaniennes de qualité:

Šnekutis Alaus Baras (succursale du quartier Užupis), 
au Polocko 7a

Sans aucun doute, un des bars à bière les plus mémorables que nous ayons visité sur la planète. Sans exagération. En plus du bâtiment qui semble avoir été construit de restes trouvés dans la forêt, lui donnant une allure de cabane pouvant servir dans un film d'horreur à petit budget, cette succursale du Šnekutis offre une sélection de bières campagnardes sans égale au pays. Souvent du fût, ou d'un cask sur le comptoir, on y trouve les classiques de Morkūno et Jovaru, petits brasseurs campagnards, mais aussi de Širvėnos, Davra et Vilniaus Alus, certaines des meilleures microbrasseries au pays. La cuisine locale est très bien exécutée et le service est souriant, peu importe la qualité de votre lituanien. On a le goût de devenir un des locaux tellement c'est convivial et confortable.

Les murs en bois de ce bar détaillent une partie de l'histoire brassicole de la campagne du pays


Šnekutis (succursale de la vieille ville), 
au Šv. Stepono gatvé 8  
Valentas, propriétaire et barman des plus énigmatiques

Plus facile d'accès que la succursale de la république auto-proclamée d'Užupis (qui est tout de même dans le vieux centre de Vilnius), ce Šnekutis original de la rue Stepono est l'antre de Valentas, son propriétaire-fondateur. Il avait tout d'abord fondé un Šnekutis dans le village de Pasvalys, dans le nord-est du pays, là où de nombreux brasseurs traditionnels évoluent, mais il s'affaire maintenant à propager la bonne nouvelle en ville. Après tout, très peu de gens, lituaniens ou non, visitent la région des brasseurs. Au décor plus européen, cette succursale ne surprend pas autant que celle d'Užupis et peut apparaître un peu plus froide. Cependant, les soubresauts de Valentas, qui aime faire rire (ou faire peur) aux clients avec ses acrobaties moustachues et ses sourires cinglés, animent l'endroit et la sélection de bières artisanales est de qualité similaire à la succursale d'Užupis. On prend plaisir à visiter les deux succursales de Šnekutis selon notre horaire de visite en ville.

Alaus Namai,
au Alberto Goštauto gatvé 8

Fréquentée en majorité par des étudiants, cette 'maison de la bière' (Alaus Namai) attire une clientèle ouverte d'esprit, prête à découvrir les saveurs des brasseurs campagnards. La sélection de bière est intelligemment choisie, se différenciant des Šnekutis avec les bières de petits brasseurs tels Ramūno Čižo et Su Puta. Les lieux, dans un sous-sol, ne charment peut-être pas autant que les Šnekutis, mais les tours à fûts, la cuisine locale de qualité et la sélection éclectique de bière nous obligent à visiter ce bar en priorité lors d'un séjour de quelques jours en ville.

Certaines tours à fûts du Alaus Namai donnent vraiment le goût d'essayer ces bières

Bambalyne,
au Stikliu gatvé 7

Cette cave à bières ne sert peut-être que des bouteilles, mais celle-ci vous donnera donc accès à des produits que vous ne pourrez retrouver dans les bars nommés précédemment qui se concentrent sur les bières en fût. Vous trouverez donc ici, sous les voûtes en brique, attablés à des meubles antiques, des bières en bouteille de l'excellente Kupiškio Alus, de Butautu et peut-être même de Kurklių, si vous êtes chanceux. Les prix sont très abordables (c'est d'ailleurs le cas pour tous les bars à bière mentionnés dans cette chronique) et le décor nous donne le goût de s'approprier une des salles et d'y passer la soirée avec des amis sans considération pour les tablées voisines.

Autres arrêts méritoires
Quelques ruines dans la vieille ville autrement bien préservée

S'il vous reste encore du temps et la soif nécessaire pour visiter d'autres endroits spécialisés de Vilnius, sachez qu'il reste encore plusieurs bars où s'abreuver de bières lituaniennes de qualité. Le bar de Vilniaus Alus par exemple (au Pilies 6), met en valeur les bonnes bières de cette microbrasserie de la capitale, de son excellente Kvietinis (une bière de blé au caractère unique) à ses bières ultra fortes surprenantes. La ville abrite aussi quelques brouepubs, comme le Prie Katedros (au Gedimino 5) et le Busi Trecias (au Totoriu gatvé 18), qui concoctent de bonnes bières de soif somme toute génériques. Mais nous vous sommons de visiter en toute hâte les 4 premiers établissements mentionnés plutôt dans ce billet avant ces brouepubs qui ne possèdent pas assez de caractéristiques pouvant les ancrer dans la tradition brassicole lituanienne.




Pour la suite de guide de voyage brassicole, nous nous dirigerons vers les campagnes reculées où habitent les brasseurs que nous convoitions tant... premier arrêt, le hameau de Pakruojis!

30 juin 2012

Des bières de Blaugies, Nøgne Ø et Hook Norton maintenant disponibles en importation privée

Importations Privées Bièropholie nous présente encore une fois l'opportunité de remplir nos celliers de produits fort intéressants, de provenance et de styles divers. Cette fois-ci, une brasserie de la campagne wallonne, une microbrasserie norvégienne aux allures d'une brasserie de la côte ouest américaine et une britannique classique. Si vous avez de la difficulté à arrêter votre choix sur une ou deux bières, voici nos habituels commentaires sur chaque produit afin de vous aider dans cette tâche des plus ardues! 


Brasserie de Blaugies, à Dour (Belgique) 

Une petite brasserie familiale de la campagne du sud de la Belgique (tout près de la frontière française, en fait) qui concocte uniquement des bières rustiques. Dans chacun de leurs produits, on peut presque s'imaginer les grands champs et le soleil plombant sur les bottes de foin! 

La Moneuse (8%) 
Une Saison traditionnelle, mais forte, munie de malts pâles qui émulent la paille, de houblons herbacés et légèrement amers et de notes fermentaires bien rustiques.

Saison d’Épeautre (6%) 
Une autre Saison traditionnelle, très effervescente, fruitée et comblée d'esters de gomme balloune, plongeant dans une finale sèche et boisée.

Bière Darbyste (5,8%) 
Le jus de figue utilisé pour renflouer le profil aromatique de cette bière se colle aux agrumes et la paille, alors que les céréales croquantes et la sècheresse finale s'affairent à compléter une création campagnarde surprenante.

Moneuse Spéciale Noël (8%) 
Une autre bière très rustique, remplie de notes de grange, de foin et de terre; la signature maison, quoi. Houblons herbacés et esters fruités créent une certaine diversité et rappellent que cette Moneuse Spéciale n'est pas une belge de Noël sucrée et liquoreuse comme il est souvent le cas.


Nøgne Ø, à Grimstad (Norvège)


Puisqu'il y a non moins de 20(!!) bières différentes de cette norvégienne de grand calibre dans la présente commande, nous avons choisi de vous les présenter en trois catégories. En espérant que cela vous aide davantage: 

Bières délicates et désaltérantes 

Wit (4,5%) 
Une blanche belge classique, douée de sa coriandre et de son écorce d'orange amère. Authentique et rafraichissante.

Bitter (4,5%) 
Une Bitter anglaise non filtrée et plus houblonnée que la moyenne, partageant des saveurs boisées, terreuses et légèrement fruitées.

Brown Ale (4,5%) 
Un caramel de noisette sur du pain rôti. Ou, si vous préférez, une belle Brown Ale un peu plus charnue que la moyenne, mais demeurant très facile à boire du haut de ses 4,5% d'alcool.


Bières charnues et expressives 

Brun (6%)
Une ale brune d'inspiration belge, avec ses angles de raisin sec, de chocolat et de caramel. Presqu'une Dubbel!

Pale Ale (6%) 
Une Pale Ale rafraichissante, dotée de houblons citronnés et floraux (le cultivar Centennial est entre autres utilisé) qui dirigent le palais vers une amertume bien satisfaisante.

Saison (6,5%) 
Une Saison norvégienne qui sait construire les notes de paille et de grange endémiques aux Saisons wallonnes, en plus de rajouter quelques esters fruités et des houblons herbacés judicieusement placés.

Porter (7%) 
Les malts torréfiés produisent des flaveurs de cacao qui surmontent des fruits rouges et un houblon herbacé. Ce Porter est relativement facile à boire malgré ses 7% d'alcool.

Imperial Brown Ale (7,5%) 
Des sucres résiduels rappelant le caramel et les noisettes approchent le territoire de l'umami tout en se glissant dans un houblonnage gazonné, résineux. Élégante, pleine de saveurs sans jamais être trop lourde.

India Pale Ale (7,5%) 
Des feuilles fraîches, des oranges et des pêches dominent les malts caramel, menant vers une belle amertume résineuse et boisée.

India Saison (7,5%) 
Une collaboration avec l'australienne Bridge Road, houblonnée d'ailleurs de cultivars de cette contrée (le Stella et le Galaxy). Ne l'ayant jamais croisée, mais connaissant la qualité des produits de la maison, nous nous attendons à rien de moins qu'une Saison à la base authentique mais aussi savamment houblonnée que leur India Pale Ale.

Tiger Tripel (9%) 
Plus forte en alcool que les autres de cette catégorie, certes, mais tout de même élégante, évitant les excès. Fruitée, herbacée et légèrement phénolique, c'est une Tripel dans les règles de l'art.



Bières chaleureuses et intenses

#100 (10%) 
Une bière gargantuesque avoisinant les Barley Wines à l'américaine. Des confitures de petits fruits et des houblons floraux et citronnés menant vers une amertume sincère et langoureuse. Quelques malts torréfiés aux angles chocolatés et caramélisés font pousser un corps riche. Ouf.

Imperial Stout (9%) 
Une grande noire complexe, pleine de saveurs de chocolat noir, de caramel et de vanille, diversifiée par des notes citronnées et rôties. Un chef d'oeuvre, même lorsque considérée parmi la longue liste d'Imperial Stouts conçues ces jours-ci par les microbrasseries avides de saveurs intenses.

Sunturnbrew (11%) 
Un Barley Wine fumé muni d'un corps douillet, alliant des flaveurs de dates medjool, de caramel, de bois et de tourbe. Un délice, surtout en robe de chambre...

Sunturnbrew Bourbon Barrel (11%) 
La version vieillie en fûts de bourbon semble présenter une certaine acidité en finale selon notre ami auteur Joris P. Pattyn. À essayer si on préfère une touche de bourbon dans nos bières liquoreuses.

Imperial Stout Cognac (9%) 
Vieillie 1 dans des barils de chêne ayant préalablement contenu du Cognac... Difficile d'y résister lorsqu'on connait la qualité de la version régulière, mais mieux vaut essayer la Imperial Stout sans vieillissement en barriques si c'est votre première expérience avec cette brasserie.

#500 (Imperial IPA) (10%) 
Une Imperial IPA pour amateurs de houblons sans retenu. Du haut de ses 100 IBUs, elle ne laisse aucune papille sur son appétit. Une bière qui prouve que les brasseries de la côte ouest n'ont pas le monopole des grandes bières hyper-houblonnées.

Two Captains Double IPA (8,5%) 
Une autre Imperial IPA, cette fois-ci l'oeuvre d'un brasseur norvégien gagnant d'un concours. Si vous êtes en manque de houblons résineux et fruités, vous devriez être capables de survivre un certain temps avec cette Two Captains!

Red Horizon (17%) 
Une gigantesque bière, liquoreuse et sans compromis, fermentée avec une levure à saké japonais. Très fruitée, munie d'un sucre lourd rappelant le caramel et la réglisse, s'allongeant sur un alcool langoureux, piquant.

Imperial Rye Porter (9%) 
Une nouvelle collaboration avec l'excellente Terrapin Brewing, de Georgie. Les deux brasseries manient les malts torréfiés avec aplomb, alors nous nous attendons à une bière très goûteuse, avec beaucoup de caractère chocolaté, épicé par le caractère particulier au seigle. Très excitant comme projet! 


Hook Norton, à Banbury (Angleterre)

Une brasserie régionale relativement importante en Angleterre, située à peu près à mi-chemin entre Londres et Birmingham, qui produit des bières anglaises dans la plus pure tradition depuis le milieu du 19e siècle. Ce sont donc des bières qui se veulent toutes faciles et agréables à boire à la pinte et probablement ennuyantes à boire en échantillon de quelques onces dans un ballon de brandy...

Double Stout (4,8%)
Malgré le nom qui porte à anticiper une bière riche et corpulente, il faut plutôt s'attendre ici à un stout relativement sec aux malts généreusement toastés et dont le rôti évoque sans gêne le chocolat. Savoureuse tout en étant facile à boire.

Twelve Days (5,5%)
Même si ses 5,5% ne vous intimideront pas, cette twelve Days est la bière de Noël de la maison. De sa robe brunâtre émane des connotations tantôt sucrées, tantôt terreuses, mais toujours franches en malt aux teintes de noisettes.

Haymaker (5%)
La Haymaker, un classique de Hook Norton, est la Bitter forte de la gamme. Ses esters fruités et seshoublons floraux sont livrés au sein d'un liquide plus effervescent que le Bitter type.

Old Hooky (4,6%)
Ce Bitter plus modéré que la Haymaker possède pourtant autant, sinon plus de personnalité, dévoilant une levure aux notes de pain ardentes qui vient amadouer les houblons terreux en finale, ces deux protagonistes ne volant jamais la vedette aux malts superbement toastés. Dans la version en cask du moins, les saveurs bien équilibrées sont supportées par une texture veloutée appréciable.

Hooky Gold (4,2%)
La 'p'tite blonde' de la maison est l'une des plus récentes de la gamme, sa sortie coïncidant avec la popularisation rapide des ales blondes légères et bien houblonnées en Angleterre maintenant en vogue lors des été britanniques. Nous avons là un bel exemple, véritable rayon de soleil grâce à un brillant équilibre entre une fine acidité, une amertume florale, gazonneuse et terreuse bien sentie ainsi qu'une minéralité presque salée.

Hooky (3,5%)
Malgré son statut de bière de soif par excellence, cette Hooky ne s'en laisse pas imposer avec ses malts élégamment toastés et subtilement caramélisés qu'assèchent une eau bien minérale qui accentue des houblons feuillus efficaces.

27 juin 2012

La bière, de plus en plus complice de la haute gastronomie

Le Gramercy Tavern, restaurant étoilé Michelin en plein centre de Manhattan, 
possède une superbe carte de bière 

Quelques évènements ces derniers mois, comme l'Hivernale des Brasseurs de Montréal et notre Soirée des Grands Crus à Sherbrooke, ont décidé d'élever la boustifaille offerte en accompagnement du décadent choix de bières à un niveau avoisinant celui des grandes tables. Évidemment, le défi se voulait de taille puisque chaque établissement ne bénéficiait pas d'une cuisine et d'un équipement idéal pour de telles acrobaties culinaires, laissant le poids du succès des plats entre les mains habiles des chefs invités. Malheureusement, peu de restaurants d'envergure en Amérique listent des bières de calibre pour accompagner leurs mets raffinés. Pourtant, en Belgique, il y a longtemps que quantité de restaurants ne se gênent pas pour mettre en valeur les excellentes bières du pays aux côtés des créations culinaires locales. Normal, l'univers de la bière contient des saveurs (le rôti des céréales, par exemple) qu'aucun autre alcool peut servir afin de construire un accord.

Tout récemment, le Brouhaha et son chef Max O'Leary ont fait équipe avec l'importateur Éric Michaud afin de nous concocter un menu haut en saveurs. Six services aussi savoureux que complexes étaient mariés à des bières de The Kernel et de Hardknott, toutes deux britanniques, obtenues en importation privée. Un exemple:

Tataki de magret de canard, sauce molé à l'amande fumée et sésame, panais frits et ciboulette chinoise, servie avec la Imperial Brown Stout London 1856, de la brasserie The Kernel

Bien que peu commun au Québec, ce phénomène semble prendre de l'ampleur dans des restaurants haut de gamme de l'Occident. Dernièrement, nous avons eu la chance de parfaire nos papilles sur Manhattan, là où plusieurs tendances gastronomiques naissent. En plus de visiter des bars spécialisés aux menus ahurissants (les Ginger Man et Rattle'n'Hum, entre autres, impressionnent toujours), nous avons visité quelques restaurants de renom. Dans plusieurs cas, leur sélection de bières aurait pu faire rougir même les meilleurs bars à bière du Canada et de plusieurs états américains...

Le Gramercy Tavern par exemple, dont le chef Michael Anthony a gagné le James Beard Award pour le meilleur chef à New York en 2012, propose une carte des bières vraiment pas piquées des vers. Il pousse même l'audace jusqu'à élaborer un menu bistro sur lequel figurent des accords imposés avec des bières de grande qualité:


Signe que cette tendance a tout pour devenir bien plus qu'un feu de paille, le Eleven Madison Park, restaurant figurant dans le Top 10 de la liste des meilleurs restaurants du monde (rien de moins!), signe aussi une carte de bières des plus alléchantes. Qui plus est, leur sommelier peut même vous suggérer  des bières avec n'importe quel service du menu de dégustation, nous proposant une J.W. Lee's Harvest Ale 2001, un vin d'orge anglais tout en caramel et en confiture de fruits, avec un plat à base de foie gras au torchon. Si un restaurant de ce calibre (3 étoiles Michelin, une des plus grandes distinctions possibles sur la planète culinaire) s'aventure dans ce territoire peu exploré, nous osons espérer que la vague rattrapera les meilleures tables de nos contrées sous peu. Il nous semble qu'il serait combien plaisant de pouvoir choisir une Saison du Tracteur avec le ceviche de pétoncles, pamplemousse et shiso du Club Chasse et Pêche, ou une Simple Malt Imperial Stout avec la macreuse de boeuf et sa sauce aux pleurotes du Clocher Penché! Après tout, les meilleurs artisans brassicoles méritent de voir leurs produits côte-à-côte avec ceux d'autres artisans du monde agro-alimentaire. 

25 juin 2012

Guide brassicole belge - Bruges

Bruges appartient au club sélect de ces petites villes qui sont des musées à ciel ouvert. Des Dubrovnik, Venise et autres Mont-St-Michel où en haute saison, on trouve plus de touristes caméra à la main que de véritables citoyens locaux. Il y a évidemment des pour et des contre à une telle situation, mais toujours est-il que pour l’amateur dont la passion pour la bière n’est pas vécue aussi intensément par ses compagnons de voyage, Bruges constitue une destination facile. Facile de s’y rendre, facile de convaincre nos comparses que nous n’y allons pas exclusivement pour la bière (essayez d’en faire autant avec les monastères trappistes) et facile de trouver des activités connexes dignes d’intérêt et photogéniques de surcroît.

Alors, après vous être perdus dans les dédales étroits de celle qu’on surnomme la Venise du Nord en raison de ses charmants canaux qu’arpentent moult gondoles, où nous conseillons-vous d’aller faire le plein de bonheur liquide ?

‘t Brugs Beertje (Kemelstraat 5) Sans contredit le pub phare de Bruges auprès des amateurs, l’ourson de Bruges possède la plus belle carte et le service authentique digne des cafés bruns de la campagne belge. Plus de trois centaines d’étiquettes sont offertes dans ce haut-lieu de la bière belge. C’est évidemment la meilleure adresse pour attraper une bouteille rare. La tenancière, Daisy, est légendaire pour son sourire contagieux et son sens de la répartie. Elle vaut le détour à elle seule.



Staminee de Garre (De Garre 1) Sis au fond d’une ruelle d’une improbable étroitesse, Staminee de Garre attire bien des touristes, mais a tout du pub d’initiés où l’on s’imagine facilement les échanges houleux entre philosophes qui devaient y prendre place jadis. L’endroit est étonnamment petit, mais bourré de caractère. Un escalier escarpé à souhait nous mène à un deuxième étage plus que nécessaire. Bien que la carte propose une centaine de bouteilles, les gens y viennent pour essayer la bière maison brassée par Van Steenberge : une espèce de Tripel mieux équilibrée que la trop chaleureuse Piraat de la maison. La bière maison est au contraire un véritable nuage qui tapisse le palais de sa soyeuse texture. On la serre dans son propre verre avec quelques cubes de fromage bienvenus.





Brasserie Cambrinus (Philipstockstraat 19) Quelques pas au nord-est du square principal, la Brasserie Cambrinus se montrait particulièrement populaire auprès des touristes anglais venus assister à un match de foot entre leur équipe et celle de Bruges. L’immense bar qui sépare la grande salle principale en deux est fort attrayant et bien efficace pour maximiser les places assises. La popularité de l’endroit n’empêche toutefois pas certains buveurs de se parquer carrément devant la porte avec leur bière. Côté menu, l’endroit a l’avantage d’offrir une cuisine belge digne de ce nom, laquelle est accompagnée par une excellente carte des bières munie de plusieurs centaines de bouteilles. Si la profondeur de la carte n’est pas celle du ‘t Brugs’ beertje, la quantité est assurément comparable.



Plusieurs autres endroits peuvent valoir le détour selon vos intérêts.



Les fines gueules apprécieront sans doute la cuisine fort réputée du Den Dyver (Djiver 5) qui constitue, semble-t-il, l’une des meilleures tables de Bruges, tout en offrant une carte de bières digne de son pays hôte. Par contre, ceux qui avaient entendu grand bien de l’Erasmus (Wollestraat 35) – Erasmus est un hôtel/restaurant/bar à bières qui traînait autrefois une excellente réputation - feraient mieux de ne pas fonder de trop grands espoirs. Les bons jours de ce quartier général de jadis semblent malheureusement révolus et la carte de bières fait maintenant franchement pitié pour un établissement brugeois. On nous raconte aussi que Café Rose Red (Cordoeanierstreet 18), un pub typique juste à l’extérieur des sentiers touristiquement battus, vaut les quelques pas pour sa carte originale et mieux pourvue en importations.



Halve Mann (Walplein 26) – La seule brasserie de Bruges produit les bières de la Gamme Straffe Hendrik qui ont longtemps été sur les tablettes des détaillants québécois. Le site, dans le sud de la vieille ville, est agréable, pourvu d’un restaurant dont la terrasse jouit de l’ombre du grand fermenteur que l’on voit depuis la rue. Si vous rêviez de boire à l’ombre d’un fermenteur…

Ceux qui recherchent des bouteilles pour terminer la soirée à l’hôtel ou rapporter des souvenirs ont l’embarras du choix. En toute sincérité, les prix de Bruges, comme ceux de Bruxelles d’ailleurs, sont souvent deux fois plus élevés que ceux que l’on retrouve dans les magasins de campagne, les meilleurs desquels ont de surcroît une sélection nettement plus variée. Néanmoins, ces prix demeurent fort raisonnables au pauvre québécois habitué aux prix des belges importées de la SAQ. De bonnes options centrales qui possèdent quelques centaines de produits différents sont :

De Bier Tempel (Philipstockstraat 7) – simple, touristique et très belge, mais une valeur sûre si vous devez demander conseil

2BE (Wollestraat 53) – ostentatoire, mi-musée, mi-magasin, mais impressionnant



Bottle Shop (Wollestraat 13) – bien placé, simple et efficace


Bacchus Cornelius (Academiestraat 17) – au nord du centre de la ville, un peu moins touristique et tendant, il semble, à offrir quelques raretés que les autres magasins centraux n’auront peut-être pas.