Le monde de la bière artisanale se porte probablement bien puisque St-Hyacinthe compte maintenant sur une deuxième microbrasserie sur son territoire. Ceci lui confère un nombre de brasseries par habitant nettement supérieur au bourg voisin qu’est Montréal, dans la mesure où nous ne considérons pas qu’un Maskoutain est nécessairement plus habitant qu’un Montréalais.
Peu de temps après son ouverture, nous avons visité le salon de dégustation Le Picoleur sur les lieux de la brasserie. Nous avons immédiatement été frappés par l’ampleur des locaux, établis dans un parc industriel qui fournira une portion importante du bassin de clientèle visé par les tenanciers d’un Picoleur relativement éloigné des principaux axes commerciaux de St-Hyacinthe. La brasserie est munie d’équipement neuf et d’un espace suffisant à faire rougir les plus beaux success stories microbrassicoles québécois. La capacité d’expansion n’est rien de moins qu’impressionnante pour un nouveau projet et manifestement, l’ambition est au rendez-vous pour la jeune équipe qui comporte plusieurs membres bien connus du milieu.
Au Picoleur, la sélection est pour l’heure limitée à une India Pale Ale qui a été servie au Mondial et la Bière et à la « Gamme Sympathique », trois bières, Blanche, Blonde et Rousse, bien exécutées, mais plutôt populistes afin d’aborder le marché sans froisser les gens. La Blanche, bien fraîche malgré ses épices peu subtiles, nous a paru la plus aboutie du lot. L’India Pale Ale ne fait pas dans le nuancé, sa base maltée étant corpulente à la manière de la plupart des exemples québécois et son amertume poignante dominant les composantes aromatiques de ses houblons. La Blonde et la Rousse s’avèrent des bières de soif honnêtes. Cependant, outre le penchant plus sec et rôti de la Rousse, elles ne se distinguent pas de façon marquée de leurs concurrentes, les principales étant les gammes de base d’AMB (moins propres et plus fruitées) et des Trois Mousquetaires (plus captivantes lorsque bien fraîches). Franchement, pour la blonde, c’est un peu dommage. Nous avions là un brasseur qui proposait une Blonde s'apparentant aux bières de fermentation basse, un concept qui avait tout pour plaire aux auteurs de ce blogue, mais bien que sans défaut, cette Blonde demeure peu expressive de ses malts et bien subtile de ses houblons tout en ne présentant pas la texture très sèche et croustillante des meilleurs exemples. Il semble que les excellentes blondes de base soit l’affaire des broue-pubs (Petite Munich, Élixir Céleste, Montréal Hell, Germaine…) ou des artistes peu soucieux des coûts (Ostalgia Blonde). Bref, pour l’heure, les Brasseurs du Monde ne s’adressent peut-être pas encore aux amateurs cherchant à sortir des sentiers battus. Cette situation risque toutefois de changer. Dès la fin de l’été, une deuxième gamme de produits devrait être commercialisée, Stout et IPA inclus. Par la suite, des produits saisonniers, au gré de l’imagination créative du brasseur et de son assistant, apparaîtront fréquemment sur les tablettes, visant davantage à séduire les aventuriers de l’orge et du houblon.
Pour en revenir au salon, la microbrasserie ne semble pas avoir l’ambition de fournir des produits différents au Picoleur par rapport à sa gamme embouteillée. De plus, la nature des locaux, quoique agréablement décorés et meublés pour une brasserie ne visant pas à s’établir comme broue-pub, se prête davantage à des événements corporatifs qu’à une clientèle touristique ou gastronome. N’empêche, l’établissement fournit une opportunité facile d’accès de découvrir leur gamme entière, opportunité facilité par sa proximité de l’autoroute 20. Simplement, il est peut-être préférable d’attendre que la gamme se trouve élargie davantage avant d’aller la découvrir. Il faudra aussi voir si Le Picoleur parvient à fidéliser une clientèle plus régulière à mesure qu’ils auront été en mesure de se faire connaître par les Maskoutains, ce qui pourrait alors justifier l’instauration d’un menu de boustifaille plus élaboré justifiant une visite plus prolongée. Par contre, pour avoir un aperçu des projets de cette nouvelle brasserie et de ses ambitions, rien ne vaudra une visite au Picoleur alors que sa clientèle n’est pas encore bien établie. Le personnel se montre on ne peut plus sympathique et généreux de leur bonne compagnie.
2 commentaires:
L'India Pale Ale que vous avez bue, était-ce une ancêtre de l'Interdite? Car j'ai découvert l'Interdite (de même que la stout L'Exploité et la belge L'Assoiffé) l'été dernier et franchement, à part le Dieu du Ciel, ces bières devancent aisément la majorité de celles que j'ai pu boire ces dernières années.
Dans le cas de l'Interdite, il s'agit à mon avis de l'une des meilleures IPA avec des houblons qui se développent au travers d'une amertume plus qu'agréable. Pour l'instant, outre la Houblonnière (aussi des Brasseurs du Monde), je n'ai que la Double IPA de la Long Trail Brewery (Vermont) qui la devance à mon palmarès personnel.
Leur Big Ben Porter qui vient de gagner un prix était excellente lorsque je l'ai bue cet été et je viens de déboucher leur Robuste Porter (format 750 ml) qui était délicieuse, elle aussi.
Vraiment, cette microbrasserie est une des meilleures au Québec, ça s'approche du Dieu du Ciel....
Oui, l'article faisait allusion aux premiers balbutiements de l'Interdite.
Si tu aimes les IPAs, nous te suggérons fortement d'explorer les multiples IPAs de Hill Farmstead et de Lawson's Finest, toutes deux au Vermont. Difficile de faire mieux dans cette catégorie dans le nord-est de l'Amérique côté houblon aromatique. Cependant, si tu aimes avoir une base maltée caramélisée pour soutenir tout ce houblon, ces IPAs ne seront peut-être pas tes préférées.
Enregistrer un commentaire