27 févr. 2013

Les bières de Hornbeer disponibles en importation privée


Quelle belle surprise que les bières de Hornbeer. Lors de notre première découverte de celles-ci, il y a maintenant plus d’un an et encore une fois, grâce à IMPORTATIONS PRIVÉES BIÈROPHOLIE, nous avons été franchement impressionnés par la qualité générale des bières de ce brasseur danois relativement jeune. Faisant état de la profondeur et des grandes capacités de la nouvelle vague de microbrasseries danoises, Hornbeer nous a séduit par ses bières foncées dont les textures riches et onctueuses n’étaient pas sans rappeler celles de De Molen, par exemple. Et c’est sans compter leurs bières fortement houblonnées qui avaient conservé une fraîcheur remarquable malgré la fragilité habituelle de ces bières. Comble du bonheur, elles sont offertes à des prix, ma foi, plus que raisonnables pour des bières importées de Scandinavie où il est devenu normal de croiser des 500 ml à 10$. Qu’on les obtienne à un prix inférieur à ce seuil après qu’elles aient passé les méandres de la SAQ est presque spectaculaire.



Les citriques et bien amères
Dryhop

Bien que d’un modeste 5%, cette Pale Ale explose d’agrumes frais et de fruits tropicaux bien juteux. Pas trop amère, mais fiable du point de vue aromatique.


Happy Hoppy Viking

Fort costaude du haut de ses 9% et 130 IBU, cette double IPA boisée et puissamment fruitée maintient son équilibre grâce à des malts de type crystal rondelets et huileux en eux-mêmes, alors imaginez lorsque combinés avec les huiles en provenance des houblons... Intensité et modestie.


Imperial IPA

Ironiquement, l’Imperial IPA est probablement plus équilibrée que la Happy Hoppy Viking. Plutôt ronde, huileuse, elle paraît presque crémeuse, fluide comme un caramel de sel où l’on aurait remplacé le sel par un houblon exotique et citrique.


Hophorn

La Black IPA de la maison est, vous l’aurez deviné, une belle réussite pour les amateurs du genre. Des malts chocolatés habilement extraits, traînant plutôt vers le cacao que vers le sucre parviennent à absorber les élans citriques sans que l’acidité ne forme une carapace astringente. Le secret résiderait-il dans la richesse fruitée, et quasi-vineuse, qui nous enlève le mot astringent de la bouche pour le remplacer par « tannin fin »?



Les fruitées et vineuses


Oak Aged Cranberry Bastard

Drôle de créature que cette bière à la canneberge forte et boisée. La présence phénolique un brin fumé des levures assure un support épicé qui assèche la bière d’un commun effort avec les tannins du baril. La canneberge se contente de livrer de subtiles notes de fruits rouges serties d’une gamine acidité.


Funky Monk

Sans être une bière aux fruits à proprement parler, ce moine sauvage joue à la fois dans des plate-bandes caramélisées, fruitées, vineuses et acidulées. Une créature un peu difficile d’approche, sucrée et originale à souhait.


Les richement caramélisées et liquoreuses


Barleywine

Festival de mélanoïdines que ce Barley Wine riche en pains et en noix de tous acabits de même qu’en fruits : une mélodie sur laquelle s’entrelacent levure et houblons. Enfin un dessert mi-amer, mi-sucré.


Helge

Un festival de malt et d’esters défile sur vos papilles. Caramel, baies des champs, notes terreuses et boisées vous volent bec sucré après bec sucré dans une succession qui vous surprend.  


Les richement chocolatées et liquoreuses


Russian Imperial Stout

Étonnamment pétillante comparativement aux autres bières foncées d’Hornbeer, cet Imperial Stout propose plus d’acidité et de sécheresse que le reste de la gamme. Il en résulte une bière plus florale, proposant des notes de pains rôtis en sus des habituelles allusions au café et au chocolat.

 

Black Magic Woman

De texture on ne peut plus suave, cette richissime Imperial Stout saura combler les amateurs d’Impies à la Harvey’s : richement fruitées dans tous les sens du terme et déployant une belle complexité de malts foncés, notamment grâce à des allusions fumées plus que bienvenues. Ronde et habilement houblonnée, il s’agissait d’un de nos principaux coups de cœur de la gamme Hornbeer.



Carribean Rum Stout

Amateurs de rhum, ne cherchez pas plus loin. Les sucres caramélisés de cette bière aux profondes notes fruitées rappelant le raisin sec et la groseille, entre autres, vous charmeront de par leurs nuances de chocolat noir et de coulis de mélasse. Une intégration remarquable dans un ensemble assurément sucré, mais suffisamment captivant pour conserver notre intérêt du début à la fin.


Winterporter

Une autre belle bête de malt foncé, sucrée et aux abondantes tonalités de mélasse, de vanille, de cacao. D’effervescence légère, elle paraît crémeuse et « dessertique » en bouche.


Fundamental BlackHorn

Incroyablement riche que cette Imperial Stout profondément chocolatée, aux intenses tonalités de café et de réglisse noire qu’accompagne une amertume sérieuse, mais presque étouffée par tout ce malt foncé et une chaleur d’alcool soutenue. Les amateurs de sensations fortes seront ravis, mais plutôt qu’une incroyable complexité des flaveurs, nous avons ici affaire à une remarquable focalisation sur les saveurs de base des malts foncés.

21 févr. 2013

Le jeu des comparaisons à l'Hivernale des Brasseurs (2e partie)


Pour le premier billet sur le sujet, cliquez ici.

Outre les deux catégories prédominantes présentées précédemment, le menu de l'Hivernale 2013 comporte plusieurs duels fort intéressants pour les papilles. Entre autres, deux Brown Ales de statut 'impérial', seront en service:


-Noire et Blanche Cenne Noire - Mélange Barriqué
-Siboire IABA (Imperial American Brown Ale)

Une des deux, celle de Noire et Blanche, contient 10% d'une bière mûrie en barrique de chêne. Est-ce que cet apport sera détectable aux côtés de la version non assemblée du Siboire?

Également, deux bières brunes, chaleureuses et fortement épicées seront disponibles en fût, provenant de deux univers brassicoles complètement différents mais somme toute complices:

-Het Anker Gouden Carolus Noêl
-Beau’s Bogfather

La première provient directement des traditionnelles Kerstbier belges et l'autre, des boisés et de l'imaginaire de brasseurs ontariens de talent. Serez-vous capables d'identifier certaines des nombreuses herbes et épices utilisées?


Un exercice similaire est également possible, mais dans un monde davantage doré. Une juxtaposition de deux Tripels délicatement épicées, dont une ayant séjourné dans une barrique de chêne:

-Goudale Spiritus Fornicationis
-Unibroue C’est Pas la Fin du Monde

Puis il y aura également deux bières noires chaleureuses, mais au profil résolument fruité et acidulé, les deux ayant mûries dans une barrique mouillée de vin. Une aura rencontré des levures sauvages pendant sa fermentation, l'autre, non:

-Trou du Diable / Dieu du Ciel! Le Purgatoire - Archéoporter
-Charlevoix Porter 85 Chardonnay


Finalement, pour amateurs d'explosions houblonnées il y aura une panoplie d'offrandes, de toutes les couleurs par surcroît. Certaines avec levures belges, d'autres avec levures sauvages, certaines passablement sèches, d'autres enveloppées de sucres résiduels, toutes avec une grande diversité de cultivars de houblons évidemment. Leurs saveurs dominantes seront souvent dictées par les angles floraux, citriques et bien amers provenant de leur houblonnage puissant:

-3Mousquetaires Barleywine Américain Édition Spéciale
-Lac St-Jean Houblon Libre
-Trèfle Noir Hoppercut
-Dieu du Ciel! Pionnière Imperial Black IPA (en cask)
-Broadway Pub Tchucké Noire
-Benelux Motek
-Brouhaha Tribale v.0.2 Double IPA
-Frampton Brasse IIPA
-La Voie Maltée Hermaphrodite
-Brasseurs du Temps Diable au Corps Pinot Noir

Ouf. Question de se ravigoter les papilles suite à de telles dégustations empreintes d'amertume, un verre du Glacé mousseux vieilli en barrique, des Vergers de la Colline, sera particulièrement indiqué...

Et n'oubliez pas d'être aux aguets pour quelques brassins surprises! L'Albion a déjà annoncé qu'ils apporteraient des bouteilles de leur sublime Cuvée Charles, alors...

Bonnes dégustations!



17 févr. 2013

Le jeu des comparaisons à l'Hivernale des Brasseurs (1e partie)


Votre trouverez le menu de bouchées de cette année en cliquant ici

Encore une fois, le défi à l'Hivernale des Brasseurs sera de se garder en appétit pendant de longues heures, de boire et manger avec modération, afin de maintenir ses papilles et ses désirs éveillés pour pouvoir goûter à tout ce que l'on veut déguster. Question de savoir où se diriger parmi la ribambelle de belles et bonnes offrandes, voici quelques comparaisons à essayer entre des bières qui, théoriquement, auront des profils de saveurs similaires. Saurez-vous noter les particularités de chacune?


Dans la catégorie: "Noires, chocolatées, rôties et liquoreuses", nous pourrons déguster:
-Le Loup Rouge Les Bons Garçons
-La Succursale Tmavé Specialni
-Le Bilboquet Corriveau Spéciale
-La Chouape Post-Scriptum - I Love You
-Le Saint-Bock La Croisade
-Brasseurs du Monde Titanium 
-The Kernel Export Stout

Certaines d'inspiration tchèque, d'autre anglaise, certaines mûries en barriques mouillées d'alcool, d'autres non, certaines profitant d'ingrédients inusités (quelqu'un a dit "bacon"?!), d'autres pures et dures. À vous de jouer! À moins que vous préfériez un profil de saveurs différent? Quelque chose qui accompagnerait bien les ailes de canard fumées avec chutney d'oignons et canneberges à la Sang de Lutin du Brouhaha?

Pour vous, dans la catégorie "Liquoreuses et richement caramélisées", il y aura:
-Albion La Réserve de Durin
-Dunham The Red Sashes 
-À l’Abri de la Tempête Palabre du Pingouin
-L'Alchimiste Wee Heavy 2011
-Des Beaux Prés La Protestante
-Bedondaine et Bedons Ronds Reyne Descosse
-Boquébière Golden Scotch Ale
-Le Naufrageur Mary Read

 Louis-Franck Valade, du Naufrageur
Photographie: David Gingras

Et que faire si vous réclamez plutôt un feu d'artifices de houblons aromatiques et amers, ou même une tornade épicée? Suite dans 48 heures...

10 févr. 2013

Vers une nouvelle façon de présenter une bière - 1ère partie

Le milieu des commentateurs de la bière artisanale, comme tous ces mondes inventés par l’homme afin d’assouvir son éternel besoin d’avoir des opinions plus valides que celles de son voisin, regorge de dichotomies. Les bières artisanales sont-elles « meilleures » que celles des brasseurs industriels? Est-il préférable de produire une gamme stable et fiable ou de renouveler sans cesse son offre à coup de nouveautés parfois perfectibles? Une des questions les plus débattues est sans doute : vaut-il mieux juger une bière selon ses mérites absolues (l’approche hédoniste, préconisée par Ratebeer, par exemple) ou selon sa qualité par rapport à son style (cette approche relative serait-elle plus juste?). Puisque nous devons nourrir la bête des commentateurs de bière artisanale qui nous anime, nous ne profiterons pas des prochaines lignes pour clore cette question. Plutôt, espiègles que nous sommes, nous suggérons d’éclater la discussion davantage.

En effet, s’il est impossible de prétendre que chaque bière a été créée en vue de cadrer dans la définition d’un style bien spécifique, et qu’il est donc ardu de simplement classer l’ensemble des bières sur le marché, peut-être serait-il plus facile de classer les bières selon l’intention du brasseur.

Si on présentait une bière en terme de flaveurs et de texture, notre choix de bouteille au magasin serait certainement plus près de nos désirs gustatifs...

Dans Les saveurs gastronomiques de la bière, à paraître à l’automne 2013, entre autres tergiversations, nous tentons l’exercice périlleux de regrouper les styles de bières (oui oui, un regroupement de regroupement, nous ne faisons pas les choses à moitié!) selon leurs flaveurs et textures dominantes. Ce faisant, le vocabulaire des odeurs, saveurs et textures que nous partageons tous sert de véhicule descriptif évocateur, autrement plus que des termes aux frontières élastiques comme Pale Ale ou Stout. Commençons d'abord, avant de tout dévoiler, par cerner le purpose d’une bière, ses intentions, ses ambitions, son âme.

S’agit-il d’une bière de soif, servant à étancher, à rafraîchir quand il fait chaud, à catalyser la vie sociale des débits de boisson, à satisfaire l’insatiable envie de nos coudes d’aller à l’encontre de la gravité de nombreuses fois au cours d’une même soirée? [Hefeweizen, Blanche belge, Cream Ale, Hell, Pils, Kölsch, Amber Ale/Irish Red Ale, Oktoberfest/Märzen, Vienna, Dunkelweizen, Brown Ale, Dunkel, Mild, Schwarzbier, Altbier, Bitter, Steam Beer, Saison légère, American Pale Ale, etc.]

Est-ce que cette couleur est garante d'une bière de soif? Évidemment que non! D'où l'importance de faire référence aux flaveurs et aux textures...

S’agit-il plutôt d’une bière de contemplation, d’une bière d’impact, parfois expérimentale par ses ingrédients ou son élaboration, n’ayant de considération que pour le coup de circuit qui chavire les papilles de ses saveurs puissantes, franches et costaudes, rendant le dégustateur béat devant le fleuve de complexité qui défile devant lui. [Barley Wine, Scotch Ale, Imperial Stout, Lambics et Gueuzes, Doppelbock et Eisbock, Imperial IPA, Black IPA, Baltic Porter, Bières de Noël belges, Weizenbock, Triple, Quadruple et ABT, etc.]

S’agit-il d’une bière charnue mais somme toute jamais lourde, une bière 'intermédiaire' à la recherche d’un compromis, voire de l’équilibre entre les deux extrêmes précédemment décrits? [Sweet Stout, Extra Special Bitter, Maibock, Bock, Bière de Garde, IPA anglaise, etc.]


Dans Les saveurs gastronomiques de la bière, nous vous proposerons des familles de bières plus précises axées sur les rapprochements gustatifs, de texture, d'objectif et parfois même, de couleur, lorsqu'utile, question de démontrer les liens qui existent entre plusieurs créations d'origines diverses. Mais pour commencer, admettons qu'il serait fort utile à tout le monde d'approcher les bières selon leur nature rafraîchissante ou au contraire, digestive, afin de les juger sur une base plus comparable. Sans comparer des pommes Empire avec des pommes Empire, peut-être réussirions-nous au moins à comparer des pommes avec des pommes?


4 févr. 2013

La Bretteuse, du Trou du Diable, à Shawinigan



Après la Buteuse Brassin Spécial et la Dulcis Succubus, voici la troisième bière sauvage embouteillée par le Trou du Diable issue d'un savant assemblage de barriques de chêne mouillées d'un alcool spécifique et, bien sûr, de levures sauvages. Dans tous les cas à ce jour, le résultat est époustouflant de complexité et d'élégance. Voici donc l'inévitable fiche Grand Cru que se mérite facilement la Bretteuse:

Style : Certains diraient "Barrel-Aged Wild India Pale Ale". D'humeur plus terre-à-terre, on pourrait la décrire comme étant une bière sauvage, bien fruitée, boisée et amère.

Disponibilité: Le premier brassin embouteillé est récemment atterri sur les étagères de certains magasins spécialisés. Cette bière a séjourné 18 mois dans des barriques ayant contenu du Syrah californien, alors on ne s'attend évidemment pas à une présence régulière sur le marché.

Le coup d’œil : Un duvet de mousse blanche s'assoit sur la robe ambrée quelque peu brumeuse.

Le parfum : Gavé de fruits tropicaux, l'arôme sauvage est aussi serti de bois et de résines savamment alignées.

En bouche : Douillet grâce à la gazéification douce et aux sucres résiduels sveltes, le corps de la Bretteuse est le véhicule parfait pour le profil de saveurs haut en couleur. Le parfum précédemment perçu s'épanouit en bouche, imprimant clairement chaque note sur les papilles dans une harmonie de longue durée.

La finale : Le boisé de la barrique, le fruité tropical des houblons et les notes d'herbes sauvages partagées par les brettanomyces se retrouvent encore une fois dans l'harmonie et l'allégresse les plus complètes. La génuflexion devient soudainement un mode de remerciement attrayant...

Accords : Un tikka masala doux, ou une soirée à contempler le ciel étoilé, tout simplement.

Pourquoi est-ce un grand cru? : Complexe à souhait, facile à déguster et imaginative, elle possède tous les atouts pour plaire à un grand nombre d'amateurs tout en satisfaisant les dégustateurs les plus aguerris.

Si vous avez aimé, essayez aussi : La Dulcis Succubus, du Trou du Diable (Shawinigan), la Art, de Hill Farmstead (Vermont) et l'Arquebus, de Cambridge Brewing (Massachusetts).

27 janv. 2013

Le doigt d'honneur aux saveurs saisonnières

Le Québec a vécu récemment une vague de froid qui était sur toutes les lèvres. Le monde brassicole offre plusieurs options pour qui veut s’extirper, le temps d’une gorgée, de ce froid qui l’empêche pratiquement de jouir des plaisirs que lui offre l’extérieur de sa maison, de son milieu de travail, de son pub favori, le « dehors », bref.



C’est vrai! Certains arômes, certaines saveurs évoquent carrément la chaleur. Elles permettent de réchauffer l’âme affligée des supplices hivernaux. Au premier rang de ces dites saveurs chaudes trône évidemment l’alcool, qui se passe de présentation. Non loin derrière, le rôti présente un caractère réchauffant réconfortant. En sirotant un Stout qui ne dépasse même pas les 5% d’alcool, on sent néanmoins les effluves de café qui ne peuvent qu’évoquer la chaleur à laquelle les grains ont été soumis afin de terminer leur jour avec une robe ébène sans équivoque. Similairement, mais peut-être dans une moindre mesure, les notes de caramel et de fumée évoque un processus réconfortant pour les esprits frigorifiés. De façon plus saugrenue, le feu des bières très épicées réchauffe la tête autant que la langue et fait vite oubliée la maussade température extérieure.



Nous vous entendons déjà nous dire que nous ne vous apprenons rien. Facile à dire, vous en savez déjà tellement! Vous connaissiez évidemment déjà ces trucs de Québécois aguerris. Laissez-nous donc vous dire qu’il existe une autre approche, tout aussi jouissive de se tropicaliser l’imaginaire. Nous avons nommé : le doigt d’honneur à l’hiver. Quelle meilleure façon de confronter un froid glacial que de le renier, de lui boire une bière hautement rafraîchissante en pleine face. Le confronter à grands traits de foin, d’acidité, d’amertume, de gazon, de fruits et d’agrumes. Amenez-nous ces bières acides, ces Bitters, ces Saisons et autres Pilsners. Ces fidèles alliés ont conquis nos univers estivaux, elles méritent bien mieux que de se défraîchir sur les tablettes en attendant la belle saison. 

21 janv. 2013

L'Oie Blanche, de la Microbrasserie des Beaux Prés, à Ste-Anne-de-Beaupré


Luc Boivin, maître-brasseur de la Microbrasserie des Beaux Prés
Photographie: David Gingras

Luc Boivin semble manier le blé avec une passion et un respect de l'authenticité hors du commun dans nos contrées. En effet, peu de brasseurs nord-américains traitent leurs Weizens, par exemple, avec autant de respect (voire la fiche Grand Cru de sa St-Joachim Weizenbock pour un autre exemple). Celle-ci, l'Oie Blanche Weizen, propose toutes les subtilités issues du caractère fermentaire propre au style, en plus du corps douillet, de l'équilibre des flaveurs et de la buvabilité immense du tout. Ne resterait maintenant qu'à l'embouteiller avec les mêmes niveaux de gazéification que les bavarois (hint, hint ;D). Suite à ce rêve à peine voilé de notre part, voici la fiche Grand Cru de cette sublime Oie Blanche! 

Style : Hefeweizen; bière de blé d'inspiration bavaroise. Ou, si vous préférez, une blanche délicatement épicée et fruitée, dont le profil de saveurs provient uniquement des céréales, des houblons et du caractère fermentaire, contrairement aux blanches belges (Witbier, utilisant aussi écorces de fruit et épices).

Disponibilité: En tout temps au brouepub de Ste-Anne-de-Beaupré. De temps à autre, comme bière invitée aux bonnes adresses de la province.

Le coup d’œil : Un nuage de mousse s'établit sur la robe jaune pâle voilée aux accents ambrés, suivant la bière jusqu'au bas de la pinte.

Le parfum : Des notes d'agrumes, de fleurs, de bananes et de gomme-balloune se côtoient amicalement, à un niveau d'intensité modéré. On prend plaisir à y plonger le nez, quitte à s'y coller un peu de mousse sur le museau...

En bouche : Le blé croquant et les esters de banane bénéficient d'une touche terreuse et minérale, en plus de voir apparaître à l'occasion un angle fruité rappelant celui de la mangue.

La finale : L'amertume herbacée est bien nivelée au niveau d'intensité modéré de cette bière, rendant le tout encore plus facile à boire à grandes lampées.

Accords : Bien que la boustifaille de la microbrasserie possède toujours quelques options qui accompagneront vaillamment cette Weizen, il faut avouer que la vue sur le fleuve qu'offrent la terrasse et la salle arrière de la Microbrasserie des Beaux Prés vont de pair avec les flaveurs apaisantes de l'Oie Blanche.

Pourquoi est-ce un grand cru? : Voir paragraphe d'introduction. ;))

Si vous avez aimé, essayez aussi : La Belle Gueule Hefeweizen, de Brasseurs RJ (à Montréal), la Bünnweizen, de la Succursale (à Montréal), la Hofmann Weiss, de Moat Mountain (au New Hampshire) et la Hacker-Pschorr Weisse (Allemagne, à SAQ).

14 janv. 2013

Les pâturages brassicoles de la Lituanie - Panevėžys et conclusion


Notre périple d'exploration brassicole en Lituanie semble avoir touché une corde sensible chez certains acteurs importants de l'univers de la bière. Nous avons eu la chance d'écrire le chapitre sur ce pays dans la prochaine édition du World Atlas of Beer (version 'Pocket Guide') de Tim Webb et Stephen Beaumont, à paraître en 2013. Evan Rail du New York Times, de son côté, partage l'engouement pour certaines de nos découvertes dans le journal new-yorkais (voir le #24 de cet article). Nous allons même figurer dans son nouveau projet de livre recueillant les meilleurs exemples de littérature brassicole publiée en anglais. Il faut croire qu'il fallait que ce voyage se fasse, par nous ou quiconque, un jour ou l'autre. En espérant que le tout serve à éclairer davantage cette scène brassicole voilée du reste de la planète pour qu'elle puisse perdurer!

Voici donc sans plus tarder notre dernier article sur le sujet, cette fois-ci sur la ville de Panevėžys, sise entre le nord-est campagnard et la capitale de Vilnius au sud du pays. Cette partie du voyage est nettement moins difficile à entreprendre que celle des campagnes où les brasseurs traditionnels se méfient des étrangers essayant de leur acheter une bière. Même que trois des quatre établissements décrits ci-dessous ouvrent leurs portes à tout le monde; de véritables bars, quoi! 

Gyvo Alaus Krautuvelé, au Savanoriu Aikštė 4a




Un verre de la somptueuse Velykinis Porteris Tamsus, une spécialité saisonnière du groupe brassicole Aukštaitijos Bravorų


Ce bar à bière met en valeur les créations des cinq brasseries appartenant au groupe Aukštaitijos Bravorų: Taruškų Alaus, Kurklių Bravoras, Kupiškio Alus, Miežiškių Bravorą et Butautu Dvaro. Si vous avez lu nos articles précédents sur chacune d'entre elles, vous avez remarqué que la qualité des bières servies ici ne peut qu'être très élevée. C'est donc dans une ambiance estudiantine, sans prétention, qu'on peut s'abreuver de nombreuses bières différentes, en fût comme en bouteille, d'une compagnie qui pourrait à elle seule faire renaître de multiples recettes traditionnelles lituaniennes auprès d'une clientèle grandissante.

Tauros Loftas, au Senamiescio Gatvé 29
Vidmantas, notre guide nous ayant grandement aidé à ouvrir plusieurs des portes closes à des étrangers, nous présentant le bar de la brasserie Taura.

Un autre étrange bâtiment que ce Tauros Loftas. Dans un quartier industriel non loin du centre de Panevėžys, attenant la brasserie, cet immense pièce pourrait accueillir une bonne centaine de clients. Pourtant, personne ne semble l'investir sauf en période de spectacle en fin de semaine. Qu'à cela ne tienne, la bière phare de la brasserie, une bière dorée parfaitement conçue, tient la route jusqu'à son amertume herbacée soutenue. Aucun caractère intrinsèquement lituanien, mais qu'importe. Ça fait du bien de remettre les papilles sur terre à l'occasion.

Une pinte de la Taura Lofto, version "nefiltruotas"

Prie Uosio, au Laukiame Birutes Gatvé 8
Quelques verres de Seklyčios, une superbe bière de soif aux malts toastés saillants

Trouvez l'arbre sur lequel des centaines de clés sont cloués et vous serez à quelques pas de ce chaleureux bar appartenant à la brasserie Piniava Alutis. Les boiseries et les nombreux vases à service rajoutent à l'ambiance traditionnelle où les chants spontanés (photo ci-dessous) peuvent éclater à n'importe quel moment. Suffit d'attendre le premier client qui se sent d'attaque...



Alaus Purslai
Recirculation du moût lors d'un brassin de la Gintarine Puta

Cachée dans un bâtiment aux allures de bloc à appartements (photo ci-dessous) dans un quartier résidentiel, cette microbrasserie vend ses bouteilles de plastique dans quelques commerces du coin. Heureusement pour ceux ne désirant pas s'aventurer au nord de Vilnius, sa bière phare, la rafraichissante Gintarine Puta, une Šviesus sèche et bien maltée, est souvent disponible en fût au Alaus Namai. Comme c'est le cas pour la majorité des brasseries lituaniennes, celle-ci est impossible à visiter à moins d'avoir quelques contacts et que le maître des lieux soit de bonne humeur ce jour-là...



Ceci conclut notre guide de voyage brassicole sur la Lituanie. Merci à tous ceux qui nous ont aidé dans nos recherches à dénicher ces brasseurs, ces bières et ces histoires, notamment Martynas Savickis de Tikras Alus et Vidmantas Laurinavicius, de Alaus Brolija. Valentas (ci-dessous) et Les Coureurs des Boires vous disent un gros "merci" et, surtout, "chapeau"! 


Pour (re)lire les neuf premiers articles de ce périple d'exploration brassicole en Lituanie, rendez-vous à la fin de cette page.

10 janv. 2013

La Leo's Early Breakfast IPA, de la Brasserie Dunham

Photo gracieuseté de la Brasserie Dunham

Dunham nous gâte encore une fois avec cette Leo, une recette qui s'est pointée le bout du nez pour la première fois au festival Bières et Saveurs de Chambly en septembre dernier. Issue d'une collaboration avec Andreas Kissmeyer, réputé brasseur danois, nous avons ici le fruit d'une imagination et d'un savoir-faire riches. Voici sa fiche Grand Cru!

Style : Cette bière est la rencontre d'une India Pale Ale façon Nouveau Monde (donc généreuse dans son partage de flaveurs de fruits tropicaux issus des cultivars du nord-ouest des États-Unis et de la Nouvelle-Zélande), de purée de goyave et de thé Earl Grey (bergamote). Une recette hautement créative sur toute la ligne. 

Disponibilité: Le premier brassin embouteillé a atteint nos étagères avant le Temps des Fêtes, mais d'autres brassins s'en viennent afin de pallier au vide déjà créé en magasin. 

Le coup d’œil : Une tuile de mousse survole la robe ambrée discrètement voilée. 

Le parfum : La goyave, les fruits tropicaux des houblons (notamment le Nelson Sauvin) et la bergamote vivent en parfaite harmonie, offrant une personnalité et une complexité uniques à cette IPA. 

En bouche : On en redemande à chaque fois que notre nez s'approche du verre; tant mieux puisque le profil de saveurs renchérit sur le parfum si envoûtant, ajoutant une dimension résineuse parfaitement équilibrée à toutes ces captivantes notes fruitées. 

La finale : Le corps douillet et jamais gras mène à une amertume résineuse bien dosée. Ce n'est pas une bombe d'amertume comme leur Imperial India, pour vous donner une idée. 

Accords : Un satay de poissons sur vermicelles de riz, par exemple, ou tout autre plat avec une finale piquante qui s'enticherait de fruits tropicaux. On peut penser à plusieurs types de caris.

Pourquoi est-ce un grand cru? : Complexe, rafraîchissante et juste assez différente pour se démarquer du lot, la Leo possède également un profil de saveurs jamais trop intense, jamais trop gêné. Et puisque le tout est bien équilibré et harmonieux, franchement, avec un tel niveau de complexité imposé par les nombreuses variables en présence, difficile de ne pas crier au génie.

Si vous avez aimé, essayez aussi La Sabotage, du Benelux (Montréal), la Houblon 9, du Cheval Blanc (Montréal) et la Edward, de Hill Farmstead (Vermont).


3 janv. 2013

Le langage des amateurs de bière - 2e partie, édition Post-Temps des Fêtes


Dans cette série de billets sur le vocabulaire utilisé par une majorité d'amateurs de bière de dégustation, nous tenterons d'explorer des tendances langagières récentes nées soit d'un isolement virtuel (communication par internet: premier article), soit d'un environnement de plus en plus "spécialisé" faisant fi du sens transmis auprès d'une population néophyte. Peu importe la question abordée, il se peut fort bien que nous méritions de visiter le bûcher autant que vous... 

Photo: David Gingras

Question #2:
Est-ce que l'amateur de bière de dégustation devrait faire attention à son langage lorsqu'il sait qu'il sera entendu par des gens qui ne sont pas des initiés du milieu?

Dans un contexte familial, comme c'est souvent le cas dans le temps des Fêtes, lorsqu'en présence de gens non amateurs de bière, il arrive souvent qu'un amateur de bière de dégustation décide d'étaler sa passion pour le divin breuvage dans son verre. Normal. Et lorsque le beau-frère lui demande si la bière X de microbrasserie qu'il a vu au supermarché vaut le prix, le dit amateur chevronné maintient le cap: il fera preuve de sens critique et dira ce qu'il pense franchement de cette bière 'correcte, mais sans plus'. Après tout, pourquoi changer son langage lorsqu'on parle d'un produit que l'on connait mieux que tous à la table, n'est-ce pas?  

Cependant, est-ce que le manque d'enthousiasme de cette réponse ('correcte, mais sans plus') pourrait être interprété par un néophyte comme étant la description d'un produit moins qu'ordinaire alors que, objectivement, la bière en question ne possède aucun défaut, même qu'elle est décrite comme étant 'délicieuse' par d'autres bièrophiles? En d'autres mots, est-il plus important de s'affirmer comme amateur de bière de dégustation avec des opinions, même lors de situations conviviales comme les soirées du Temps des Fêtes, que de partager son engouement pour le type de produit en général?