29 oct. 2012

Les meilleures cuisines brassicoles du monde - The Anderson, à Fortrose, en Écosse



The Anderson est un des rares endroits sur la planète à réussir à séduire tous les sens. Jim et sa femme Anne (vous aurez deviné que ce sont les Anderson) orchestrent effectivement, depuis une dizaine d'années, un époustouflant concert de saveurs et de conforts à presque tous les soirs de l'année dans leur restaurant/pub/auberge des Highlands écossais. Installés dans un village au nord d'Inverness qui pourrait être habité par davantage de moutons que de clients potentiels, le couple Anderson partage leurs passions avec tout amant de la dégustation. Tout d'abord, vous pourrez trouver en tout temps la sélection de Jim comprenant plus de 200 whiskys à l'ardoise, 100 bières belges en bouteille, une douzaine de bières en fût et une poignée de casks du Royaume-Uni. Et lorsqu'on prend le temps de lire ce vaste menu, on remarque rapidement que c'est de la qualité mur à mur. Le tout, évidemment, servi dans deux pièces immensément chaleureuses. 

Le plus petit des deux bars de l'endroit

Lorsque la faim vous tenaille, c'est Anne et son équipe qui vous prend en charge. Tous les ingrédients principaux de la carte, des viandes aux herbes, viennent de Black Isle (la région précise des Highlands dans laquelle se trouve Fortrose). Honnêtement, il y a beaucoup trop de choix alléchants encore une fois. On peut allègrement passer du gumbo de fruits de mer à la façon Nouvelle-Orléans aux moules des îles Shetland avec une sauce faite de la bière d'Orval et de fromage fumé d'Ullapool, pour ensuite passer à un filet de chevreuil en sauce à la Kriek servi avec black pudding ou à un flanc d'agneau à la grecque sur pâtes à l'encre de seiche et sauce au homard. Comptez sur nous, les saveurs rendues sont aussi impressionnantes que vos attentes seront élevées en lisant la dite carte.

Les habitants laineux du village avec vue sur la baie de Fortrose

Comme si cela ne suffisait pas, les chambres au deuxième étage sont presque toutes munies de lits à baldaquin et de feux de foyer dans un air vieillot qui n'a pas du tout l'air guindé. Le bâtiment a du vécu, c'est évident. Normal, on a le goût d'y passer beaucoup plus que 24 heures à chaque visite!

22 oct. 2012

La Dominus Vobiscum Saison, de la Microbrasserie Charlevoix, à Baie-Saint-Paul


Style : Évidemment, c'est une Saison. Mais, détrompez-vous, ce n'est pas une interprétation 'nouveau monde' de ce style. La Dominus ne met pas en valeur un bouquet explosif de houblons aux notes tropicales tout comme elle n'est pas bourrée d'épices. C'est plutôt une Saison traditionnelle qui respecte les dosages des exemples wallons. Une superbe bière de champ comme de salon.

Le coup d’œil : Une tour de mousse blanche est solidement érigée sur la robe dorée brumeuse.

Le parfum : Un habile équilibre de houblons nobles, de levures à Saison et de fruité rappelant les agrumes nous préparent pour un profil de saveurs tout à fait authentique.

En bouche : Les houblons épicés, les levures et les malts aux effluves de pain semblent se joindre afin de peindre quelques traces d'orange. Le tout est si facile à boire, voire même désaltérant, qu'on a presque le goût d'être égoïste et de ne pas partager...

La finale : Des houblons herbacés à l'amertume doucereuse sont nettoyés par des vagues de gazéification ample et douillette.

Accords : Un fromage à pâte semi-ferme aux accents fermiers (comme Alfred, de la Fromagerie Compton), une salade verte avec huile de tournesol, un pique-nique sous un grand feuillu, puis... une ballade spontanée, tiens. Pour les plus fatigués, il suffira d'entonner "La ballade des gens heureux".

Pourquoi est-ce un grand cru? : L'authenticité du profil de saveurs, le corps moelleux et le dosage méticuleux de toutes les saveurs participantes ne peuvent être plus aguichants. De plus, les flaveurs épicées sont si bien dosées que le dégustateur peut laisser libre cours à son imagination; est-ce qu'il y a de la coriandre dans cette bière? De l'écorce d'orange? Ou est-ce simplement un profil fermentaire épicé?

Si vous avez aimé, essayez aussi : La Saison du Tracteur, du Trou du Diable (à Shawinigan), la Saison Rustique de la Brasserie Dunham (à Dunham) et la Arthur de Hill Farmstead (au Vermont).

14 oct. 2012

L'improbable histoire de levures qui n'existaient pas


Madame Udriene, brasseure campagnarde du hameau de Jovarai, à quelques mètres de Pakruojis dans le nord-est de la Lituanie, brasse sa Jovaru Alus avec presque les mêmes ingrédients que ses ancêtres. Notamment, sa souche de levure est la même que celle utilisée par la famille depuis des lunes. Ce n'est pas une version fraîche de cette souche non plus. C'est la souche originale qui oeuvre dans les fermenteurs à aire ouverte de la picobrasserie depuis des générations. Lorsque ces levures ont dû être gardées au froid dans une période où la réfrigération n'était tout simplement pas disponible, elles étaient mises sous terre, à l'abri des chaleurs estivales. Lorsque le brasseur en avait besoin, il les déterrait et les mettait au travail peu de temps après. Vous pouvez imaginer les mutations que ces levures ont subies après avoir été utilisées aussi souvent et dans de telles conditions...

Madame Udriene, dans sa brasserie derrière sa maison

Une fois revenus à Montréal, avec quelques bouteilles de plastique pleines de Jovaru Alus dans nos valises, nous avons partagé ce produit unique en dégustation. Un ami à nous, fasciné autant que nous par la rondeur de cette bière et, somme toute, sa grande buvabilité,  a pris plaisir à mesurer sa densité finale. En d'autres mots, il voulait connaître la quantité de sucres résiduels de cette Kaimiškas Alus, qui nous apparaissait passablement riche et douce. Coup d'éclat: le résultat de la mesure de la densité finale était aussi improbable que difficile à comprendre. 1.0025; 95% d'atténuation! Si vous préférez, nous avions techniquement affaire avec une bière presque dénuée de sucres résiduels... Nos papilles refusaient le constat, mais nos cerveaux respectifs ne pouvaient que faire confiance à notre ami brasseur, parmi les plus professionnels et diligents qu'il nous a été donné de rencontrer. Nous avons été plongés dans le mystère le plus complet pendant une bonne semaine.

À la prochaine dégustation, nous avons remarqué qu'effectivement la finale de la Jovaru Alus, donc l'impression en bouche tout juste avant la déglutition, était très mince, voire même sèche. Mais le corps qui la précédait était loin d'être chétif. Disons une rondeur semblable à celle d'une Extra Special Bitter, classique.  Le mystère devenait de plus en plus profond; nous étions dans l'incompréhension totale. Jusqu'à ce qu'une amie, brasseure elle aussi, et surtout étudiante au doctorat en biologie, nous proposa d'examiner la lie de notre dernière bouteille au microscope. Les levures de Madame Udriene ont donc été transportées vers un laboratoire et un centre de séquençage à l'Université McGill.


De fil en aiguille, la séquence d'ADN des levures de Jovarai a été comparée à toutes les séquences d'ADN d'espèces de levures connues dans la banque de données GenBank, une banque gérée par le National Center for Biotechnology qui contient toute les séquences d'ADN identifiées et déposées par des chercheurs à travers le monde dans les 20 dernières années. Premier résultat: nous avions sous la main des levures de l'espèce Saccharomyces. Aucune surprise à ce niveau. Il restait à trouver la spécificité de ces levures. En d'autres mots, était-ce une Saccharomyces Carlbergensis, une Saccharomyces Bayanus, une Saccharomyces Cerevisiae Diastaticus, etc.? Après avoir comparé avec toutes les Saccharomyces de la banque de données mondiale, la réponse était 'non'. Toujours 'non'. Aucune des souches dans la GenBank ne pouvait être assignée à celle de la Jovaru. Les résultats suggèrent donc que la souche de la famille Udriene puisse appartenir à une espèce non identifiée. Cependant, nous ne pouvons tester la possibilité que cette souche soit le résultat d'une hybridation de deux espèces de Saccharomyces. C'est comme si nous avions trouvé une grenouille inconnue du monde scientifique. Il se peut qu'elle soit d'une nouvelle espèce; mais il se peut aussi que ce soit simplement une grenouille connue mais mutée, munie de quelques organes déformés. Comme si la Lituanie ne nous pas déjà convaincue qu'elle possédait une culture brassicole à part entière...


Gros merci à Olivier Bergeron, pour sa curiosité initiale qui a mené à des recherches plus poussées, et à Marie-Julie Favé, qui nous a permis de faire la lumière sur cette souche de levure on ne peut plus fascinante.

Un journal lituanien traitant de notre découverte:

11 oct. 2012

Pourquoi percevons-nous différemment les bières devenues "classiques"?

Comme ça, la St-Ambroise Noire ne serait plus ce qu’elle était. La Trois-Pistoles ne serait plus l’ombre d’elle-même. Ces grands classiques d’hier et d’aujourd’hui, comme plusieurs de leurs honorables confrères pionniers font moins parler qu’il y a quelques années. À en croire certains amateurs, ces produits sont toujours agréables, mais beaucoup moins qu’autrefois. Pire, selon certains, la faute incomberait aux brasseurs. Les théories sont multiples : l’attention accrue aux coûts de production lorsqu’une microbrasserie croît, les changements d’équipement de brassage, la tendance subtile et sournoise des brasseurs de rendre leurs produits plus doux afin de plaire au plus grand nombre… Tout a été évoqué.

Certains amateurs choisissent plutôt de faire porter le blâme à leurs propres papilles. Simplement, leurs goûts ont évolué avec le temps. Nous allons dans le même sens, mais encore plus loin. En effet, de prime abord, il est presque inimaginable qu’une St-Ambroise Noire ou une Trois-Pistoles goûte exactement la même chose qu’il y a dix ou quinze ans. En effet, même si nous ignorons si les ingrédients sont restés les mêmes, il est indéniable qu’une entreprise en croissance ait vu ses équipements évoluer. Que dire des brasseurs eux-mêmes. Combien d’employés se sont succédés dans les salles de production de McAuslan et d’Unibroue au fil de la dernière décennie. Vous pouvez bien donner une même recette à deux grands cuisiniers maîtrisant parfaitement les techniques de leur métier, les deux plats qu’ils produiront ne seront pas identiques. Nous ne parlons pas ici de produits scientifiquement industrialisés tel un Big Mac, nous parlons de bière artisanale. Donc oublions d’emblée la parfaite stabilité temporelle de nos références de jadis. Et surtout, oublions encore plus rapidement la parfaite stabilité temporelle de nos références d’aujourd’hui. Si les McAuslan et Unibroue ne peuvent pas goûter exactement ce qu’elle goûtaient hier, imaginez alors les Trou du Diable et autres Charlevoix que vous admirez aujourd’hui.

La gamme d'Unibroue rafle toujours de multiples honneurs dans des concours partout sur la planète...

Lorsque la pénurie de houblon s’est pointée le nez, pensez-vous que toutes les brasseries ont maintenu intactes les recettes de leur gamme de bière? Si elles ont préféré le résultat obtenu en tentant de réaligner le tir, pensez-vous qu’elles sont retournées en arrière? Bien sûr que non. Nombre de brasseries artisanales sont constamment à tenter d’améliorer leurs recettes. Certaines changent les noms de brassins en brassins, d’autres, non. Plusieurs de ces bières sont vos favorites, celles que vous considérez désormais comme ayant pris la place des Trois-Pistoles et St-Ambroise Noire. 

Sur une tangente différente, rappelez-vous votre univers de la bière il y a dix ans. Montréal avait certes Dieu du Ciel (avec beaucoup moins de fûts…) et l’Amère à Boire, mais ni Succursale, ni St-Bock, ni Vices et Versa, ni Brouhaha, ni Benelux… L’offre était très bonne il y a dix ans, ne vous y méprenez pas, mais elle n’était pas la moitié de ce qu’elle est devenue aujourd’hui, et probablement nettement inférieure à ce qu’elle deviendra demain. Comme Coureurs des Boires, nous avons pu constater cette heureuse réalité à répétition depuis quelques années. Lorsque La Route des Grands Crus de la Bière a été publiée, il y a environ deux ans aujourd’hui, nous avions sélectionné une centaine de grands crus québécois et de Nouvelle-Angleterre en nous basant sur certains critères de qualité tant personnels et subjectifs que longuement discutés et pris au sérieux. Aujourd’hui, seulement deux ans plus tard rappelons-le, en maintenant les mêmes seuils de qualité, nous pourrions trouver une cinquantaine de nouveaux grands crus sur le même territoire. En parallèle, rares sont les grands crus du livre que nous voudrions retirer dans une réédition. L’offre microbrassicole est un environnement qui évolue et c’est un véritable ouragan qui emporte tous les dégustateurs dans son sillon. Nos références ne peuvent qu’évoluer en tentant de s’adapter. L’offre de produits de qualité se renouvelle constamment.

Lorsqu'on fait connaissance avec la Framboyante des Brasseurs du Temps, c'est certain que l'on perçoit soudainement la bière à la framboise de McAuslan différemment

Où voulons-nous en venir? Eh bien, se pourrait-il que cette Trois-Pistoles et cette St-Ambroise Noire, qui étaient naguère solidement ancrées dans nos top 10 des bières québécoises, n’aient pas évoluées tant que ça? Plutôt, si une ou deux centaine(s) de bières étaient autrefois en concurrence pour une place dans nos top 10, elles sont maintenant beaucoup plus d’un millier. En d’autres mots, toutes proportions étant conservées, les top 10 d’il y a dix ans équivalent peut-être bien aux top 100 contemporain. Conséquemment, dans quatre ou cinq ans, lorsque de nouvelles brasseries auront continué de renouveler l’offre de produits de qualité, peut-être constaterez-vous avec nostalgie que la Trois-Pistoles et la St-Ambroise figurent toujours à votre top 200. Il sera alors grand temps de renouveler avec ces flammes et de les remercier pour leur fidélité, car si vos goûts ont peut-être évolué, elles-mêmes se sont montrées d’une impressionnante constance et fiabilité considérant l'effervescence certaine du monde qui les entoure. 

4 oct. 2012

Nous, les bobos de la bière

Si comme moi vous avez grandi avec The Simpsons et François Pérusse pour références humoristiques et que comme moi, vous n’avez pas beaucoup grandi depuis, alors vous êtes probablement comme moi et vous vous trouvez grandi après avoir écouté un épisode de l’exquise série télévisée Les Bobos, mettant à l’affiche les talentueux Anne Dorval et Marc Labrèche. Ces bourgeois bohèmes sont la définition même du « all-talk », s’auto-proclamant juges du bon goût sur tout et surtout sur rien. Premiers à critiquer, derniers à créer, ils dénigrent constamment leurs prochains pour leur rusticité et ce, avec une artificialité à la fois ironique et pathétique. La table étant mise, il faut reconnaître que l’amateur de bière féru pourrait facilement faire l’objet d’une bonne saynète à la sauce des Bobos.

En effet, si pour le lecteur moyen de ce blogue, il est tout à fait normal d’inspecter la robe ébène d’un Imperial Stout à l’aide d’une lampe de poche afin de nous assurer de sa parfaite opacité, il n’en est pas nécessairement ainsi pour une majorité de téléspectateur d’une émission populaire. Nous avons beau présenter la bière comme une boisson populaire invitant à socialiser et se prenant moins au sérieux que le vin, en prenant du recul, il y a quelque chose d’étonnant et superficiel aux côtés des grands enjeux de société à consigner dans un tableur Excel nos notes de dégustations tout en critiquant notre mère qui lave sa flûte de blanche de Chambly édition 1995 au savon sans tenir compte de l’impact négatif du savon sur la tenue de mousse.

Bien sûr, vous aimez les bières artisanales uniquement pour leurs arômes, leurs textures et leurs saveurs. Vous n’en avez que faire de l’appartenance à une strate de société ou une autre en fonction de ce que vous ingérez. Faut-il pour autant interpréter comme une attaque personnelle la survie de Breughel qui pousse l’audace jusqu’à l’ouverture d’une deuxième succursale? Faut-il refuser de boire la Rickard’s Red que votre beau-père vous offre gracieusement parce que « vous savez qu’elle n’est pas bonne » sans même l’avoir tâté de vos papilles? Faut-il absolument prendre une photo du menu du Benelux lors d’un Cask Night parce que « le menu est juste trop malade!! »? Oui, je sais, vous êtes des passionnés. C’est ce qui vous allume, ce qui vous garde en vie. N’empêche, parce qu’un peu d’autodérision aide toujours à mettre en lumière nos gravissimes problèmes comme une rumeur de pénurie de houblon ou le faible nombre de bouteilles embouteillées du Porter Baltique vieilli en fût de bourbon des Trois Mousquetaires, si jamais un de nos lecteurs connaît bien un scénariste des Bobos, parlez-lui de nous. Nous sommes prêts à leur démontrer toute la superficialité de nos petites personnes si ça peut leur inspirer un sketch hilarant. Sur ce, je vous laisse, je dois aller terminer l’inventaire hebdomadaire de ma collection d’ouvre-bouteilles.

David et un de ses idoles, Jan-Philippe Barbeau, maître-brasseur du Loup Rouge
Photographie de David Gingras

29 sept. 2012

Les pâturages brassicoles de la Lituanie - sur le chemin de Panevėžys


Cet ancien bunker sert maintenant de salle de conditionnement et d'embouteillage pour l'excellente brasserie Kupiškio


Entre Vilnius au sud-est de la Lituanie et le nord-est campagnard du pays où la majorité des brasseurs fermiers évoluent se trouve la région de Panevėžys, cinquième ville du pays. Étonnament, même si c'est la bourgade de Biržai qui se voit nommée officieusement la capitale brassicole du pays, davantage de brasseries opèrent dans la région de Panevėžys. Voici premièrement celles en périphérie, toutes sur le chemin de cette ville énigmatique:


Kupiškio Alaus, à Kupiškis
Entrée de la petite boutique de la brasserie

Seulement disponible en bouteilles de 2 litres (en verre et non en plastique; quel luxe!), la Magaryčių Alus de Kupiškio a tout pour séduire. Imbue de subtiles notes rurales, elle étale ses malts toastés et ses noisettes rôties sur de surprenants houblons boisés et herbacés. Une grande bière. Même constat pour la Patulo Alus, plus citronnée et sèche et la Keptinis, recréation d'un vieux style de bière lituanien presque disparu.

Bien que l'on puisse trouver ces bières dans toute leur fraîcheur à Kupiškis même, soit à l'est de Panevėžys, les belles bouteilles de formes variées de cette brasserie se trouvent assez facilement à Vilnius, si vous savez où aller bien sûr... De plus, cette boutique de Kupiškio Alaus se veut un arrêt agréable pour faire le plein en direction de l'excentrique brasserie Čižo à Dusetos (par exemple).

Chose rare en Lituanie, le contenant est aussi agréable que le contenu chez Kupiškio


Taruškų Alaus Bravoras et Miežiškių Bravoras, à Trakiškis
Pichets de service traditionnels

Tout juste à l'est de Panevėžys, sur une route rurale comme toutes les autres, un bâtiment sans âme abrite non pas une, mais deux brasseries artisanales. Aucune enseigne ne communique ce fait cependant. Impossible de comprendre ce qui se trame donc derrière la grisaille industrielle. Question d'augmenter la confusion, les deux brasseries se retrouvent exactement côte-à-côte et appartiennent d'ailleurs aux mêmes propriétaires... Puis ils ont toutes deux leur propre système complet de brassage. Bref, ces entrepreneurs ont tout en double et ce, à relativement gros volume. Question de rendre les choses encore plus agréables pour ceux tentant de les découvrir, ces deux brasseries ont changé de nom récemment: une s'appelait Habilitas et l'autre Habiterus. De telles histoires ne s'inventent pas.

Ce qui importe pour nous tous, c'est que les bières sortant des nombreuses cuves de cette entreprise sont de grande qualité. La Taruškų Šviesus charme le plus avec ses modestes notes de foin adjointes à des céréales toastées et une finale de houblon épicé, le tout dans un corps relativement sec. La Kanapinis Tamsus est presque autant talentueuse, laissant dévaler des malts toastés et caramélisés sur un lit doucement fruité, construisant un example classique de la Tamsus lituanienne.


Des vestiges de l'ère soviétique toujours capables de produire des bières très agréables

Su Puta Alaus, à Paliūniškis
Enseigne au devant de la boutique de la brasserie

Dans un quartier résidentiel au nord de Panevėžys, la famille Gūrų concocte des bières somme toute mémorables. Chose pratique, Su Puta possède une minuscule boutique en face de la brasserie où tout passant peut faire remplir des bouteilles de bières fraîches à même le fût. Le même concept qu'un 'growler' en Amérique du Nord, finalement. Un vieil homme s'y attardait d'ailleurs, jasant avec la dame de la maison, pinte en main, lorsqu'il nous aperçut sur le point d'envahir son quotidien de notre étrangeté. Quelques secondes plus tard, nous étions seuls avec la dame... 

La brasserie offrait non moins de 5 bières différentes ce jour-là, en plus d'un gira (le kvass des lituaniens). La plus délectable à ce moment était l'étonnante Senolių, une ale passablement levurée non sans rappeler certains grands succès de l'ouest européen (belge forte ou Heller Weizenbock?) avec ses esters de bananes, ses flaveurs de pain, de blé et ses houblons épicés, le tout à 8% d'alcool. 

Contrairement à la majorité des brasseries dans notre guide brassicole de la Lituanie, il est très facile d'obtenir les bières de Su Puta. Un défi de moins une fois de temps en temps, ça fait du bien!


Maison-boutique devant la brasserie Su Puta


Piniava Alutis, à Piniavos
Il n'est pas rare qu'une brasserie en Lituanie soit située dans un bâtiment ayant des allures de bloc à appartements






Cette brasserie aux apparences anodines façonne pourtant des bières fascinantes, dont l'excellente Seklyčios, une bière aux céréales toastées munies d'angles miellés et saupoudrées de houblons boisés, amers. Une superbe bière de soif que l'on peut déguster au très chaleureux bar Prie Uosio, à Panevėžys même (on le présentera dans un futur article). 




La brasserie concocte aussi d'autres bières plus surprenantes, fermentées à 35 degrés Celsius(!!) avec de la levure à pain, filtrées soit à l'aide de branches de framboisiers, soit à l'aide de branches de trèfle violet. Une tradition de la région de Kupiškis, selon le maître-brasseur. Comme la majorité des brasseries de la campagne, impossible de tout simplement passer chez Piniava Alutis sans rendez-vous, mais au moins on peut se replier sur le Prie Uosio en ville!







Propriétaire et maître-brasseur de Piniava Alutis nous faisant visiter sa brasserie

Avant de passer au prochain article sur les bars et brasseries du centre de Panevėžys, nous devons vous confier qu'il nous reste encore du travail à faire en périphérie de la ville. Notamment, nous avons pris connaissance d'une autre brasserie rustique du nom Salamiescio Alus, supposément à Paliūniškis, tout près de Su Puta. Notre ami de Tikras Alus les a contacté récemment et la dame au bout du fil a presque essayé de le convaincre de ne pas passer les voir... Disant qu'ils vendent seulement aux gens locaux, mais qu'ils sont sur le point de fermer de toute façon, elle a renchéri en clamant qu'elle ne voulait pas qu'on parle d'elle. Désolé, madame, mais on peut retrouver l'adresse de votre entreprise dans les recueils locaux à cet effet... Une autre brasserie à déguster lors de notre prochain périple en Lituanie!

20 sept. 2012

Les meilleures cuisines brassicoles du monde - le "Kura-Rin Ginza Lounge", à Tokyo



Ceci est le premier de plusieurs billets à venir mettant en vedette les meilleurs endroits sur la planète où une sélection judicieuse de bières de grande qualité est accompagnée d'une cuisine aussi relevée. Même si la révolution microbrassicole a donné naissance à des bières de plus en plus savoureuses et/ou complexes, force est d'admettre que l'expérience de dégustation de notre élixir préféré est rarement jointe à un menu gastronomique. Les endroits mis en valeur dans cette série de billets en sont, évidemment, de délicieuses exceptions:

Le Kura-Rin Ginza Lounge est le quartier-général tokyoïte de Swan Lake Beer, une microbrasserie à quelques heures au nord dans la préfecture de Niigata. Un vaste menu de spécialités endémiques à Niigata accompagne les bières de Swan Lake qui coulent des nombreux fûts du restaurant; une de ces bières est d'ailleurs servie en cask et certaines en bouteille (souvent les bières fortes, millésimées). Ces mêmes bières sont disponibles en formats de 180ml, 350ml et 500ml, parfait pour ceux désirant une dégustation minutieuse et ceux souhaitant plutôt apprendre à connaître une ou deux bières intimement... De celles-ci, nous vous recommandons leur Amber Ale, une création qui excède toutes attentes que vous pourriez avoir avec ce style souvent simplet.
 
新潟地ビール 『スワンレイクビール!!!』

En effet, si toutes les 'ales ambrées' étaient armées d'un flair semblable à celle de Swan Lake, l'appellation jouirait peut-être d'une meilleure réputation auprès des amateurs de bières de qualité. Ses houblons résineux et fruités percent des malts délicatement caramélisés avant que des saveurs terreuses et boisées prennent le contrôle jusqu'à une aguichante amertume. Pour vous donner une idée, elle possède davantage de saveurs et de complexité que leur Lake Bottom Barley Wine, qui lui se vend à un prix plusieurs fois plus cher (25$ environ la bouteille de 500ml!).

『旬鮮魚の盛合せ』

Pour une majorité de visiteurs, la raison principale d'essayer le Kura-Rin est bien entendu sa cuisine. Avec raison, les tranches de katsuo, pour ne nommer que celles-ci, fondent dans la bouche. Du grand sashimi. Même constat pour les poissons tempura et les légumes saisonniers légèrement salés: absolument délectables. Un souper complet revient à environ 75$ par personne avec une bière ou deux. Tout est merveilleusement frais et méticuleusement préparé et présenté; la quintessence de la cuisine japonaise, quoi. Les serveurs ne parlent que japonais et aucun menu n'existe pour les touristes (préparez-vous donc à pointer du doigt sur quelques images). Venez donc avec un sourire et un esprit affamé de découvertes!





Puisque ce restaurant pourrait être difficile à trouver pour un gaijin, voici quelques indications pour vous aider. Premièrement, débarquez à la station Higashi-Ginza. Trouvez le théâtre Kabuki-za et installez-vous face à son entrée. Au centre de cette façade, faites demi-tour et regardez de l'autre côté de la rue; vous y verrez la rue Kobikicho-dori. Allez-y! Marchez trois pâtés de maison vers le sud et vous devriez apercevoir le sujet de photo ci-dessous sur votre gauche. Un bureau de poste est en face, de l'autre côté de la rue.


Le Kura-Rin Ginza Lounge est en bas des marches derrière cette porte. La carte ci-dessous pourrait vous être utile également si vous désirez vous faire aider par un passant: http://www.swanlake.co.jp/main/kura/ginza/kura_rin_ginza_map.jpg



11 sept. 2012

La LaPatt Robuste Porter, de la Brasserie Dunham, à Dunham



La sortie de ce premier brassin embouteillé de la Robuste Porter suit celle d'un autre grand cru, leur Rye ESB, qui a atteint nos tablettes cet été. Ose-t-on rêver au dicton 'jamais deux sans trois'? La nouvelle équipe de la Brasserie Dunham est sur une si délicieuse lancée; pourquoi pas! Entre temps, voici la fiche Grand Cru de cette bière au nom qui évoque autant la Labatt Porter (ironiquement, bien sûr) qu'un des deux brasseurs de Dunham, Pat Roy:


Style : Robust Porter houblonné à l'américaine. On dirait presque une Black IPA plus charnue qu'à l'habitude.

Disponibilité : Le premier brassin embouteillé vient de paraître sur les étagères il y a quelques jours. Espérons que nous reverrons ce Robust Porter régulièrement!

Le coup d’œil : Une tranche de mousse s'installe sur la noirceur bordée de marron.

Le parfum : Ouf, quel arôme! Des malts toastés, caramélisés, rôtis et chocolatés sont chevauchés par des houblons résineux rappelant une forêt de conifères. L'harmonie des composantes est aussi percutante que le dosage est intelligent.

En bouche : Un corps crémeux et réconfortant sert d'assise pour la lancée impressionnante des malts chocolatés, sertie de saveurs de houblons résineux tissés serré.

La finale : L'amertume des malts rôtis est nivelée à celle des houblons résineux, le tout nappé de sucres chocolatés et légèrement caramélisés.

Accords : Une généreuse pièce de viande rouge sur le gril. En plus d'agir à titre de sauce un peu sucrée (grâce aux sucres résiduels des malts caramélisés et chocolatés) et de branches d'herbes perçantes (les houblons rappelant le pin et le romarin), la Robuste Porter se liera aux traces du gril sur le steak avec l'aide de ses malts rôtis.

Pourquoi est-ce un grand cru?: Souvent les bières d'un tel impact gustatif relevé se résument à l'intensité avec laquelle elles s'expriment. Ce n'est évidemment pas le cas ici. Ses flaveurs riches sont aussi complexes, en plus d'être bien définies et jamais lassantes, se laissant boire aisément; le meilleur de tous les mondes, quoi!

Si vous avez aimé, essayez aussi : La Gaspésienne, de Pit-Caribou (L'Anse-à-Beaufils; celle-ci est moins houblonnée, penchant donc vers le malt chocolat), la Strato, du Benelux (Montréal) et la Robust Porter de Smuttynose (au New Hampshire).

4 sept. 2012

Les pâturages brassicoles de la Lituanie - la région des lacs


Impossible de manquer la brasserie Čižo en arrivant dans le village de Dusetos par l'ouest


Avertissement de difficulté: Les deux brasseries décrites ci-dessous possèdent bien un salon de dégustation, ce qui est rare en Lituanie, mais dans les deux cas il est ouvert seulement en été ou lors d'occasions spéciales. Prière de vous informer avant de vous lancer sur la route.


Ramūno Čižo Alaus Darykla, à Dusetos


À quelques kilomètres de la frontière lettone et bièlorusse travaille Ramūno Čižo. Jusqu'à ce que l'excellente brasserie Kupiškio aille récemment de l'avant avec sa propre version modernisée de la Keptinis, Čižo était à lui seul responsable de la survie de ce type de bière n'existant autrement que dans les livres brassicoles lituaniens. Comme d'autres brasseurs de Kaimiškas Alus (bières campagnardes traditionnelles), il ne bouille pas son moût et gazéifie parcimonieusement, de façon naturelle. La recette typique de la Keptinis requière aussi que le brasseur cuise un pain à partir des malts en phase d'empâtage avant de faciliter la conversion. Mais c'était surtout une façon économique, jadis, de faire augmenter la température du dit empâtage sans avoir à faire chauffer autre chose que le four à pain de la maison qui lui bénéficiait d'une chaleur constante.

Bien que Čižo soit généreux de détails mettant en valeur sa bière, pas question de partager sa souche de levure avec qui que ce soit. "Je partagerais ma femme avant de faire de même avec ma levure", nous a-t-il confié, répétant une blague que nous avions entendue plus tôt dans le voyage. Inutile de dire que ce brasseur campagnard ne sait pas qu'on aurait pu cultiver cette même levure à partir du cruchon rempli de 4 litres de bière qu'il nous a donné en guise de cadeau de départ... 

Monsieur Čižo lui-même, fière de partager son savoir-faire ancestral

La bière obtenue de ce processus des plus rustiques est imbue d'un terroir évident. Les malts lituaniens offrent déjà une personnalité distincte, mais les saveurs cuites obtenues dans le four à pain, le thé de houblon infusé dans l'empâtage et la levure campagnarde se joignent afin d'offrir un profil de saveurs qui respire la région environnante. Brune, opaque, coiffée d'une faible mousse, elle étale des saveurs boisées, terreuses et légèrement fumées dans un corps presque aqueux. On croit vraiment avoir voyagé dans le temps à chaque gorgée.

À noter que le deuxième étage de la brasserie abrite un petit musée brassicole et qu'il est possible de camper sur le site en saison. De plus, une chambre est à louer dans la maison de Monsieur et Madame Čižo. Mais nous ne vous conseillons pas d'y parler de levures...

Un dernier verre de Keptinis avant de passer au prochain paragraphe?


Vasaknu Dvaro, à Vasaknai

Jusqu'à tout récemment, un manoir en ruines refléchissant dans les eaux calmes d'un lac peignait un portrait désolant de la région. Racheté par des investisseurs de la ville, entièrement reconstruit et transformé en hôtel de luxe, le Vasaknu Dvaro accueille maintenant des touristes en moyen et des dignitaires étrangers en quête de quiétude. Et quoi de mieux qu'une brasserie sur place pour s'assurer du bien-être quotidien de ses clients! 

Au centre du manoir

Située dans un bâtiment à quelques centaines de mètres du manoir, la brasserie est terrée entre vieux murs de pierre d'une autre époque dans un autre édifice partiellement en ruines. C'est là que le brasseur concocte le classique duo lituanien de Šviesus et Tamsus. Toutefois, même si ces bières présentent de belles saveurs, équilibrées et agréables à boire, force est d'admettre qu'elles ne nous apparaissent pas comme étant 'lituaniennes' à proprement dit.  On aurait dit que tous les ingrédients proviennent de malteries et de houblonnières d'Europe de l'ouest. 

Porte de la brasserie avec la manoir en arrière-plan

Les levures et les méthodes de fermentation ne rappellent pas du tout ce que font les brasseurs campagnards du pays non plus. À en juger par l'équipement brassicole hautement sophistiqué (à l'ère digitale pour certains contrôles!), les investisseurs de Vasaknu ne veulent certainement pas avoir l'air de produire des bières au cachet rustique. N'empêche, si vous voulez déguster l'antithèse de la bière de Ramuno Čižo à quelques kilomètres de là, une visite - et une nuitée? - à Vasaknu s'impose.

Brasseur de Vasaknu Dvaro

La suite de notre guide de voyage brassicole sur la Lituanie se déroulera à Panevėžys, cinquième ville du pays, et ses alentours. On essaiera d'y aborder, oh, une dizaine de brasseries artisanales?

29 août 2012

Les bières importées de la fête Bières et Saveurs 2012

Encore une fois, Bières et Saveurs nous offrira, la fin de semaine prochaine, l’un des meilleurs éventails de grands crus québécois de l’année. Jetez un coup d’oeil à notre section Fiches grands crus pour nos plus récentes suggestions.

En parallèle, Bières et Saveurs récidive avec son kiosque de bières importées, piloté par des bénévoles d’Importations Privées Bièropholie qui sont toujours à même de prodiguer des conseils de qualité. Vous vous demandez ce qu’ils offriront cette année ? Eh bien voici !

Cantillon St-Lamvinus Sans conteste, voici LA bière que vous devez faire essayer à vos accompagnateurs qui n’en ont que pour le vin. Ils y retrouveront les flaveurs de raisins et tannins afférents qu’ils adorent, cette Cantillon ayant vieillie en unissons avec des cépages de Bordeaux à l’intérieur d’un fût de chêne provenant d’un vigneron de Bordeaux. L’acidité tant malique que lactique rejoindra tant l’amateur de Gueuze que celui de vin rouge. Non seulement elle est excellente en soi, cette bière constituera aussi une merveilleuse option pour régénérer les papilles fatiguées du festivalier moyen.


Brooklyn Local One Une nouveauté au kiosque des importations cette année, cette Triple du Nouveau Monde s’avère très bien réussie, plus en houblon que la norme, mais plus qu’honnête dans ses craquants malts pâles et son caractère fermentaire intelligemment fruité. Heureusement que le festival ne nous offre que des échantillons parce qu’il serait facile de se laisser emporter et d’en consommer beaucoup sans tenir compte de son contenu d’alcool élevé.


Amager Galanthus Nivalis Seules 1600 bouteilles de ce Barley Wine danois exclusif, ayant été vieilli dans des fûts ayant préalablement contenu du porto, ont été produites. Imaginez la chance de pouvoir y goûter à Chambly. Sans surprise, c’est dans le registre des fruits foncés, du chêne, du caramel et de l’alcool que cette rareté fait ses marques. Les amateurs de porto et de bières digestives auront avantage à ne pas manquer. Notez qu’il s’agit ici de restants de l’an dernier. Heureusement, cette bière possède tous les attributs (alcool et sucres résiduels abondants, effervescence peu importante, fraîcheur minimale, robe plutôt foncée, etc.) pour résister au test des années. Faites vite, il ne reste, nous dit-on, moins de 10 bouteilles !

Traquair Jacobite Un grand classique que cette Écossaise à l’arôme d’une complexité monumentale. Véritable dessert liquide (pouding, gâteau au chocolat, fruits confits…) parfumé d’une touche de coriandre qui y trouve son compte. Sensuelle et fruitée, un deuxième échantillon s’avérera sans doute nécessaire pour y percer ne serait-ce que la moitié de ses mystères. Il existe bien peu de comparables, mais si le mariage inusité entre une Dieu du Ciel Solstice d’Hiver, une Dominus Vobiscum Hibernus de Charlevoix et une coupe de chocolat grand cru de Juliette et Chocolat représente pour vous un fantasme, visez ici l’orgasme.

Brooklyn Monster Ale Le grand digestif de la maison Brooklyn regorge de profondes flaveurs sucrées : source inépuisable de caramel aux intonations bien biscuitées, il s’appuie sur une charpente bien huileuse, mais sans être excessivement épaisse ni collante. Un panier de fruits s’échappe de ses soubassements tout en malt et même si les houblons sont bien présents, ils demeurent humblement à l’arrière-plan. Peut-être pas la bière idéale pour commencer la journée, mais si le début de soirée s’avère le moindrement frisquet, voilà une complice qui saura vous réchauffer l’âme.

Uerige Doppel Sticke
Vous connaissez probablement la Doppelbock, cette bock plus grande que nature ? Sachez que la même remouture existe aussi chez l’Altbier, la réponse de l’Allemagne à la Pale Ale anglaise, dont la Sticke est déjà une version légèrement plus forte. En somme, d’une Doppel Sticke, il faut s’attendre plus ou moins au barley wine de l’Allemagne – la grâce des céréales et houblons d’Allemagne, mais avec une levure sachant se faire discrète et laissant les ingrédients de base prendre un maximum de place plutôt que de les substituer par un caractère fermentaire exagérément fruité ou épicé. Et comme il est ici question de la brasserie Uerige, le houblon est utilisé généreusement, pour notre plus grand plaisir considérant son héritage noble.

Andechs Doppelbock Dunkel Une des plus merveilleuses odes au malt munich au monde, cette délicieuse Doppelbock presque introuvable en Amérique du Nord déploie un caractère de pain grillé incomparable. Des houblons feuillus subtils assèchent timidement ce toast à peine caramélisé, mais abondamment pourvu de nuances de noisettes et de céréales. Les amateurs de malt doivent impérativement se laisser tenter par cette superbe opportunité.

Rogue Double Dead Guy Vous connaissez peut-être la Dead Guy de Rogue que nous avons eu la chance de croiser sur les tablettes de la SAQ ? Voici une version survoltée de cet hybride entre une Maibock et une India Pale Ale américaine – plus intense à tout point de vue. C’est donc dire qu’elle est plus miellée, plus biscuitée, plus florale et plus amère.

Rogue Mom Hefeweizen La toujours très créative brasserie Rogue récidive dans le domaine de l’hybride avec cette blanche aux levures de Weizen, mais épicée telle une Witbier. Les amateurs de bière de blé bien ronde et céréalière feraient probablement mieux de chercher ailleurs, nous avons ici affaire à une bière croustillante, plutôt mince et d’une facilité déconcertante à boire, des traits de personnalité amplifiés par un houblon Saaz épicé à souhait et de rafraîchissantes notes de gingembre.

Traquair House Ale Un festival de malts tout écossais vous attend chez cette spécialité de la maison vaquant entre le plum pudding et le massepain sans nous écoeurer de ses sucres, peut-être à cause de ses soupçons d’acidité et de tourbe. Fruitée et chocolatée à souhait, son alcool demeure mitigé. Les amoureux de Scotch Ale, Barley Wine anglais et autres Old Ale y découvriront une nouvelle flamme.

Het Anker Gouden Carolus Grand Cru de l’Empereur Bien que peu subtile, cette ale belge cochonne comme on les aime nous étouffe de sa décadente complexité. C’est simple, pensez à un fruit ou une nuance maltée, concentrez-vous et vous avez toutes les chances de l’y retrouver dans cette bière digestive. Une proie de choix pour les fervents de Trois-Pistoles et Rigor Mortis ABT.

De Dolle Stille Nacht Cette bière de Noël belge des De Dolle Brouwers, les brasseurs fous, ne recherche pas non plus la subtilité. Sa ribambelle de fruits, son alcool assumé et sa complexité indéniable nous font immanquablement penser à un Barley Wine anglais sertie d’une puissante levure caractérielle. Il faut disposer d’une bonne tolérance au sucre toutefois, surtout si vous enchaînez avec la Gouden Carolus ci-dessus.

Malheur Bière Brut Réserve Imaginez une Saison extra forte dont la levure sait se comporter en public. Une effervescence champagnesque soutient les malts aux notes de foin et un fruité tant posé que complexe. Florale et abondamment amère, elle évolue rapidement vers une sécheresse presque rafraîchissante. Les chanceux ayant goûté à la Brut de Charlevoix resteront béats devant cette spectaculaire offrande de De Landtsheer. Les amateurs d’Avec les Bons Vœux de Dupont seront aussi en mesure de collecter leur moment de bonheur.

Port Brewing Old Viscosity Cette inclassable flirte avec le Barley Wine et l’Imperial Stout, si bien que ses malts sont d’une redoutable complexité, jouant dans le royaume du rôti/chocolat ainsi que dans les douceurs caramélisées. La vaste gamme de nuances fruitées apporte une profondeur captivante alors que les houblons américains abondants laissent toutefois la vedette aux céréales.

Lost Abbey Devotion Nous vous pardonnerions facilement de méprendre cette ale américaine comme sortie tout droit de Belgique. Rafraîchissante blonde délicatement levurée et élégamment houblonnée, l’épice de la bière lui procurant de charmants tannins en accompagnement à ces notes florales et terreuses. Tout zélateur des blondes de Charlevoix saura s’y plaire.

Cantillon Kriek Une autre qui ne fait pas de quartier, la Kriek de Cantillon se distingue par son acidité décapante, sciant pratiquement la langue en deux. Franche et directe, elle se montre tannique, d’une sécheresse remarquable et généreuses de ses notes de griottes, de bois et d’acide lactique. Pour les sourheads.

Rochefort 10 Encore un grand classique! La bière la plus forte de la gamme Rochefort trône tout en haut de la liste des favorites de plusieurs amateurs. Cette brune belge presque noire se montre étonnamment rôtie, rappelant le cacao en plus de toutes sortes de nuances vanillées, boisées, fruitées. Le haut degré d’alcool s’intègre agréablement à l’ensemble et la texture est incomparablement ronde, soyeuse, sensuelle dont l’effervescence vigoureuse allége les sucres tout en donnant l’impression trompeuse de caresser la langue. Laissez tomber les comparables et commandez-vous un verre !