29 janv. 2012

L’Espace public – Hochelaga-Maisonneuve sur la carte



Nos vies modernes rendent vétustes l’adage « l’habit ne fait pas le moine ». Il serait sans doute plus approprié de moderniser et rendre plus positive cette expression en suggérant plutôt « le pub fait le quartier ».

Nous ne sommes pas les premiers (ni les derniers) à le dire, mais le monde dont rêve tout amateur de bière verrait chaque village enrichi par son brouepub local. Inévitablement, dans les grandes villes, chaque quartier devrait jouir du même privilège. Après Rosemont qui a bénéficié en 2011 de l’avènement de La Succursale, Hochelaga-Maisonneuve se joint à la modernité avec L’Espace Public. La modernité, dites-vous ? Oui, rien de moins ! En cette ère où les piétons n’osent plus se balader sans téléphone intelligent à la main, le pub de quartier représente l’ultime riposte des relations humaines contre les machines. Il existe peu d’endroits où nous entendons autant de vérités… ou de rumeurs… à la minute ! C’est un lieu vivant et évolutif, véritable reflet des habitués qui le fréquentent, ceux-ci habitant majoritairement à proximité. Un quartier comme Hochelaga-Maisonneuve avait besoin d’un tel repaire depuis belle lurette.

Le local choisi par les associés derrière le projet est au cœur même de la promenade Ontario, l’artère viscérale du coin. Moins de cinq minutes de marche suffisent pour atteindre le site à partir de la station de métro Joliette. Une fois rendus, nous sommes à la fois surpris et enthousiasmés par la taille des lieux. Le local, bien que relativement profond, demeure intime en raison de son étroitesse. On nous dit que plus de 90 personnes peuvent entrer dans les lieux, mais les places assises sont pour l’instant limitées à une soixantaine en incluant le bar. La décoration reste simple et conséquente à la mission : celle de promouvoir l’effervescence culturelle du quartier, entre autres en fournissant un vitrine aux artistes locaux. Dès l’ouverture, des œuvres d’actualité d’artistes du quartier étaient exposées, dénonçant entre autres l’abandon du protocole de Kyoto par le Canada. L’éclairage, chaleureux, encourage la conversation. Vraiment, c’est là un endroit simple et agréable comme nous les aimons, le genre d’atmosphère où nous avons envie de traîner durant quelques heures... Encore faut-il que la carte des bières suffise à nous exciter le poil de la barbe au cours de ces quelques heures !



Présentement, l’Espace Public ne possède que 2 bières-maison, mais toutes deux sont fort honnêtes. La plus légère est une Pale Ale d’inspiration britannique aux saveurs de malt franches et plus vives que la Pale Ale moyenne. Il en va de même pour l’effervescence, plus piquante que ce à quoi nous sommes habitués. L’autre est une India Pale Ale fière de ses arômes de Cascade qui ne sont peut-être pas les plus intenses de la Belle Province, mais, ma foi, contrairement à la plupart des IPA québécoises, on n’a pas affaire à une allégorie de malt crystal. Les saveurs caramélisées se trouvant ainsi modérées, cette bière amère devient facile et agréable à boire. Pour l’instant, le brasseur d’HOMA ne brasse pas à HOMA, délais d’obtention du permis obligeant. Le brasseur a choisi de se tourner vers le Bilboquet, à St-Hyacinthe, où il produit des brassins de 1 500 litres. On s’attend à voir le portefeuille de bières évoluer rapidement une fois le permis obtenu. Les installations de brassage au sous-sol seront alors grandement sollicitées.

Le partenariat avec le Bilboquet génère aussi d’autres retombées. On trouve en effet aux pompes de l’Espace Public deux bières de la brasserie maskoutaine alors qu’on croise rarement ces produits en fût ailleurs que sur les lieux de leur confection. Parmi les autres produits d’intérêt, notons tout de même les produits des microbrasseries du Lac-St-Jean et de Charlevoix, toutes deux relativement peu distribuées en fût. Ces deux dernières permettent à l’Espace Public d’offrir une palette plus variée, l’Espace ayant plus d’attraction naturelle pour les recettes d’inspiration britanno-américaine. Du Lac-St-Jean et Charlevoix se spécialisent en effet davantage dans les inspirations belges. Lors de notre visite, la Premium Lager de Charlevoix, autre bête parfois difficile à traquer, représentait même l’inspiration allemande, si bien que la dizaine de fûts proposait un bel éventail. Pour combler les trous, quelques bouteilles sont offertes, entre autres d’offrandes plus digestives, la Corps Mort d’À l’Abri de la Tempête, par exemple.

Dans le concept de l’Espace Public, trois facteurs nous plaisent particulièrement. Premièrement, les quatre associés et amis derrière le projet sont tout jeunes, encore loin de la trentaine. Qui plus est, d’informaticien à ingénieur mécanique, ils comptent sur des formations diverses et complémentaires. En cette ère où on reproche aux Québécois de manquer d’ambitions entrepreneuriales, leur prise de risque est admirable. Deuxièmement, nous apprécions beaucoup cet intérêt à exposer à la clientèle des produits québécois variés, qu’on trouve rarement ailleurs de surcroît. Étant eux-mêmes des bleuets, il était tout naturel pour les partenaires de développer un partenariat avec la micro du Lac-St-Jean. Troisièmement, au cœur même du projet est le désir de participer à la vie de quartier. L’Espace Public, brasseurs de quartier, le nom même du projet le confirme. On ne tente pas d’attirer les touristes avec du tape-à-l’œil, mais bien d’offrir un environnement familier, chaleureux et convivial où tous sont bienvenus, mais surtout, où les résidents du coin ont envie de venir et revenir. Une telle complicité entre une brasserie et sa clientèle devrait être l’essence même des nouveaux projets de broue-pubs qui n’ont pas nécessairement des moyens financiers outranciers, mais qui carburent toutefois à la passion, une passion contagieuse.


P.S.: Notre livre, La Route des Grands Crus de la Bière, a été publié à l'automne 2010. Ça ne fait donc pas encore 18 mois. Depuis, près d'une dizaine de nouvelles brasseries ont vu le jour au Québec! Loin de ralentir, l'apparition de nouveaux brasseurs semble de plus en plus fréquente. Même maniaques comme nous le sommes, nous avons pris un peu de retard, retard qui sera difficile à corriger alors que dans les derniers mois, nous avons entendu parler de pas moins d'une vingtaine de nouvelles brasseries qui ont fait leur apparition ou s'attendent à la faire au cours des prochains mois: Le Baril Roulant (Val-David), La Souche (Québec/Limoilou), Le Castor (Rigaud), Kruhnen (Blainville), Brasseurs Sans Gluten (Montréal), La Chasse-Pinte (Anse St-Jean), Aux Fous Brassants (Rivière-du-Loup), Les Beaux Prés (Ste-Anne-de-Beaupré), La Société (St-Georges-de-Beauce), Frampton Brasse (Frampton), Le Coureur des Bois (Dolbeau), La Gueule de Bois (Arvida), Les Soeurs Grises (Montréal), Brasseurs des Monts (St-Mathieu-de-Beloeil), en plus d'autres projets à Sept-Îles, St-Jean-sur-Richelieu, Chelsea, Montréal, etc. Ouf! Ce qui semblait être une utopie il y a quelques années est en train de se réaliser... et c'est agréablement grisant!

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Vous oubliez un nouveau joueur au Saguenay ''La Gueule de bois '' a eu officiellement son permis de brasseur pour ses installations à Arvida.

Anonyme a dit…

n'importe quoi cette place