6 nov. 2012

La chance du débutant: mon coming-out

Le chais du Trou du Diable tel que vu par David Gingras, photographe
 
Excusez-moi, car j’ai péché. En effet, il semble que mon rôle d’amateur de bières sérieux autoproclamé implique un dévouement exclusif à l’empyrée de la bière. Or, il m’arrive de transgresser ces vœux pourtant sacrés. En effet, bien que les microbrasseurs québécois arrivent fréquemment à me surprendre en abordant des contrées parfaitement inattendues, je me surprends à l’occasion à rechercher de nouvelles flaveurs. Qui plus est, je me surprends parfois à rechercher ces flaveurs originales ailleurs que dans le monde de la bière. Certes, cette dernière est la plus variée, la plus étendue des boissons. N’empêche, il est de ces moments où l’envie d’étendre les frontières pourtant fort flexibles du monde de la bière s’empare des dernières traces de raison qui m’habitent. Je me paie alors une aventure avec le vin, la seule prostituée avec laquelle j’eus osé traiter à ce jour.

 

Et c’est sincèrement sans regret que j’ai entrepris un tel plongeon vers l’infidélité. Pas que ma concubine habituelle fut insatisfaisante. La bière, après tout, m’a accompagné fidèlement dans moult moments joyeux et moins joyeux. Cependant, après quelques années de fidélité indéfectible, et sans les attaches habituelles du contrat de mariage de la société civile dans laquelle on vit, je me dis qu’il serait sans doute approprié d’explorer davantage le vaste étendue des flaveurs disponibles à l’amateur de breuvages alcoolisés. Pourquoi se limiter au jus de malt quand il existe aussi du jus de raisin. Certes, au Québec, le raisin fermenté s’avère généralement plus dispendieux que son homologue céréalier. Néanmoins, le fruit propose quelques saveurs que la céréale peine à rendre aussi judicieusement, qu’il s’agisse de tannins ou d’acidité. Comment l’amateur de bière montréalais que je suis peut-il accéder à un univers de pH dérisoire digne de celui du vin sans acheter un aller-simple pour Bruxelles et son Pajottenland connexe. Peut-être serait-il plus simple d’opter pour une bonne canisse de petits fruits du vieux continent en vente libre à la SAQ afin d’assouvir nos fantasmes de liquides non basiques.

 

Bref, j’accepte l’étiquette de traître et continuerai vraisemblablement de la porter au gré de mes goûts évolutifs. Le vin joint encore mon âme et plus qu’occasionnellement. En particulier, j’apprécie sa capacité à m’insuffler le souffle d’humilité propre au débutant. Vous vous rappelez vos premières incursions dans l’univers de la bière? Vous vous souvenez comme la moindre référence à un style dont vous ignoriez précédemment l’existence suffisait à vous extirper une chair de poule en bonne et due forme? Ces temps sont-ils révolus? Vos connaissances seraient maintenant trop raffinées pour vous permettre d’accéder à la béatitude toute naturelle du « débutant »? Quel meilleur raccourci que de trahir, l’ombre d’un instant, la bière pour lui préférer son rival favori : le vin.  C’est une question à laquelle je n’ai pas tenté de répondre, ayant préféré cédé sous la pression du choix et surtout, sous la densité du jus de raisin non fermenté. Allez, appellation qui m'est inconnue, fais-moi explorer un territoire qui m'était jusqu'ici inconnu. Fais-moi ressentir la douce allégresse que seul l'innocent peut ressentir... Vivement la relation amoureuse à ses balbutiements, vivement la découverte de l'inconnu.
 
Will you drink to that?

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