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27 nov. 2011

La Brasserie Albion célèbre en créant une bière à remonter dans le temps


Bien que l'exquise Bitter de cette brasserie artisanale de Joliette, en fût et en cask, méritait par moments de voler la vedette lors de cette soirée anniversaire, et que La Berthelaise, une magnifique ale subtilement fumée conçue à partir d'eau d'érable, possédait le panache et le terroir nécessaires à inspirer les pères du projet Annedd'ale, c'est une autre bière qui courait sur toutes les lèvres samedi dernier.  Une recréation historique d'une India Pale Ale de 1839, servie en trois versions différentes s'il-vous-plaît. L'objectif:  tenter de comprendre ce que les anglais stationnés en Inde au 19e siècle pouvaient bien goûter lorsque les barils d'IPA arrivaient à bon port après de longs mois en mer.


Le résultat? Des trois versions, c'est peut-être le fût témoin, n'ayant pas vécu les hauts et les bas de la pièce chaude dans lesquels ses consoeurs ont été trimbalées, qui révélait les saveurs les plus raffinées. La fraîcheur du houblon Golding était déconcertante, évoquant autant d'agrumes que de feuilles et d'herbes, le tout équilibré par des céréales miellées et une pointe d'alcool. Une belle bière à humer et à siroter. 

La version visant à être la plus fidèle historiquement parlant (celle ayant subi les soubresauts de température et de mouvement dans un baril de chêne) était sans aucun doute celle au profil le plus intense. Au nez, un parfum de bois vert dominait les houblons citronnés pourtant expressifs en bouche. L'alcool réchauffait le palais sans gêne, accompagnant les houblons longs et amers. L'oxydation présente était somme toute camouflée par l'intensité des protagonistes principaux, alors que des angles sauvages perçaient le tout. Ceux cherchant les émotions fortes étaient servis.


En bouche et au visu, aucune ne pouvait rivaliser cependant avec la version en cask, soutirée d'une pompe manuelle, comme le veut la tradition anglaise. La mousse crémeuse dressait une dentelle indélogeable sur les parois de la tulipe et la robe dorée brillait de clarté comme si elle avait été filtrée (elle ne l'était évidemment pas). De toute évidence, nous étions en présence d'un cask entretenu de main de maître, ce qui est rare en Amérique (pas seulement au Québec). Les flaveurs d'agrumes évoluaient dans un corps des plus moelleux construit par la gazéification naturelle habilement agencée aux quelques sucres résiduels. Ce verre était facile à boire malgré ses 8% d'alcool...

Les quantités produites étant minuscules, il nous faudra patienter plusieurs mois afin de pouvoir replonger à la genèse de ce style si populaire aujourd'hui. Question d'alléger notre deuil passager, Steven Bussières, maître-brasseur du Albion, nous a annoncé qu'il avait déjà entamé le brassin du prochain anniversaire. Demandant non moins de six heures d'ébullition et près d'un an de mûrissement afin d'atteindre l'équilibre voulu, la Albion No.1 verra le jour en novembre 2012. Basée sur la Bass No.1, le tout premier Barley Wine à être produit à grande échelle au Royaume-Uni, cette ale forte saura sans doute nous faire vivre de beaux moments gustatifs, tout en nous armant, encore une fois, de connaissances enrichissantes.

18 oct. 2011

Une India Pale Ale historique à la brasserie Albion, de Joliette

Photo gracieuseté de la brasserie Albion

Décidément, le Québec foisonne de brasseurs inspirés. Vous voulez un autre exemple? D'ici quelques semaines, à Joliette, une E.I.P.A. 1839 fera son apparition à la brasserie Albion.  C'est suite à la lecture du bouquin de Pete Brown "Hops and Glory", que Steven Bussières, maître-brasseur du Albion, a décidé de recréer une India Pale Ale de 1839, une bière telle que les anglais envoyaient à leurs compatriotes stationnés en Inde. Aucune autre brasserie sur la planète a, à ce jour, soumis une bière à de telles conditions dans le but de comprendre ce que les buveurs de l'époque pouvait déguster. 

Rigoureux à toutes les étapes de son aventure, Steven a su aller au-delà de la recette originale du 19e siècle (que vous pouvez admirer ci-dessous) afin que l'expérience soit des plus pédagogiques. Puisque ces bières étaient mises sur des bateaux pendant près de 4 mois avant d'arriver à bon port et d'être bues goulûment, il a dû aussi, par souci scientifique, recréer les conditions dans lesquelles ces barils séjournaient. Donc, la température de conditionnement, comme celle sur les bateaux en direction de l'Inde, a oscillé entre 30 et 45 degrés Celsius pendant 4 mois. De plus, un système a été confectionné dans le but d'imiter les mouvements constants d'un bateau en mer; parfois doux et parfois violents.

La recette originale de cette India Pale Ale de 1839


Les barils utilisés pour la bière étaient en chêne; des barils desquels le plus de tannins possibles avaient été enlevés au préalable. Après ce périple mythique, la E.I.P.A. 1839 a reposé une semaine au frais, pour ensuite être embouteillée et refermentée en bouteille. 

Deux autres versions de la même bière ont aussi été conçues en même temps, rehaussant l'aspect pédagogique. Une des deux a subi les mêmes conditions extrêmes, mais à partir d'un cask en métal. Celle-ci sera servie au bar directement du baril, par une pompe manuelle. La troisième et dernière version de cette bière n'aura pas vécu les mêmes soubresauts de conditionnement. Celle-ci sera servie en fût standard et servira donc de bière "témoin". 

Le résultat? Les chanceux qui pourront se déplacer à Joliette pour le dévoilement de cette expérience le 26 novembre sauront en témoigner. Pour l'instant, Steven nous a confié que la version embouteillée, après le traitement houleux, avait fermenté davantage dans le baril de chêne. Nous goûterons donc à une version plus sèche et peut-être même sauvage de cette IPA. Il ne faut pas s'attendre à un arôme houblonné explosif, même si une quantité astronomique de houblons en cônes a été utilisée. Vos humbles serviteurs ont d'ailleurs bien hâte de percevoir le niveau d'oxydation présent dans la version d'origine et surtout de faire la dégustation comparative. Un gros merci à Steven et son équipe de contribuer ainsi à l'éducation de l'amateur de bières québécois!






16 juin 2011

La saison des bières de soif

Lorsque les températures extérieures font perler la sueur sur nos fronts autant que l'eau sur un verre bien froid, cela ne signifie qu'une chose pour nous: c'est la saison des bières de soif! Loin de nous l'idée de dénigrer toute bière plus corpulente mais, à ce moment-ci de l'année, les sucres résiduels bien ronds nous paraissent plus lourds qu'à l'habitude. La chaleur d'alcool nous parait plus abrasive que lorsque nos soirées sont fraîches. On ne peut rien n'y faire. L'appel des bières de soif résonne dans nos gosiers.

Mais qu'est-ce qu'une "bière de soif"? Tout simplement, une bière, peu importe son origine ou son style, qui se veut désaltérante par sa quasi-sècheresse en bouche et son taux d'alcool peu élevé. Les anglais les appellent "session beer" et leur apposent une limite d'alcool avoisinant les 4,5%. Les tchèques et les allemands en parlent moins; mais ils en boivent autant. Rares sont celles dans ces contrées qui dépassent 5,5% d'alcool en temps estival puisque le but de ces bières est de se rafraichir autant que de plaire aux papilles. Et nous en Amérique, que pense-t-on de ces bières que certains pensent "légères"?

Le houblon Saaz et L'Amère à Boire: une histoire d'amour
Photo d'Olivier Germain

Il y a à peine 3 ans, à L'Amère à Boire de Montréal, bastion de plusieurs styles de lagers, une bière sous la barre du 4% d'alcool était vu comme un défi à relever. Est-ce que la clientèle des brouepubs montréalais allait être assez ouverte d'esprit pour adopter ce projet ambitieux? Après tout, plusieurs amateurs de bières associent, faussement, une bière légère en alcool à une bière sans goût. Satanés grandes brasseries et leur eau des rocheuses alcoolisée... Après quelques mois de persévérance, L'Amère à Boire peut maintenant se vanter d'être une des premières brasseries artisanales du Québec à offrir à ces pompes une bière ultra-légère à tout moment. Elle se nomme, ironiquement, Éléphant. Quelle idée rafraichissante!

Souvent, le dégustateur croit que le degré d'accomplissement d'une bière est directement relié à son impact gustatif (voir Le piège de l'intensité, page 51 de notre livre pour une pensée plus élaborée sur le sujet). Pourtant ces bières dites légères, lorsque conçues avec soin, proposent autant de saveurs que leurs comparses plus costaudes. Il suffit d'être patient; c'est en prenant plusieurs gorgées qu'une bière de soif se dévoilera sur vos papilles. Un superbe exemple de ceci se nomme Basse Messe. Cette Kölsch du Dieu du Ciel! étale surtout des saveurs de malts pilsener lors des premières gorgées. Puis, le houblon poivré et herbacé point à l'horizon gustatif. Il s'empile tranquillement sur les papilles à chaque gorgée subséquente pour devenir une partie imposante du profil de saveurs. Peu de temps après, votre pinte est vide. Frustrant... Et difficile de ne pas en commander une autre. Qui sait ce qu'elle vous révèlera par la suite?

Luc Lafontaine et Jean-François Gravel de Dieu du Ciel!

Au Siboire, de Sherbrooke, une autre bière menue devrait apparaître à l'ardoise sous peu (si ce n'est déjà fait au moment où vous lisez ces lignes). La MinIPA présentera des saveurs de houblons du nouveau monde, bien citronnées et résineuses, dans un corps plus longiligne qu'une India Pale Ale. Cette blondinette titrera seulement 4%... Mais son impact gustatif en fera sûrement jaser plus d'un.

D'autres brouepubs commencent à concocter des bières de soif de façon régulière. L'Albion à Joliette et sa magnifique Bitter représente un des exemples les plus inspirants. La Succursale, tout nouveau brouepub de l'est de Montréal, joue dans des platebandes similaires avec sa Petite Côte et sa Radschläger. Le Benelux nous a brassé dans les derniers mois une belle Cigogne, une Pilsener, et une Mild Mild Ouest, maltée comme une Mild anglaise mais houblonnée avec des houblons du nouveau monde. Toutes titrent moins de 5% d'alcool et sont si satisfaisantes qu'une deuxième pinte est quasi-inévitable. Que c'est beau l'été.

Une pinte de la Bitter du Albion ne vous fera jamais perdre l'équilibre

Et vous, est-ce que votre brouepub ou microbrasserie préférée vous propose une bière de soif de grand calibre?


22 mars 2011

La Bitter, d'Albion, à Joliette


Malgré son jeune âge, le broue-pub Albion, récemment ouvert à Joliette, fait preuve d’une étonnante maturité. Oublions les bières d’impact qui torpillent les papilles. À l’image des grands chefs, le brasseur Steven Bussières démontre avant tout un respect pour son produit. Respect pour la bière, respect pour son histoire. Il n’est donc pas surprenant que, tout comme à l’Amère à Boire où Steven a fait ses classes, nous retrouvions chez Albion certaines des bières les plus authentiques du Québec.

Style : Bitter, soit un style étonnamment rare au Québec où nous trouvons plusieurs ESB (Extra Special Bitter), mais peu de Bitters, plus légères, plus digestes et nettement plus répandues en Angleterre. Celle du Albion titre 3,9% à 4,0% d’alcool par volume, ce qui paraît peu ici, mais reste dans les normes britanniques où les bières sont rarement conçues pour être sirotées.

Disponibilité : Uniquement en fût sur place, mais presque toujours fidèle au poste. Une particularité chez Albion est le très faible volume de chaque brassin, tout juste 100 litres, une quantité digne d’un brasseur-maison. Il est donc difficile d’être assuré qu’il y aura toujours de la Bitter. Par contre, il est assuré que lorsque présente, elle sera éclatante de fraîcheur.

Le coup d’œil : Une voile minime laisse planer le mystère sous la toison beige qui recouvre un liquide ambré.

Le parfum : La fraîcheur renversante des ingrédients déstabilise. Sommes-nous vraiment à Joliette? Pas à York? Pas à Sheffield? Au pain toasté s’amalgame une discrète levure fruitée et le grain frais.

En bouche : Bien qu’elle ait été goûtée au fût, l’efficacité de la refermentation naturelle nous confond. On croirait volontiers qu’elle vient d’un cask. Remarquablement pleine pour une ale à 4%, mousseuse, presque crémeuse sans angles durs, elle se laisse boire à gorge déployée.

La finale : Les houblons feuillus aux pointes de gazon et de menthe s’étalent langoureusement quoique sans exagération. Quelques secondes après la déglutition, sa présence en bouche nous manque déjà.

Accords : Au moment d’écrire ces lignes, Albion a comme projet d’offrir un menu boustifaille digne du contenu de ses pompes. Pour l’instant, peu d’options existent. De toute façon, un bon sujet de conversation suffit, car vous voudrez rester chez Albion et consommer de la Bitter plusieurs heures durant.

Pourquoi est-ce un grand cru? : Il existe quelque bonnes bières de soif au Québec. Cependant, en terme de pure aisance à la boire, en terme de session brew, la Bitter d’Albion vient de les déclasser toutes. Jamais avions-nous même pensé boire une pinte de bière québécoise en six gorgées. Pourtant, ça semble être le rythme naturel avec cette Bitter.

Si vous avez aimé, essayez aussi : Voyageur des Brumes du Dieu du Ciel! (Québec), Simple Malt Golding Pale Ale des Brasseurs Illimités (Québec), Bishop’s Best Bitter du Lion d’Or (Québec), Ostalgia Rousse d’Hopfenstark (Québec)


20 déc. 2010

Une nouvelle brasserie artisanale de Joliette impressionne: longue vie à Albion!


Il y a quelques semaines, une toute nouvelle brasserie artisanale a vu le jour dans une magnifique maison du centre de Joliette. Le 408, boulevard Manseau, est maintenant un lieu de prédilection afin de découvrir des ales de type britannique dans leur plus pure tradition; les spécialités de la brasserie Albion. Ingrédients, techniques de brassage, styles de bière, presque tout est puisé du savoir-faire anglais, qu'il soit moderne ou d'il y a quelques siècles. C'est que le maître-brasseur et propriétaire, Steven Bussières, se passionne d'histoire autant que d'ale. Tous les vendredis par exemple, une des bières-maison est servie conditionnée dans un baril de bois duquel la bière coule par la simple force de la gravité. Aucune bonbonne de gaz carbonique ne pousse et gazéifie la bière, exactement tel qu'il était coutume à l'époque.


Vendredi dernier, un Porter du nom de l'Ancêtre séjournait dans ce cask traditionnel. Les notes vanillées du bois jeune se mariaient à merveille aux saveurs légèrement sucrées de malt rôti du Porter. L'amertume de ces malts torréfiés, des houblons feuillus et l'apparition d'une sècheresse boisée concluaient chaque gorgée.

En plus de nous faire voyager dans le temps, ce Porter nous donne le goût d'explorer la maison d'Albion...

La bière qui m'a vraiment conquis est cependant la Bitter de la maison. Aussi bien confectionnée que le reste du menu, elle se démarquait tout de même par son union de richesse et de simplicité. Riche, elle l'était parce que ses ingrédients authentiques (tous directement d'Angleterre) s'exprimaient avec franchise et profondeur. Simple, elle l'était aussi parce que la liste de ses ingrédients est relativement courte et ses saveurs vont droit au but. Il est très rare que la bière blonde de la maison est conçue avec tant de soin; souvent, on la crée en voulant plaire à monsieur et madame tout le monde, la présentant avec peu d'arômes et de saveurs. Chez Albion, même si cette blondinette ne titre que 3,9% d'alcool, on ne se vautre pas dans l'insipidité, au contraire. Le malt Marris Otter impressionne de ses notes de céréales amples et subtilement miellées, une base parfaite de laquelle lévite tranquillement une amertume de houblon feuillue et soutenue. Du grand art pour une bière que d'autres considéreraient "légère" étant donné son taux d'alcool moins élevé que la moyenne. Comme si ce n'était pas assez, cette Bitter est conditionnée en fût; elle n'est donc pas gazéifiée aussi intensément que si elle était poussée au gaz carbonique. Son côté avenant en est rehaussé.


Le pub du Albion est un petit dédale de pièces boisées; difficile de ne pas y trouver un petit coin à son goût. Le menu de bières reflète cette même volonté de plaire à plusieurs. Les 5 bières-maison du moment, à elles seules, proposaient une panoplie de saveurs différentes. La Blanche de Joliette, une blanche d'inspiration allemande, rafraîchit de ses angles citronnés. La Chiniquy Mild Ale, une rouquine, vise l'amateur de saveurs caramélisées parcimonieuses, tout en s'assurant d'être agréable à boire à grande lampées; elle aussi est sous le cap des 4% d'alcool, comme le veut le style (Mild Ale). Finalement, le Stout Écossais est serti de belles notes d'avoine dans un corps rondelet, douillet. La gazéification faite d'un mélange d'azote et de gaz carbonique est bien agencée aux malts et leurs sucres résiduels, laissant amplement d'espace en bouche pour que ces céréales s'y établissent longuement.

Le menu de bières régulières étant établi, Steven nous promet de travailler sous peu sur des projets spéciaux. Certains seront de longue haleine, comme une recréation authentique de l'Imperial Stout original de Barclay Perkins (recette de 1859). Le brassin test est aujourd'hui vieux de 18 mois; il est délectable, mais il vient tout récemment d'atteindre un certain équilibre, selon son brasseur. Ce carnet de recettes historiques à lui seul risque d'ébranler le monde brassicole artisanal québécois. Sachant que toutes les bières coulant des pompes d'Albion sont déjà impeccables, nous devons admettre être infiniment curieux des périples dans le temps que cette nouvelle brasserie artisanale de Joliette nous fera vivre. Mais toute bonne chose en son temps. De toute façon, avec une si bonne Bitter, nous serons armés pour patienter longuement.