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23 févr. 2012

De la Westvleteren en importation privée


Eh oui, vous n'avez pas la berlue! Grâce aux efforts répétés de l'Office des Grands Crus (agent d'importation responsable d'une grande partie des bières belges disponibles par l'entremise d'Importations Privées Bièropholie - IPB), quelques caisses de la mythique Westvleteren 12 seront vendues au compte-goutte au fil des prochaines semaines. Cependant, il faudra être chanceux pour s'en procurer dû aux quantités très limitées. Voici ce que IPB, organisme sans but lucratif, a décidé de faire afin d'égaliser les chances de tous ceux intéressés:


Mais pourquoi autant d'engouement? Cette suave brune belge, brassée à l'Abbaye trappiste St-Sixtus de Westvleteren, est depuis quelques années la récipiendaire de quantités d'accolades, dont le controversé titre de 'meilleure bière au monde' octroyé par le site Ratebeer.com. Le phénomène de rareté est certes en partie responsable de la popularité de cette bière complexe aux notes de raisins secs, de pain aux noix et de caramel. Après tout, il faut faire preuve de patience et de débrouillardise afin de se pourvoir d'une caisse de l'élixir en question et ce, même en Belgique. Toutefois, les moines ont décidé récemment de faire une levée de fonds afin de rénover leurs locaux. Bien conscients de la popularité de leur produit phare, ils ont augmenté la production annuelle de cette Westvleteren 12 et l'ont même mise aux enchères pour ceux voulant payer le gros prix. Le coût exorbitant des caisses s'ayant rendues jusqu'à nous au Québec s'explique par cette longue chaîne de "partenaires"...

Les moines n'auraient certes pas reçu autant d'aide financier par l'entremise de leurs choux...

Vaut-elle vraiment le prix cette bière affectueusement surnommée Westy? À vous de juger. Trouvez-vous une Rochefort 10 à la SAQ et, si vous êtes chanceux, faites la comparaison. Les deux bières valent définitivement leur pesant d'or dans la catégorie des brunes fortes belges, il n'y a pas de doute. À conditions égales, les deux ont le potentiel de vous faire visiter le nirvana gustatif. Mais est-ce qu'une des deux vaut plus que sa cousine? Une seule chose est certaine pour l'instant: à défaut de pouvoir s'envoler pour les champs du sud-ouest de la Belgique, nous pourrons tout de même profiter de cette rare opportunité de se procurer la Westvleteren 12 en sol québécois. Difficile de rester de glace devant une bière qui soulève des passions...

9 sept. 2010

Décrire la bière | Orval (partie 3)

Conteur : C’était un bel après-midi d’automne, mon fidèle Rex me lança un de ses regards obliques dont il possède le secret et je compris. L’heure était arrivée. L’Orval m’attendait. Dès lors, je fus ébahi par sa bouteille à l’allure d’une quille miniaturisée facilitant le versage. Je la transvasai ainsi en ma fidèle coupe, laquelle reçut un liquide aux couleurs de couchers de soleil au-dessus duquel prend son pied une dentelle à l’étalement empli de relief. Ses effluves décapèrent par leur originalité toute naturelle, rappelant le cidre de pomme, les fruits tropicaux ainsi que la ferme. La première gorgée me stupéfia, emplissant mon être d’une attention particulière aux doux parfums herbals et secs, culminant dans une pointe d’acidité arborant une palette fruitée hors du commun, allant de l’abricot à la banane, de la poire au pamplemousse. Je la consommai avec ardeur, dans un temps si infime qu’il m’exaspère toujours quand je me remémore l’état de grâce qui m’habitait. Je regagnai donc ma routine avec nostalgie, mon fidèle Rex à mes côtés, me lançant des dagues des yeux, toujours aux aguets des réactions secondaires potentielles de mon initiation.

Romantique : Telle une conquête nouvellement acquise, l’Orval se love dans son monacal, mais élégant calice gracieusement, voulant s’assurer de sa mainmise sur notre cœur. Son enivrant parfum d’eau de rose contraste avec ses suintements secs et pointus rappelant le dur labeur de ses créateurs. Cette émérite séductrice offre une leçon d’humilité à quiconque s’en enflamme en fournissant moult tergiversations qui compliquent la tâche de son amadouement. Elle demeure mystérieuse même après des années de vie commune, réservant ça et là les surprises les plus inattendues, que ce soit par ses pointes poivrées ou encore ses monologues terreux.

Une infinité d’options s’offrent à nous, amateurs que nous sommes, passant parfois par les sentiers battus et efficaces de la description directe, mais tout aussi souvent par le renforcement de notre message inhérent à un texte éclaté qui corrobore la difficulté de la bière concernée. Que nous choisissions des phrases complètes ou une énumération toute bonhomme de mots pertinents, ultimement, ce qui importe demeure de ne pas se priver de ce bonheur facile d’accès qu’est le développement d’un style littéraire de dégustation favorisant tout à la fois l’érudition, la mémoire des produits dégustés et l’appréciation de ces derniers.


29 août 2010

Décrire la bière | Orval (partie 2)


Nostalgique : Superbe apparat ambré surmonté d’une montagneuse coiffe blanche comme la lune ! Elle me rappelle ces voyages en France où je gambadais dans les champs de lilas. Ah ! l’air pur des quelques endroits résistant à l’urbanisation. Émouvantes saveurs parfumées, sèches. Ode au houblon et au savoir-faire trappiste ! Elle est si charmante ! Chaque Orval que j’ai bue possédait son identité distinctive !

Poétique : D’augustes présages houblonnés. Des bactéries bien incorporées. Tel un gant tout lui sied. Des miasmes dignes des prairies les plus replètes se trémoussent dans l’opulence des houblons procréant cent savanes de sécheresse sans chanceler. L’idéalisme des levures extraordinaires, qui tombent sur les hécatombes des sucres résiduels, poursuivant leur besogne, poursuivant leur anti-conformisme exacerbé. L’Orval, or liquide s’il en fût, plaisir oral s’il en est, compagne proverbiale s’il en sera.

Narcissique : J’envisageai l’idée de la partager, mais la réflexion ne dura guère. Après tout, c’était de l’Orval dont on parlait. Elle est pour moi, toute.

Technique : La bonne tenue de mousse témoigne de la qualité des ingrédients et du procédé de brassage. Saturation étonnamment élevée. Malts de couleur pâle en abondance, avec une quantité non négligeable de malt caramels. Possiblement ajout de sucre candi pour éviter la lourdeur. Présence considérable de brettanomyces bruxellensis. Levure WLP510. Styrian Goldings et Hallertau en amertume, Styrian Goldings pour les arômes et à froid. Acétaldéhyde notable. Atténuation extrêmement haute, donc très peu de sucres résiduels et effervescence très vive. Sans défaut, les bactéries volontaires la rendant très complexe.



Culinaire : L’Orval est une bière typée, sèche et impressionnante. Elle saura ainsi rehausser maints plats à table autant par ses capacités de contraste que par son profil épicé ne demandant qu’à accompagner des mets asiatiques ou mexicains relevés. En parallèle, la noblesse des ses houblons lui confère une versatilité gastronomique effarante, complétant des grillades de volailles par la pâleur de ses malts et ses fruits rehaussant le gingembre de votre sauce. Son amertume franche tout comme sa carbonatation vive contribueront au nettoyage fréquent du palais, remettant le curseur des saveurs à zéro.

19 août 2010

Décrire la bière | Orval (partie 1)

Lorsque vient le temps de décrire une bière, son effet sur le dégustateur que nous sommes, plusieurs se montrent inconfortables et hésitants. En effet, un labyrinthe de possibilités s’offre à nous, chacune jouissant de ses moments propices. En général, nous assisterons chez les protagonistes à l’usage d’un style littéraire qui leur convient, le mathématicien penchant pour un style précis et concis, le poète se baladant d’envolées lyriques à gradations emphatiques.

Je me propose ici d’explorer quelques-uns des modes discursifs s’offrant à l’amateur francophone par l’entremise de l’outil de prédilection et sujet de recherche qu’est l’Orval, vraisemblablement connue de la plusieur de nos lecteurs, les autres écopant d’un devoir de recherche à son sujet d’ici la prochaine parution. (indice : elle est disponible à la SAQ)


Analytique : Couleur orangée, voilée. Mousse très dense qui laisse des traces sur les parois et reste en place longtemps. Arômes légèrement maltés (noisette), très houblonnés (fleurs, agrumes) très levurés (épices – sauge, moisissure, ananas, boîte à pain). Goût peu sucré, légèrement salé. Finale très amère, très sèche. Effervescence très forte, rondeur moyenne.

Prosaïque : S’affublant d’une légendaire dentelle ivoire, ce nectar arbore une robe sable affichant un immanquable désir de liberté par une activité gazeuse soutenue. Délicatesse et fermeté s’allient dans un tango de complexités. D’étonnantes ramifications florales et fruitées trahissent un houblonnage à cru chirurgical dans sa précision, alors que les sauvagesses, brettanomyces, attaquent l’imaginaire d’intonations de fromage bleu moisi, de foin frâichement taillé, de pain déconfi. Étalement de flaveurs d’une unité nous laissant en pâmoison, d’une délirante difficulté. Son décryptage reste une tâche interminable qu’il fait bon entreprendre en ces matins où le cran nous tient en tutelle.