30 nov. 2011

Les bières de Girardin disponibles via Importations Privées Bièropholie

Encore une fois, Importations Privées Bièropholie nous permet de mettre la main sur des perles rares qui n’ont pas encore d’équivalent au Québec. Cette fois-ci, nous avons accès aux bières de Girardin, l’un des rares brasseurs de lambic, ces rafraîchissantes bières de blé sauvages et acidulées des environs de Bruxelles. Dans le domaine, si Cantillon est souvent citée comme le brasseur de lambic le plus authentique, Girardin est souvent considéré comme le brasseur des lambics les plus fins, les plus complexes. Les assembleurs, qui produisent du lambic en l’achetant à des brasseurs plutôt qu’en le brassant eux-mêmes, s’arrachent les lambics racés de Girardin. Malgré ses grandes qualités, le lambic de Girardin sert tant des intérêts d’authenticité que des intérêts commerciaux. Sa gamme de produits va donc du lambic aux fruits doux auquel on a ajouté une bonne dose de sucre à la gueuze la plus équilibrée. Voyons ces produits de plus près.




Girardin Faro :
Ce style presque éteint, un jeune lambic dont on a coupé l’austérité à l’aide d’un sucre candi, n’est presque plus embouteillé de nos jours. Celui de Girardin représente une des rares opportunités, avec le Lindemans plus commun, de tremper les lèvres dans une bière qui surprend en étant à la fois sucrée et rafraîchissante, offrant d’agréables flaveurs de blé et de caramel entremêlées de subtiles touches citronnées.

Girardin Kriek :
Les puristes qui aiment leurs lambics très secs et acides n’apprécieront pas la Kriek de Girardin. Elle propose toutefois un pont très intéressant entre les produits obstinément authentiques des Cantillon, De Cam, Hanssens ou Drie Fonteinen et ceux au sucré rappelant le bonbon des Lindemans et autres Timmermans. Chez Girardin, le mot d’ordre est l’accessibilité. Le fruit est à l’avant-plan, jamais sirupeux, mais plus qu’un brin sucré, juteux même. La cerise domine complètement le profil de flaveurs et les amateurs de ce fruit seront comblés.

Girardin Framboise :
Très semblable à la Kriek en terme de structure, la Framboise de la maison se montre facile à boire, relativement sucrée et très parfumée, son parfum de framboise n’étant pas subtil pour deux sous. Explosive, elle s’assume bien.

Girardin Gueuze White Label :
Girardin décline sa gueuze sous deux étiquettes différentes. Celle-ci a une étiquette blanche et se distingue de sa noble consœur puisqu’elle a subi une filtration. Pour les puristes, cette opération est presque scandaleuse. Le lambic devrait être naturel au possible ; une technologie aussi simple et répandue que le filtre devrait se tenir loin ! N’empêche, la gueuze de Girardin est tellement extraordinaire que sa version filtrée demeure une grande bière. Pour convaincre l’amateur de vin blanc à s’aventurer dans l’univers de la bière, elle a peu d’égal avec ses rafraîchissants effluves de foin, de citron et de pomme. Plusieurs la comparent à un bon cidre fermier. Son acidité est soutenue, mais bien gérable, jamais vinaigrée.

Girardin Gueuze Black Label :
Alors là, si les puristes ont jusqu’ici eu moult occasions de se consterner, les voici confondus. La Gueuze de Girardin est une œuvre d’art, qui jouit heureusement d’une distribution plus intéressante que certains autres chefs d’œuvre comme Drie Fonteinen et De Cam. Plusieurs amateurs considèrent cette Black Label comme la gueuze ultime. Sans être la plus intensément racée, elle est peut-être la plus équilibrée, d’un raffinement exemplaire et d’une complexité renversante. Merveilleuse compagne à table, on peut lui confier le rôle de passe-partout qu’on attribue souvent au Champagne. Ses couches de lambics d’une grande pureté laissent échapper de profonds arômes de foin, de fruits, de chêne ; tous s’unissent pour valser sur le palais. Sèche à souhait, son effervescence soutenue taquine constamment la langue de ses bulles festives. Les flaveurs de blé ressortent bien, s’agrémentant le plus naturellement du monde au caractère citrique marqué. Les saveurs se succèdent sans qu’on s’en aperçoive: c’est l’équilibre. À ne pas manquer.



Heureuses découvertes!

27 nov. 2011

La Brasserie Albion célèbre en créant une bière à remonter dans le temps


Bien que l'exquise Bitter de cette brasserie artisanale de Joliette, en fût et en cask, méritait par moments de voler la vedette lors de cette soirée anniversaire, et que La Berthelaise, une magnifique ale subtilement fumée conçue à partir d'eau d'érable, possédait le panache et le terroir nécessaires à inspirer les pères du projet Annedd'ale, c'est une autre bière qui courait sur toutes les lèvres samedi dernier.  Une recréation historique d'une India Pale Ale de 1839, servie en trois versions différentes s'il-vous-plaît. L'objectif:  tenter de comprendre ce que les anglais stationnés en Inde au 19e siècle pouvaient bien goûter lorsque les barils d'IPA arrivaient à bon port après de longs mois en mer.


Le résultat? Des trois versions, c'est peut-être le fût témoin, n'ayant pas vécu les hauts et les bas de la pièce chaude dans lesquels ses consoeurs ont été trimbalées, qui révélait les saveurs les plus raffinées. La fraîcheur du houblon Golding était déconcertante, évoquant autant d'agrumes que de feuilles et d'herbes, le tout équilibré par des céréales miellées et une pointe d'alcool. Une belle bière à humer et à siroter. 

La version visant à être la plus fidèle historiquement parlant (celle ayant subi les soubresauts de température et de mouvement dans un baril de chêne) était sans aucun doute celle au profil le plus intense. Au nez, un parfum de bois vert dominait les houblons citronnés pourtant expressifs en bouche. L'alcool réchauffait le palais sans gêne, accompagnant les houblons longs et amers. L'oxydation présente était somme toute camouflée par l'intensité des protagonistes principaux, alors que des angles sauvages perçaient le tout. Ceux cherchant les émotions fortes étaient servis.


En bouche et au visu, aucune ne pouvait rivaliser cependant avec la version en cask, soutirée d'une pompe manuelle, comme le veut la tradition anglaise. La mousse crémeuse dressait une dentelle indélogeable sur les parois de la tulipe et la robe dorée brillait de clarté comme si elle avait été filtrée (elle ne l'était évidemment pas). De toute évidence, nous étions en présence d'un cask entretenu de main de maître, ce qui est rare en Amérique (pas seulement au Québec). Les flaveurs d'agrumes évoluaient dans un corps des plus moelleux construit par la gazéification naturelle habilement agencée aux quelques sucres résiduels. Ce verre était facile à boire malgré ses 8% d'alcool...

Les quantités produites étant minuscules, il nous faudra patienter plusieurs mois afin de pouvoir replonger à la genèse de ce style si populaire aujourd'hui. Question d'alléger notre deuil passager, Steven Bussières, maître-brasseur du Albion, nous a annoncé qu'il avait déjà entamé le brassin du prochain anniversaire. Demandant non moins de six heures d'ébullition et près d'un an de mûrissement afin d'atteindre l'équilibre voulu, la Albion No.1 verra le jour en novembre 2012. Basée sur la Bass No.1, le tout premier Barley Wine à être produit à grande échelle au Royaume-Uni, cette ale forte saura sans doute nous faire vivre de beaux moments gustatifs, tout en nous armant, encore une fois, de connaissances enrichissantes.

21 nov. 2011

L’Hivernale des Brasseurs 2012 – est-ce que ça vaut 95$ ?



Les organisateurs de l’Hivernale des Brasseurs (Winter Warmer Montréal) ont opté pour une formule différente cette année. Au lieu que les convives soient forcés de sortir leur portefeuille à chaque fois qu’ils passent au bar pour un échantillon, un prix forfaitaire donne accès à boustifaille et grands crus à volonté. On ne peut leur en vouloir puisque le prix d’entrée (25$) de l’édition 2011 constituait carrément la meilleure aubaine en ville.

Puisque vos blogueurs favoris se sont joints à l’organisation cette année (sans intérêt financier, précisons-le), vous vous doutez bien que ce billet vise à défendre un prix qui peut paraître élevé pour un tel événement. Au Québec, il y a en fait peu de comparables. Presque tous les festivals facturent à la consommation selon le principe que les politiciens qui se souviennent de leurs classes d’économie se plaisent à appeler celui de l’utilisateur-payeur. À l’opposé, la plupart des festivals de bières aux États-Unis présentent une formule où la bière est à volonté. Le prix varie alors habituellement entre 40$ et 60$ pour une session. La comparaison directe est toutefois trompeuse.

- Dans plusieurs de ces festivals, on sert les bières, pour des raisons réglementaires, dans des verres de type « shooter », souvent en plastique, qui mettent mal en valeur les produits d’exception qu’on y sert. L’Hivernale des Brasseurs mise plutôt sur un ballon de type « snifter » fort approprié.

- Fréquemment, les festivals américains sont condensés dans une période de 3 à 5 heures. C’est une stratégie visant entre autres à éviter les dérapages liés à une trop grande consommation d’alcool par certains individus à risque. L’Hivernale des Brasseurs estime que le public québécois est plus mature et moins porté à l’abus, d’autant plus que la diversification de l’événement avec des bouchées de grande qualité et un prix reflétant l’ensemble de l’offre, risque d’écarter les gens qui ne veulent que s’en mettre plein la gueule. Les sessions de 10 heures de l’Hivernale des Brasseurs permettent de prendre bien le temps d’apprécier les produits qui nous intéressent, sans faire la course.


- Le festival américain implique presque toujours de patienter au bout de longues files avant d’avoir accès à un kiosque de service. L’Hivernale des Brasseurs limite grandement le nombre de participants à chaque session de façon à éviter les files et à maximiser la qualité acoustique de la musique, la convivialité et les possibilités d’avoir une bonne conversation avec notre brasseur favori.



- Les festivals américains à 40-60$ la session n’offrent habituellement que des options limitées pour la nourriture, payantes en sus du coût d’entrée. L’Hivernale des Brasseurs considère la nourriture comme un élément charnière de son programme, une source inépuisable de plaisir grâce aux chefs qualifiés qui seront aux commandes.



- Bref, L’Hivernale des Brasseurs vise à offrir une expérience de grande envergure à tous égards, une soirée complète à prix raisonnable, un prix qui vise à éviter les pertes, mais pas à générer des profits. Au fil des années, l’étendue des bières importées jamais disponibles au Québec, mais en service à l’Hivernale, est destinée à croître grandement.
 
Tout ceci étant dit, à qui s’adresse un événement de ce prix? C’est surtout approprié à ceux qui aiment les crus rares et exclusifs, mais qui en plus, aiment la bonne chère. C’est aussi évidemment approprié pour quiconque aime encourager les initiatives des artisans du monde de la bière qui tentent de créer des événements conviviaux. Et à n’en point douter, c’est fort approprié pour offrir un cadeau de Noël qui plaira à coup sûr à l’amateur de bières cochonnes.


En revanche, force est d’admettre que l’événement convient moins à ceux qui apprécient peu les bières costaudes. Il s’adresse aussi moins à ceux pour qui la boustifaille n’a aucune importance; pour ceux-là, le prix est effectivement dispendieux. Il est évidemment moins approprié pour les gens ayant un budget très limité pour la bière. Et il n’est définitivement pas recommandable à ceux qui viseront seulement à profiter du fait que tout est à volonté pour se rendre malades.

À notre avis, c’est un événement qui s’adresse à un marché niche, mais un marché appelé à croître. Nous voyons dans les associations entre gastronomie et bière la prochaine étape dans l’évolution de la révolution microbrassicole. La bière mérite bien plus que les miettes que le puissant lobby du vin lui laisse en la regardant de haut. Nous croyons que des événements comme l’Hivernale des Brasseurs ne sont pas élitistes autant qu’une affirmation claironnante de la bière comme quoi la période où elle affichait un complexe d’infériorité face au vin tire à sa fin. L’Hivernale des Brasseurs constitue derechef une très belle diversification à l’offre de festivals au Québec, ces derniers se multipliant ces dernières années, mais trop souvent sans innover. Vive l’innovation et vive l’encouragement de celle-ci!

13 nov. 2011

Levons notre verre à Hopfenstark!


C'est samedi dernier, sur fond de Johnny Cash et de Slim Cessna's Auto Club, entourés de boiseries dépareillées et d'amis de tous acabits, que la microbrasserie Hopfenstark de L'Assomption célébrait ses 5 ans. Au menu, une sélection exhaustive des meilleurs crus du maitre-brasseur Frédéric Cormier, certains allant jusqu'aux premiers instants de sa brasserie, en fût, en cask et en bouteille. Entre autres, une verticale de la succulente Framboise Forte pouvait être effectuée, de 2007 à 2011; le plus jeune des 5 millésimés exhibant d'ailleurs un équilibre hors-du-commun dans la catégorie des bières sauvages, alliant framboises juteuses et brettanomyces exacerbés par un lit acétique.


La Kamarad Friedrich, Imperial Stout de la maison, déployait aussi ses multiples accoutrements pour l'occasion. Alors que la version 2010 servie au fût se vantait de ses saveurs de raisins secs et de noix rôties, l'édition 2011 vieillie en barriques ayant préalablement contenu du bourbon (ces mêmes barils photographiés ci-dessus) professait quelques notes vanillées supplémentaires soulevés par une chaleur d'alcool; parfait pour tout amant d'intensité.

Mais c'est hors de tout doute l'esprit de camaraderie qui régnait dans les locaux d'Hopfenstark, agrandis pour l'occasion afin de donner plus de confort à tous ceux qui se sont déplacés pour l'évènement, qui s'est assuré du succès de la soirée. Grand merci à Frédéric Cormier et sa petite équipe... et longue vie à sa passion et son talent. Votre repos de quelques heures est entièrement mérité. ;)

8 nov. 2011

La Route des Grands Crus de la Bière décorée d'or à Toronto

C'est lundi le 7 novembre dernier qu'avait lieu la remise des prix du Concours canadien des livres culinaires. Comme plusieurs le savent déjà, notre ouvrage La Route des Grands Crus de la Bière - Québec et Nouvelle-Angleterre s'est vu décerné la médaille d'or dans la catégorie des livres français portant sur les "intérêts spéciaux", une catégorie fourre-tout qui regroupe entre autres les alcools fins.


Voici d'ailleurs la liste des lauréats et quelques liens vers les premiers articles qui rapportent la nouvelle:

Liste des lauréats du gala

Article sur Canadian Beer News
Article sur Bières et Plaisirs

Bien que nous ne sommes pas convaincus de mériter pareil honneur devant d'éminents collègues comme François Chartier, nous l'acceptons avec bonheur et humilité. Voilà une belle récompense pour souligner le premier anniversaire de notre livre qui est paru il y a déjà un an! Depuis, déjà 6 nouvelles brasseries se font aller le fermenteur au Québec et rien n'indique un ralentissement prochain, si ce n'est le retrait d'AMB - Maître Brasseur. Une édition rehaussée de La Route des Grands Crus est certainement à prévoir, mais nous préférons accorder la priorité à de nombreux autres projets d'écriture déjà en branle. Nous vous donnerons plus de détails lorsque le tout sera officialisé, mais ce prix et les commentaires reçus à la suite de son attribution nous motivent à poursuivre dans la voie du voyageur à la recherche de la belle mousse.

Merci à tous ceux qui nous ont encouragés, autant de près que de loin!

6 nov. 2011

Strasbourg: l'autre Mondial de la Bière


Mine de rien, le Mondial de la Bière en était déjà à sa troisième apparition en France. Si l’édition de Montréal, toujours en croissance, attire maintenant près de 100 000 spectateurs en cinq jours, elle compte sur une ville où elle est implantée depuis près de 20 ans, une agglomération quatre fois importante que celle de Strasbourg, comptant plus d’une dizaine de broue-pubs dynamiques et d’une équipe établie localement à l’année. Le défi de percer le marché alsacien était comparativement considérable.

Malgré une certaine vivacité brassicole au pays des Bordeaux, Champagne et autres Bourgogne, celle-ci semble demeurer principalement régionale. Les amateurs qui portent attention à ce qui se passe à l’étranger peuvent facilement obtenir une foule d’information sur les brasseries et événements se déroulant aux États-Unis, en Italie, au Royaume-Uni ou encore au Danemark. En France, outre quelques exceptions, les brasseries exportent peu et ne semblent pas avoir l’ambition de communiquer avec la communauté brassicole internationale.



En ce sens, la discrétion relative des brasseries françaises les rend attirantes pour le Coureur des Boires en visite. En voyage, on veut bien admirer la Tour Eiffel, mais il n’y a rien de mieux que d’avoir la sensation de défricher le terrain méconnu. Or, en plus d’une grande quantité de produits que nous avons majoritairement déjà croisé à l’édition de Montréal, le Mondial strasbourgeois permettait justement d’explorer le portfolio de plusieurs brasseries françaises dont nous n’avions jamais entendu parler et d’autres que nous avions hâte de découvrir depuis plusieurs années comme Le Brewery, brasserie normande respectée pour ses recettes inspirée de l’Angleterre natale de ses fondateurs. La Norman Gold, servie en cask s’il vous plaît, était particulièrement réussie avec ses saillants houblons citriques.



Un kiosque particulièrement intéressant était celui du Front hexagonal de libération de la bière artisanale regroupant quelques artisans français particulièrement audacieux : Fleurac, des Garrigues, Le Paradis, Pleine Lune, La Franche. Les bières françaises traînent la réputation d’être chiches en houblon et les brasseries associées de ce Front lancent un véritable coup de fronde à cette étiquette parfois justifiée. Entre les blondes de soif très amères – La Franche de la brasserie homonyme était assurément un coup de coeur du genre - les IPA et les bières fortes foncées, nous nous serions cru dans une excellente microbrasseries américaine.

Évidemment, c’était aussi l’occasion de revisiter plusieurs classiques du Nord dont la tradition des bières de Garde est presque jumelle à la vision belge du brassage où les normes stylistiques sont délaissées et les levures, exploitées au maximum. Les Annoeuillin et autres Saint-Germain valent toujours le détour. En tout, une quarantaine de brasseries françaises étaient représentées sur les lieux, ce Mondial représentant une fenêtre unique sur la scène française souvent négligée par rapport à des voisins plus visibles. Pour cette raison, si ce festival persiste et affiche une croissance similaire à celui de Montréal, il représentera de plus en plus le tremplin logique pour explorer ce monde méconnu. Et contrairement au festival de Montréal, si vous n’avez pas le temps d’essayer tout ce qui vous intéressait, vous pouvez encore acheter la majorité des produits à la boutique du festival avant de sortir : imagineriez-vous pareille situation à Montréal!



31 oct. 2011

Des bocks, des bières sauvages et des Double IPAs... allemandes!

Les Importations Privées Bièropholie récidivent avec une surprise de taille… Des bières allemandes !! Puisque c’est la saison des Bocks qui commence à poindre à l’horizon - et que ces lagers charnues pourront survivre aux délais de la SAQ contrairement aux lagers de soif plus fragiles - nous aurons maintenant accès à une aguichante sélection pour faire taire ceux qui croient qu’il n’y a que de la Pils en terre germanique. Voici nos habituels commentaires afin d'éclairer vos choix:


Spezial Rauchbier Bock : Une lager fumée bien dodue, mettant en vedette les malts Munich autant que le malt d’orge fumé au bois de hêtre. Un des chefs d’œuvres de la brasserie Spezial, de Bamberg.

Fischer Bockbier : Cette minuscule brasserie de Greuth, dans la campagne au sud de Bamberg, nous offre leur saisonnière d’hiver, une Dunkler Bock. Si vous aimez la Bockbier de l’Amère à Boire, par exemple, celle-ci risque de vous séduire.

Andechser Bergbock Hell : Une Heller Bock, ou si vous préférez, une version dorée et forte de la lager phare du monastère d’Andechs, à l’ouest de Munich. Sophistication et richesse sont au rendez-vous.



Andechser Doppelbock : Une des rares Doppelbocks bavaroises à ne pas sombrer dans les sucres résiduels. Ici, les fruits confits s’adjoignent aux malts légèrement torréfiés, créant un exemple des plus complexes. Un chef d'oeuvre.

Hümmel Bräu Raucherator Doppelbock : Un de nos premiers coups de cœur de la Franconie. À tous les hivers, la petite brasserie Hümmel, du village de Merkendorf, fait une Doppelbock… fumée ! Jamais excessive, mais tout de même très généreuse d’elle-même, les saveurs de cette Doppelbock savent rallier les amateurs de bières fumées et ceux qui aiment la sagesse des malts Munich sveltes.

Braustelle Trippelbock : Une étrange créature, cette Heller Bock plus forte que la moyenne. Des malts miellés gargantuesques se fondent en une finale très fruitée et acidulée. Comme si cela ne suffisait pas, cette brasserie hèle de Cologne, là où toutes les brasseries s’affairent à brasser de la Kölsch, et que de la Kölsch. « Twilight Zone » en allemand, ça se dit comment ?

Opus Pontifikator, Opus Zwanzentinus et Opus Weltschmerz : Vous n’avez jamais entendu parler de ces bières ? Nous non plus ! C’est tout simplement parce que ces produits du brasseur de Braustelle, à Cologne, n’ont toujours pas vu le jour. Nous espérons que ces trois bières soient prêtes à temps pour notre commande, mais nous ne pouvons être garants de leur grande qualité puisque personne n’y a goûté à ce jour. La première est une Doppelbock vieillie en fût de chêne, la deuxième est une Weizenbock aux fruits(!?) et la troisième est une version glacée (Eisbock) de la deuxième. Intriguant, n’est-ce pas ?

Et ce n’est pas tout ! Imaginez-vous donc qu’il y existe certains brasseurs en Allemagne qui font fi de leurs traditions brassicoles et qui osent concocter des styles anglais et, surtout, américains. Oui, oui, des Double IPAs et Imperial Stouts allemandes ! 

Hopfenstopfer Citra Strong Ale : Des fruits tropicaux explosifs batifolant dans un corps longiligne, réchauffé par l’alcool. Un bel exemple de ce que le cultivar Citra peut offrir.



Hopfenstopfer Chinook Strong Ale : Croyez-le ou non, cette brasserie du Baden-Württemberg a brassé… une Imperial Black IPA !! Elle aussi est plutôt bien construite, présentant toutes les saveurs résineuses que l’on connaît au cultivar Chinook, aux côtés de chaleur d’alcool.

Hopfenstopfer Amarillo Strong Ale : Leur troisième bière d’inspiration américaine est une Double IPA dans les règles de l’art. Malts blonds construisant quelques saveurs miellées, capables de supporter les facettes résineuses et fruitées du cultivar Amarillo.

FritzAle Imperial IPA : Un autre brasseur allemand qui se lance dans l’aventure des houblons américains. Non mais, c’est à rien n’y comprendre. L’embouteillage de cette Double IPA est tout récent, alors nous n’avons toujours pas dégusté cette création. Si on se fie à la rigueur inhérente aux allemands, elle devrait être dans les règles de l’art.

FritzAle Imperial Stout : Une des premières Imperial Stouts allemandes. Toute jeune elle aussi, alors peu de gens l'ont dégustée. Nous ne pouvons rajouter nos commentaires puisque cette gamme de produit n’était toujours pas embouteillée à notre dernière visite au pays, l’été dernier.

FritzAle Barley Wine : Décidément, ce brasseur fait tout pour s’attirer les foudres des clients réguliers s’attendant à des lagers faciles à boire. Nous lui souhaitons beaucoup de succès… et de courage afin de   convertir certains buveurs de sa contrée.

Uerige Doppelsticke : Ah, une des plus grandes maisons de la bière en Allemagne cette Uerige ! Voici leur bière forte, créée pour le marché américain il y a quelques années. Si vous aimez les vins d’orge, cette bière vous offrira toutes les notes caramélisées que vous adorez, toujours équilibrées par des saveurs de houblons herbacés. Un Barley Wine, mais à partir d’ingrédients allemands? Pourquoi pas !

Vous en redemandez ? Ce que vous êtes gourmands ! Puisque Importations Privées Bièropholie, comme vous, aiment friser la décadence, voici un troisième volet à cette commande toute germanique. Cette fois-ci, on navigue dans les fermentations sauvages. Berliner Weisses, Lichtenhainers (version fumée de la Berliner Weisse), Porter avec brettanomyces et Gose sont au menu. Pour l’amateur d’acidité, de sècheresse et de saveurs animales… Amoureux de lambics belges aussi, voici des styles allemands qui s’apparentent à vos chères bières sûres du Payottenland :

Freigeist Abraxas : Ce brasseur a décidé de ressusciter un style éteint : la Lichtenhainer. Ce type de bière est en quelque sorte un cousin de la Berliner Weisse ; sauf qu’elle est conçue avec une généreuse portion de malts fumés. Sur papier, l’expérience peut paraître étrange. En bouche… aussi. Imaginez une limonade bien acide, très gazéifiée, avec des effluves de fumée ici et là. Vraiment. 



Freigeist Abraxxxas : Alors que la Abraxas avec un « x » titre 3,8% d’alcool, cette version « xxx » dépasse les 6%. Elle offre une palette de saveurs aussi particulière, sauf qu’elle se prête moins aux grandes soifs. Plus intense, elle évoque plus les Rauchbiers, mais elle se conclut tout de même avec des notes acidulées.

Freigeist Deutscher Porter : Un autre style disparu qui renait de ses cendres grâce à Freigeist. Une bière noire de l’ancienne Allemagne de l’est, brassée avec une touche de sel et fermentée avec des levures sauvages… Vous voulez tester les limites de vos papilles ? Cette bière risque de vous faire voir de toutes les couleurs. Nous avons accès à trois versions différentes : la version « régulière » (toussetousse), la version mûrie en barriques de bois ayant contenu du brandy de prunes, et la version vieillie en barriques de bois ayant contenu du brandy de cerises.

Bayerischer Bahnhof Gose : Un des styles les plus étranges de la planète-bière : la Gose. La base est une bière de blé ressemblant à la Berliner Weisse, mais bénéficiant d’un ajout de coriandre et de sel(!). Le résultat est très rafraichissant, dû à la sècheresse, l’effervescence et la finale acidulée. Un beau produit pour découvrir ce style en voie d'extinction.

Bayerischer Berliner Weisse : Cette même brasserie tente de raviver un autre style presque moribond : la Berliner Weisse. Nous avons accès à deux versions de la même bière. Une plus traditionnelle, qui n’a pas recourt à des levures sauvages rajoutées, et une version dont la fermentation est complétée à l’aide de brettanomyces. Une superbe façon de s’éduquer sur les effets des lactobacilles et des levures sauvages de type brettanomyces.

Bayerischer Leipziger Porticus : Un autre exemple de ce vieux type de Porter fort brassé jadis en Allemagne de l’est. L’addition de brettanomyces peut paraître surprenant suite aux saveurs rôties, surtout qu’une finale acidulée nettoie le tout en bouche.

Bayerischer Gose Doppelbock : Une toute nouvelle version forte de la Gose traditionnelle. Peu d’allemands y ont goûté encore. Nous aurons la chance de le faire avant la grande majorité d’entre eux !

Talschänke Wollnitzer Weissbier : Une autre des rares Berliner Weisses à être encore brassée régulièrement en Allemagne. Cette toute petite brasserie loin de tout centre urbain produit cette sublime bière de blé, peut-être plus satisfaisante que n’importe quelle autre du style produite en Allemagne (quoiqu’il y en a très peu de nos jours). Ne vous laissez pas avoir par le nom « Weissbier ». Elle est bel et bien blanche, mais c’est une Berliner Weisse acide et hyper rafraichissante.


Dollnitzer Ritterguts Gose : Voici un des derniers exemples de la Gose toujours brassé en Allemagne. Celui-ci est peut-être plus savoureux que la version de Bayerischer Bahnhof, tout en demeurant rafraichissant et intriguant. Ce style, comme tous les autres dans cette troisième section de la commande d’Importations Privées Bièropholie, est une merveilleuse façon de s’ouvrir l’esprit… tout en faisant voyager nos papilles vers une époque où la fermentation n’était pas entièrement comprise des brasseurs.

Prost!

25 oct. 2011

Les joyaux de la campagne franconienne - Forchheim


Forchheim est un des arrêts majeurs du train menant de Bamberg à Nuremberg. À environ 30 minutes de Bamberg, la petite ville devient un choix facile lors d’un premier séjour dans la région. En plus d’être munie d’un centre historique charmant, Forchheim compte sur 4 brasseries artisanales (Greif, Neder, Hebendanz et Eichhorn) pour ses 40000 habitants. Plusieurs banlieues québécoises devraient en prendre note… Voici donc nos coups de cœur de cette ville et de ses environs qui, vous l’aurez deviné, regorgent de lagers de haut calibre.

Croyez-le ou non, il y a 3 brouepubs dans cette photo

Brauerei Neder

Notre première visite ici, il y a plus de 5 ans, fût un choc. Du moins, c’est ce que raconte ma conjointe… Premièrement, l’endroit était bondé d’hommes. À part la serveuse risiblement prise dans les modes des années 80, la clientèle du pub semblait tout droit sortie d’un film Western mettant en vedette des hors-la-loi d’une hygiène douteuse. La fumée, aujourd’hui disparue due aux nouvelles lois anti-tabac en vigueur dans la région, flottait au-dessus de nos têtes et les regards cernés, aux sourires trop souvent édentés, nous fixaient comme si nous venions de nous attabler à une réunion secrète d’anciens braqueurs de diligence. Bref, peu de touristes fréquentent Brauerei Neder… Somme toute, le brasseur de l’endroit maitrise son art à la perfection. Sa Kellerbier est juteuse et bien houblonnée et sa Schwarze Anna ravit de ses saveurs rôties dans un corps svelte.

Brauerei Hebendanz

Il ne suffit que d’apercevoir une seule fois le brasseur moustachu dans sa minuscule voiturette de livraison afin de comprendre l’essence de cette brasserie sise en plein centre de Forchheim. Alors que la majorité des brasseurs de la région misent sur un respect des traditions et des ingrédients locaux, le propriétaire excentrique de cette Brauerei Hebendanz préfère inviter les gens de caractère dans son brouepub. Sa Festbier ne ressemble d’ailleurs à aucune autre bière disponible en Allemagne (saveurs de caramel brûlé et de pain toasté dans un corps digne d’une Dunkler Bock). Bien que sa Vollbier blonde, celle que tout le monde boit, n’ait rien de mémorable et que la cuisine du pub manque un tant soit peu de verve, une personnalité indéniable imprègne les lieux. Entouré de rats de taverne, un peu comme Brauerei Neder à quelques pas de là, on se sent témoins d’une autre époque et ce, autant socialement qu'esthétiquement. Messieurs, ne cherchez pas les urinoirs dans les toilettes des hommes. Visez plutôt… ses murs. Une rigole au plancher fera le reste du travail…

Nikl-Bräu

À Pretzfeld, village en banlieue de Forchheim, une toute nouvelle brasserie artisanale fait pignon sur rue, à la grande joie (et surprise) de tous dans la région. Il y a bel et bien 300 brasseries en Franconie, nombre des plus impressionnants pour une région des mêmes dimensions que la grande région métropolitaine de Montréal, mais il faut savoir que ce nombre est en baisse constante depuis quelques décennies. Qui plus est, cette Nikl-Bräu conçoit des lagers non filtrées de haut niveau, en plus d’offrir des bières saisonnières alléchantes, telle la Rauch Heller Bock qui est servie à l'automne. À noter que les schnitzels de la maison sont facilement parmi les meilleurs que nous ayons eu la chance de goûter. Amateurs d’alcools forts, sachez aussi qu’une micro-distillerie œuvre de l’autre côté de la rue. Plusieurs kirschs, entres autres, y sont fabriqués.

La "Kellerwald"

Tout juste en périphérie du centre de Forchheim, cette colline boisée est un haut-lieu de la lager franconienne. La « forêt des kellers » propose exactement ce que son nom suggère. Une panoplie de kellers, ces petites cabanes entourées de tables de pique-nique ancrées sur une butte de terre sous laquelle on entrepose la bière au frais, se succèdent dans toutes les directions. Chaque keller est mandaté par une brasserie afin de servir ses bières. Certaines brasseries, comme Wölfshöher, en possèdent plus qu’un. En tout cas, l’été particulièrement, il est possible de visiter les kellers de 10 brasseries différentes sans marcher plus d’un kilomètre dans les bois. C’est ici aussi qu’a lieu le Annafest ; une fête foraine qui ressemble grandement à ce que l’Oktoberfest était avant de devenir la gigantesque foire commerciale qu’elle est maintenant. Nous vous en parlions dans une édition précédente du journal Bières et Plaisirs.


La semaine prochaine, nous nous dirigeons vers Munich afin de conclure ce tour de l'Allemagne brassicole. Snif!

18 oct. 2011

Une India Pale Ale historique à la brasserie Albion, de Joliette

Photo gracieuseté de la brasserie Albion

Décidément, le Québec foisonne de brasseurs inspirés. Vous voulez un autre exemple? D'ici quelques semaines, à Joliette, une E.I.P.A. 1839 fera son apparition à la brasserie Albion.  C'est suite à la lecture du bouquin de Pete Brown "Hops and Glory", que Steven Bussières, maître-brasseur du Albion, a décidé de recréer une India Pale Ale de 1839, une bière telle que les anglais envoyaient à leurs compatriotes stationnés en Inde. Aucune autre brasserie sur la planète a, à ce jour, soumis une bière à de telles conditions dans le but de comprendre ce que les buveurs de l'époque pouvait déguster. 

Rigoureux à toutes les étapes de son aventure, Steven a su aller au-delà de la recette originale du 19e siècle (que vous pouvez admirer ci-dessous) afin que l'expérience soit des plus pédagogiques. Puisque ces bières étaient mises sur des bateaux pendant près de 4 mois avant d'arriver à bon port et d'être bues goulûment, il a dû aussi, par souci scientifique, recréer les conditions dans lesquelles ces barils séjournaient. Donc, la température de conditionnement, comme celle sur les bateaux en direction de l'Inde, a oscillé entre 30 et 45 degrés Celsius pendant 4 mois. De plus, un système a été confectionné dans le but d'imiter les mouvements constants d'un bateau en mer; parfois doux et parfois violents.

La recette originale de cette India Pale Ale de 1839


Les barils utilisés pour la bière étaient en chêne; des barils desquels le plus de tannins possibles avaient été enlevés au préalable. Après ce périple mythique, la E.I.P.A. 1839 a reposé une semaine au frais, pour ensuite être embouteillée et refermentée en bouteille. 

Deux autres versions de la même bière ont aussi été conçues en même temps, rehaussant l'aspect pédagogique. Une des deux a subi les mêmes conditions extrêmes, mais à partir d'un cask en métal. Celle-ci sera servie au bar directement du baril, par une pompe manuelle. La troisième et dernière version de cette bière n'aura pas vécu les mêmes soubresauts de conditionnement. Celle-ci sera servie en fût standard et servira donc de bière "témoin". 

Le résultat? Les chanceux qui pourront se déplacer à Joliette pour le dévoilement de cette expérience le 26 novembre sauront en témoigner. Pour l'instant, Steven nous a confié que la version embouteillée, après le traitement houleux, avait fermenté davantage dans le baril de chêne. Nous goûterons donc à une version plus sèche et peut-être même sauvage de cette IPA. Il ne faut pas s'attendre à un arôme houblonné explosif, même si une quantité astronomique de houblons en cônes a été utilisée. Vos humbles serviteurs ont d'ailleurs bien hâte de percevoir le niveau d'oxydation présent dans la version d'origine et surtout de faire la dégustation comparative. Un gros merci à Steven et son équipe de contribuer ainsi à l'éducation de l'amateur de bières québécois!






12 oct. 2011

Les joyaux de la campagne franconienne - 3e partie



Une telle concentration de brasseries artisanales de qualité n’existe nulle part ailleurs sur la planète. Si vous avez manqué les deux premières parties de notre survol de la campagne franconienne, cette région du nord de la Bavière garnie de non moins de 300 brasseries, vous pouvez les lire ici et ici. Le billet actuel se concentre sur les brasseries aux abords du village d'Aufsess, un fier bled qui fait partie du livre des records Guinness. Bien qu’elle ait profité d’une entourloupette législative pour paraitre dans ce livre (les fusions municipales sont importantes ici également...), cette bourgade peut se vanter d'avoir non moins de 4(!) brasseries afin d’abreuver ces quelques 4000 citoyens.  Voici donc nos coups de cœur de cette région environnante qui, bien sûr, comporte bien plus que 4 brasseries artisanales.

Kathi-Bräu, à Heckenhof, tout juste à l’extérieur du centre d’Aufsess


Ce repaire grouille de motards lorsque Mère Nature est clémente. Phénomène inexplicable, puisque la petite maison fleurie et son emplacement au fin fond de la campagne franconienne ressemblent beaucoup plus à une carte postale pour retraite du « bel âge ».  La clé du succès ici réside peut-être dans la bière maison, brassée jusqu’à tout récemment dans un équipement centenaire avec courroies en cuir et cuves chauffées au bois. La lager noire de Kathi-Bräu est houblonnée comme peu de bières le sont en Allemagne; un nord-américain n’oserait jamais utiliser le mot « intense » afin de la décrire, mais les allemands la trouvent tout de même très racée. Une lager rustique qui ne se gêne pas pour exhiber ses forces...

Brauerei Reichold, à Hochstahl, aussi tout juste à l’extérieur du centre d’Aufsess


Des effluves de purin rejoignent fréquemment les tables de pique-nique et les véhicules récréatifs stationnés derrière la maison de cette brasserie familiale donnant sur l’unique rang du village. Les visiteurs ici semblent moins imposants que la foule ayant adopté Kathi-Bräu et la bière reflète cette recherche de tranquillité. La Zwickl rafraichit de sa délicatesse, étalant des notes toastées dans un corps presque sec équilibré par une finale herbacée. La bière phare de la maison, la Reichold Lager, répète la même formule, rajoutant quelques saveurs de houblon poivré dans un corps des plus douillets qui semble miser un peu plus sur des malts Pilsener. On s'imagine facilement en train d'installer un hamac sur les lieux.

Held-Bräu, à Oberrailsfeld


Une autre maison familiale possédant un petit restaurant et un pub au premier étage, en plein centre d’un village des plus paisibles. Le chat de la famille vous passera entre les jambes dès votre première gorgée ; c’est le seul service aux tables dont vous bénéficierez l’été. C'est qu'il faut aller chercher sa bière à l’intérieur où la maman lave les verres et soutirent les pintes derrière son petit comptoir. La Helles ici est le théâtre d’une symbiose parfaite entre malts Pilseners savoureux, houblons épicés, sucres résiduels maigres et gazéification douillette. Elle donne sérieusement le goût d’aller se recueillir dans la chapelle faisant face à la brasserie. La Dunkel jouit d'autant de raffinement, partageant des saveurs de malts rôtis et de fumée sur des notes fruitées et des sucres toastés. Un des bijoux les plus séduisants de toute la campagne franconienne cette Held-Bräu.

Le four antique de la maison Held 

Si vous avez lu les articles précédents sur le sujet, vous vous doutez sûrement qu’il y a plusieurs autres brasseries aux alentours qui méritent aussi d’être visitées. Effectivement, à quelques kilomètres de là, vous trouverez la Brauerei Krug à Breitenlesau, et ses lagers brunes mémorables, la Brauerei Stadter à Sachsendorf, faisant partie de l’arrondissement d’Aufsess et contribuant donc à ce record Guinness, la Brauerei Hetzel à Waischenfeld et son sombre bar peu retouché depuis le 19e siècle, la Brauerei Rothenbach, à Aufsess même, et sa cuisine saisonnière riche, et la Brauerei Schroll, à Nankendorf. Encore une fois, le vélo est presque trop rapide pour se rendre d'une brasserie à une autre...


La semaine prochaine, on revient vers l’ouest, direction Forchheim, petite ville franconienne de 40000 habitants, avec 4 brasseries et non moins de 19 kellers représentant plus de 10 brasseries!