29 juil. 2011

Les bières de Rulles et Abbaye des Rocs disponibles en importation privée

Poursuivant ses habitudes qui consistent à nous faire déferler des tonnes de bières belges de qualité sur le palais, le club Importations Privées Bièropholie nous offre ce mois-ci l’occasion de mettre la main sur deux brasseries wallones d’excellence. Voici le lien: http://www.bieropholie.com/formulaires/Yowie/Commande_OGC.htm

La première, Rulles, produits des ales rustiques typiques de la région. À notre avis, leurs ales blondes sont particulièrement réussies. Le saviez-vous? La maison utilise la même levure qu’Orval !

La deuxième, Abbaye des Rocs, produit des ales très fruitées, épicées, souvent vineuses et fortement levurées. À notre avis, leurs ales brunes sont particulièrement réussies.

LA RULLES

La Rulles Blonde
Cette ale blonde est l’archétype de la blonde wallone, très fraîche, relativement sèche, délicatement houblonnée, extrêmement digeste avec juste ce qu’il faut d’acidité et d’amertume. Un équilibre exemplaire. Pour les amateurs de St-Feuillien Blonde, Charlevoix Dominus Vobiscum Blonde, Witkap Pater Stimulo.

La Rulles Brune
Le pendant brun se montre légèrement rôti, présentant des nuances de noisettes et de chocolat. La levure apporte d,agréables touches fruitées, alors que les houblons se montrent plutôt loquaces, ponctuant le tout de leurs états d’âme rappelant la marijuana. C’est loin d’être une bière digestive de méditation, mais au risque de nous répéter, bel équilibre. Pour les amateurs de St-Feuillien Brune, Floreffe Brune, Dupont Moinette Brune.


La Rulles Triple
La levure d’Orval à laquelle nous avons référé précédemment est probablement particulièrement notable dans cette Triple au généreux houblon citronné dont l’alcool s’intègre avec subtilité. Fruits tropicaux et malt miellé s’entend comme postérieur et chaise. La douce effervescence rend la texture presque crémeuse. Pour les amateurs de St-Feuillien Triple, Unibroue La Fin du Monde.

La Rulles Estivale
Une blonde belge de la dernière mode, une espèce de Saison tout en houblon et ceux servant l’arôme sont américains. Elle saura plaire à ceux qui recherchent un compromis entre la Chouffe Houblon et de la Schneider Hopfenweisse toutes deux disponibles à la SAQ. Magnifique bière d’été et peut-être dans le top 10 belge de l’auteur de ces lignes. Pour les amateurs de Orval, Taras Boulba, De Dolle Arabier, Dieu du Ciel! Dernière Volonté.

La Rulles Cuvée Meilleurs vœux
La bière de Noël de Rulles se présente sous un apparat terra cota d’où émanent des notes épicées rappelant la muscade et le clou de girofle, mais intégrés avec subtilité, selon la pratique usuelle de la maison. Relativement sèche dans le genre, elle n’en demeure pas moins richement fruitée et particulièrement à l’aise en accompagnement de bœuf braisé ou grillé.

La Rulles Jean Chris
Une autre blonde rustique, tirant vers l’ambré, aux houblons mentholés et épicés. Conserve le caractère léger et plutôt sec typique de Rulles tout en affichant une présence légèrement plus soutenue de ses malts rappelant le pain frais et le toast. Pour les amateurs de Brouhaha Cuvée des Saveurs, Benelux Semuta.

La Rulles La Grande 10
Une blonde nettement plus costaude avec ses 10%, mais ceux-ci n’y paraissent somme toute presque pas si ce n’est qu’ils éteignent légèrement les houblons plus méritoires des Blonde, Triple et Estivale. Ici, le malt aux intonations de pain et de grain se montre plus imposant, alors qu’une gamme bien développée de flaveurs fruitées se succèdent. Pour les amateurs de feu Unibroue La Fringante et les cuvées d'anniversaire d'Unibroue.


ABBAYE DES ROCS


Des Rocs Brune
Une brune d’une grande complexité, jouant sur tous les terrains, celui de la levure certes, phénolique et richement fruitée, mais aussi celle du malt et du sucre candi, encore fruité et aux notions de réglisse, de vanille. L’effervescence vigoureuse calme habilement les sucres résiduels. Ce qu’il y a de remarquable avec le porte-étendard de Des Rocs, c’est son étonnante complexité qui ne se traduit absolument pas par la « claque dans la face » d’intensité propre à des brasseries moins gracieuses. Pour les amateurs de feu Vondel, Trois Pistoles plus poussiéreuse


Des Rocs Grand Cru
Le Grand Cru de la maison se frotte bien aux Trappistes en terme de complexité des malts foncés et de la levure, en étant toutefois beaucoup plus rustique, moins net et facile que les Rochefort de ce monde. D’une grande complexité épicée et fruitée, ce grand cru se montre derechef floral et d’une texture riche et soyeuse.


Des Rocs Montagnarde
L’ambrée de la maison est une véritable salade de fruits au sirop d’érable sur toast complémentée par des houblons bien gazonneux. La douce acidité et l’efficace effervescence rendent ses 9% trompeurs.



Des Rocs Triple Impériale
Dans la lignée typique des Abbaye des Rocs, cette Triple Impériale explose de malts caramélisés et levure épicée et fruitée. L’étonnante complexité rappelle tantôt la tarte aux pacanes, tantôt la confiture aux raisins. Au final, elle s’avère une version plus épicée et intense de la Brune qui semble peut-être redondante dans la gamme de la maison, mais plusieurs la préfèrent malgré tout à celles qui l’ont précédée.


Des Rocs Blonde (La Nounette)
Une blonde phénolique et riche aux notes de bonbon et gâteau aux épices. Ses malts pâles bien biscuités soutiennent une belle complexité. Ceux qui recherchent une blonde sèche à boire à la pinte feraient toutefois mieux de s’abstenir.


Des Rocs Blanche des Honnelles
Une remarquable Blanche qui se distingue par sa vive effervescence, son houblonnage bien soutenu et son caractère de levure nettement plus complexe que la moyenne des blanches. Une des blanches belges les plus captivantes. Elle reprend les paramètres habituels du style, mais semble y ajouter un étagé de personnalité à tous les niveaux. Pour les amateurs de St-Bernardus wit, Hitachino white




Des Rocs Noël
D’une brasserie spécialiste des bières belges brunes, nous nous attendons à ce que la bière de Noël représente un coup d’éclat. Bien que loin d’être ordinaire, elle reprend beaucoup des caractéristiques de ses consœurs en se montrant au final surtout plus sucrée et plus épicée que ces dernières.

25 juil. 2011

Les meilleures Kölsch de Cologne - 2e partie

Une partie de la vieille Cologne, vue de la promenade le long du Rhin
En déambulant dans les rues de Köln, l'amateur de bière remarquera sûrement l'omniprésence des insignes aux murs de bars et restaurants affichant la marque de bière servie à chaque établissement. Vous verrez des noms tels Sünner, Sion, Gaffel, Gilden, Reissdorf, etc. Toutes ces Kölsch sont impeccables au niveau de l'exécution, mais plusieurs manquent de verve, semblant viser un marché plus vaste. Il n'est pas rare de voir des touristes rajouter de la limonade dans leur verre de bière ici, alors on peut s'attendre à ce que certains brasseurs offrent une Kölsch quasi-insipide afin de plaire à ce marché inévitable...

À part les deux brasseries coups de coeur décrites dans l'article précédent de ce guide de voyage brassicole, quatre autres Kölsch, à notre avis, se démarquent du lot, frisant l'excellence lorsque fraîches. Le brouepub Braustelle, dans le quartier d'Ehrenfeld, produit une rutilante version non filtrée de la Kölsch, une bière autrefois appelée "Wiess" dans le dialecte local. Malheureusement, la qualité des minuscules brassins de Brastelle est très variable, alors nous préférons ne pas lister ce brasseur dans nos priorités. Nous devons réserver une mention bien spéciale aussi pour le brouepub Weissbräu zu Köln qui rouvre à nouveau suite à plusieurs changements de noms et de propriétaires dans les dix dernières années. Une visite il y a six ans nous a hautement impressionnée, mais nous aimerions revérifier avant de louanger à nouveau. L'ancien brasseur devrait revenir au fourquet dans les prochaines semaines, si ce n'est déjà fait... Donc, pour l'instant, les 4 brasseurs de Kölsch suivants méritent d'être visités en priorité si vous avez plus qu'une journée à passer à Cologne:


Brauhaus Schreckenskammer, au 11-15 Ursulagartenstrasse
Le pub de Schreckenskammer fait face à une coquette église

Peu de touristes marchent en direction nord en sortant de la gare centrale de Cologne. C'est une des raisons pour laquelle vous ne trouverez pas de groupes d'américains criards ici. Que des locaux fréquentent la "chambre des horreurs" (la traduction de "Schreckenskammer"), un pub de quartier donc qui possède tout sauf des aptitudes repoussantes. La Kölsch de la maison est croustillante et équilibrée, étalant de belles notes miellées chatouillées par des houblons herbacés peu amers. Une bière de soif méritoire, quoi. Vous pouvez bien sûr enfiler des petits verres de 200ml ici toute la soirée, comme dans tout pub de Cologne qui se respecte, mais vous pouvez aussi vous en faire servir quelques litres dans un girafe, ces hauts contenants longilignes contenant plusieurs litres, munis d'un robinet pour service à sa table. 


Peters Brauhaus, au 1 Mühlengasse


Certains puristes ont avalé de travers lorsque Peters a récemment été achetée par une plus grande brasserie responsable de plusieurs marques de Kölsch plutôt inintéressantes garnissant les menus de multiples restaurants en ville. Qu'à cela ne tienne, la qualité de la Kölsch ici est toujours impeccable. De belles petites courbes miellées enveloppent encore les pointes houblonnées épicées. En fait, elle est étonnamment similaire à la Schreckenskammer à plusieurs niveaux. Elle bénéficie peut-être d'une rondeur supplémentaire. De plus, le restaurant à l'adresse ci-dessus impressionne autant par la qualité de sa boustifaille que par son décor élaboré à chaque pièce. On prend plaisir à y revenir et ce, pour de longues heures en bonne compagnie.

Brauerei zum Pfaffen, au 62 Heumarkt

Il y a quelques années, deux membres de la famille Päffgen, propriétaires de la Hausbrauerei Päffgen, se sont disputés. Triste histoire, mais une nouvelle brasserie est née de la querelle, au grand bonheur de tout amateur de Kölsch. Il faut bien voir du positif dans toute chose, n'est-ce pas? Pfaffen possède un resto-pub dans le vieux Cologne et offre bien évidemment sa propre Kölsch, mais aussi une Weizen l'été et une Bock au printemps. Lors de notre première visite il y a quelques années, la Kölsch était d'une fraicheur céréalière irréprochable, mais lors d'une visite subséquente, elle s'était affadie, semblant paresseuse, sucrée. Il se peut fort bien que la soirée très peu achalandée ait pu être coupable de ce baril moins en forme, la Kölsch étant très fragile.

Früh am Dom, au Am Hof

En contourant l'immanquable cathédrale de Cologne, vous vous retrouverez fort probablement en face d'une des brasseries de Cologne; Fruh am Dom. Sa terrasse, photographiée ci-dessus, attire bien des touristes l'été, mais l'intérieur du restaurant est tout aussi aguichant avec son labyrinthe de pièces empreintes de caractère. Bien que sa cuisine soit ordinaire, Fruh brasse une Kölsch rafraichissante et croustillantes avec pointe houblonnée herbacée plaisante. Un bel exemple du style, sans toutefois être un des grands crus de Cologne.

PS. Cet article est la suite d'un billet présentant nos brasseries préférées de Cologne, que vous pouvez lire en cliquant ici.

La semaine prochaine, on vous transporte vers Düsseldorf afin d'y déguster ses Altbiers.

19 juil. 2011

Revue de littérature estivale

Pour quiconque ne s’avérant pas victime de cette malchance extraordinaire qu’est celle d’avoir des amis, l’été constitue un moment privilégié pour rejoindre toute cette importante portion de la civilisation qui s’éloigne de la civilisation pour lire un livre dans un parc. Récemment, quatre ouvrages brassicoles sont parvenus à capter notre attention le temps que nous en déchiffrions les mots écrits dans cette langue qu’est l’anglais. Vous excuserez notre égarement ; ces livres ne sont malheureusement pas disponibles en français. Ceci permet peut-être d’ouvrir une petite parenthèse… La littérature brassicole en français est parfois désolante. Outre l’inépuisable ami D’Eer, peu d’auteurs récidivent au-delà d’un livre. C’est à croire qu’ils s’attendaient à faire de l’argent en vendant des livres en français. Ne se contentent-ils pas des nombreux fans qui viennent faire la file pour se faire dédicacer une copie alors qu’ils sirotent une énième pinte ? Sont-ils déjà saturés, après une seule impression, du flot d’amour insurmontable que leur véhicule le public où qu’ils passent ? Sont-ils à ce point las d’autographier buste après buste d’amatrices révélatrices ? Enfin, toujours est-il que du côté anglophone, quelques ouvrages de qualité voient le jour chaque année, notamment quant au brassage maison. Nous avons lu les quatre suivants au cours des derniers mois.

Yeast : the practical guide to beer fermentation, Brewers Publication, 2010, 300 pages

Cet ouvrage nous provient de deux auteurs amateurs de microscopes dont Chris White, cofondateur de White Labs, un des deux plus célèbres fournisseurs de levure. Le livre s’adresse clairement à un public de brasseurs. La première moitié explique le fonctionnement de la levure et comporte d’excellents passages sur les levures sauvages et bactéries qui devraient intéresser tout amateur de bière sauvage. La deuxième moitié traite surtout de trucs à toute sauce pour optimiser la gestion de la levure en passant par la constitution d’un laboratoire maison. Très intéressant pour un public somme toute niche.

Tasting beer: an insider’s guide to the world’s greatest drink, Storey Publishing, 2009, 248 pages

De Randy Mosher, auteur du désormais classique Radical Brewing, nous nous attendons désormais à beaucoup. Franchement, il livre la marchandise. En 248 pages, il aurait été difficile de faire mieux. Les premières sections sont une ode à la bière, célébrant son histoire, ses ingrédients, ses saveurs. Cette mise en table bascule vers une exploration succincte, mais nuancée et réussie sur les grandes familles de bière. Un peu à la sauce BJCP, mais franchement plus facile à digérer. Le tout transpire d’un véritable amour de la bière et d’un souci pédagogique inspirant. L’auteur étant graphiste, il supporte constamment ses élucubrations de très utiles et intuitifs tableaux. Bravo, concis et efficace !

Evaluating beer, Brewers Publication, 1993, 238 pages

Ce livre remonte maintenant à plusieurs années, mais sa lecture ou sa relecture apporte toujours quelque nouvel élément. Franchement, il s’agit plus d’un rassemblement d’articles liés au sujet de l’évaluation sensorielle d’une bière que d’un tout cohérent. Certaines sections se trouvent donc nécessairement plus agréables et intéressantes que d’autres. En revanche, tous les auteurs sont des sommités et la grande majorité des sujets abordés n’ont pas réellement évolués depuis si bien qu’une lecture occasionnelle s’impose pour les dégustateurs les plus sérieux.

How to Brew, Brewers Publication, 2006, 400 pages

La troisième édition du guide de John Palmer sur les bases du brassage comporte aussi certaines sections des plus intéressantes pour l’amateur-dégustateur. Entre autres, les sections sur l’eau, le malt, le houblon et la levure abordent un niveau de détail nettement plus profond que les livres qui s’adressent au consommateur plutôt qu’au brasseur. Pour le reste, l’approche très pragmatique en fait un ouvrage de référence à toutes les sauces pour les brasseurs, mais un peu trop technique pour le dégustateur moins sophistiqué.

15 juil. 2011

Les meilleures Kölsch de Cologne - 1ère partie

 Une infime partie de la cathédrale de Cologne

Impossible de ne pas rester indifférent en sortant de la gare de train de Cologne. L’extravagante cathédrale gothique s’y trouve à quelques pas seulement, perçant le ciel de ses incommensurables tours, écrasant tout passant sous le poids de ses détails. Le chaos architectural qui règne cependant sur le reste de la ville, majoritairement rasée lors de la seconde guerre mondiale, a de quoi étourdir et peut-être même décevoir toute personne en quête d’authenticité. Il ne faut pas se laisser leurrer par les façades souvent plus modernes. De véritables bijoux peuvent se retrouver derrière une devanture morne des années 50. Ce qui est parfait, puisque plusieurs des brasseries de Kölsch possèdent des pubs et restaurants dans lesquels on peut trouver de petites merveilles architecturales d'une pièce à l'autre.

 Statues et vitraux à l'entrée du restaurant de la brasserie Pfaffen

Une dégustation des multiples Kölsch de Cologne est aussi un retour aux sources pour les papilles d’un amateur de bière. Cette ville est l’endroit idéal pour aiguiser ses habiletés gustatives. En effet, ceux qui ne savent pas à quoi s’attendre pourraient trouver toutes ces Kölsch remarquablement similaires. Ce qui ne serait pas surprenant, puisque toutes les Kölsch des 15 brasseries de la ville sont conçues à partir de 90% à 100% de malts Pilsener (une portion de blé malté peut être utilisé aussi), toutes utilisent avec parcimonie des houblons nobles de Hallertau (ou Spalter Select et Tettnang), toutes fermentent à des températures plus élevées qu’une lager (les Kölsch sont donc des bières öbergäriges, c’est-à-dire de fermentation haute) et plusieurs sont conditionnées à même un baril de bois, gazéifiées de façon naturelle, sans bonbonne de gaz carbonique.

 Le service se fait dans de petits verres de 200ml
 
Commençons d'abord par vous présenter les deux brasseries qui produisent nos Kölsch préférées. Si vous ne disposez que d'une courte période de temps afin de visiter Cologne, nous vous sommons de déguster et même de boire(!) les deux nectars suivants. Nous vous souhaitons d'avoir autant de plaisir que nous à découvrir les subtiles différences entre toutes les Kölsch exposés dans nos deux articles sur le sujet.

Brauerei zur Malzmühle, au 6 Heumarkt

Une fois la vieille porte tournante franchie, on se retrouve dans le cœur de ce brouepub des plus traditionnels. Les boiseries foncées dominent, des chandeliers aux banquettes, des fenêtres aux barils de bière. La Mühlen Kölsch, justement servie par gravité dans ces barils, est définitivement celle en ville qui met à profit les malts Pilseners avec le plus d’éclat. Soyeuse, subtilement miellée et noisettée, elle se laisse prendre si facilement qu’on perd le compte des petits verres dégustés. Une chance que notre Köbes (serveur) fait des traits à chaque consommation sur notre sous-verre pour nous en rappeler. En plus d’être somptueuse dans son étalement malté et rafraichissante à souhait, la Kölsch ici est parfaite pour accompagner la cuisine traditionnelle de la région, de qualité irréprochable chez Malzmühle.
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Hausbrauerei Päffgen, au 64-66 Friesenstrasse

À ce jour, seulement 6 pubs à Cologne servent la Kölsch de Päffgen. L’original, à l’adresse ci-dessus, puis 5 autres d’où l’on peut se gaver d’un des plus délectables exemples du style sur la planète, toujours d’un baril de bois, servi par gravité. La Kölsch de Päffgen est douillette, parfaitement équilibrée et ses levures semblent bénéficier d’un peu plus d’espace dans le profil de saveurs que la moyenne du style, octroyant quelques délicats esters de bananes. Päffgen est aussi une des rares brasseries de Kölsch à ne pas embouteiller sa bière; ce qui nous convient parfaitement puisque ce n’est pas un style qui survit au voyage adéquatement. Un chef d’œuvre du style, nul doute. 

La semaine prochaine, 4 autres Kölsch des plus méritoires!

12 juil. 2011

Le Picoleur – salon de dégustation des Brasseurs du Monde



Le monde de la bière artisanale se porte probablement bien puisque St-Hyacinthe compte maintenant sur une deuxième microbrasserie sur son territoire. Ceci lui confère un nombre de brasseries par habitant nettement supérieur au bourg voisin qu’est Montréal, dans la mesure où nous ne considérons pas qu’un Maskoutain est nécessairement plus habitant qu’un Montréalais.



Peu de temps après son ouverture, nous avons visité le salon de dégustation Le Picoleur sur les lieux de la brasserie. Nous avons immédiatement été frappés par l’ampleur des locaux, établis dans un parc industriel qui fournira une portion importante du bassin de clientèle visé par les tenanciers d’un Picoleur relativement éloigné des principaux axes commerciaux de St-Hyacinthe. La brasserie est munie d’équipement neuf et d’un espace suffisant à faire rougir les plus beaux success stories microbrassicoles québécois. La capacité d’expansion n’est rien de moins qu’impressionnante pour un nouveau projet et manifestement, l’ambition est au rendez-vous pour la jeune équipe qui comporte plusieurs membres bien connus du milieu.



Au Picoleur, la sélection est pour l’heure limitée à une India Pale Ale qui a été servie au Mondial et la Bière et à la « Gamme Sympathique », trois bières, Blanche, Blonde et Rousse, bien exécutées, mais plutôt populistes afin d’aborder le marché sans froisser les gens. La Blanche, bien fraîche malgré ses épices peu subtiles, nous a paru la plus aboutie du lot. L’India Pale Ale ne fait pas dans le nuancé, sa base maltée étant corpulente à la manière de la plupart des exemples québécois et son amertume poignante dominant les composantes aromatiques de ses houblons. La Blonde et la Rousse s’avèrent des bières de soif honnêtes. Cependant, outre le penchant plus sec et rôti de la Rousse, elles ne se distinguent pas de façon marquée de leurs concurrentes, les principales étant les gammes de base d’AMB (moins propres et plus fruitées) et des Trois Mousquetaires (plus captivantes lorsque bien fraîches). Franchement, pour la blonde, c’est un peu dommage. Nous avions là un brasseur qui proposait une Blonde s'apparentant aux bières de fermentation basse, un concept qui avait tout pour plaire aux auteurs de ce blogue, mais bien que sans défaut, cette Blonde demeure peu expressive de ses malts et bien subtile de ses houblons tout en ne présentant pas la texture très sèche et croustillante des meilleurs exemples. Il semble que les excellentes blondes de base soit l’affaire des broue-pubs (Petite Munich, Élixir Céleste, Montréal Hell, Germaine…) ou des artistes peu soucieux des coûts (Ostalgia Blonde). Bref, pour l’heure, les Brasseurs du Monde ne s’adressent peut-être pas encore aux amateurs cherchant à sortir des sentiers battus. Cette situation risque toutefois de changer. Dès la fin de l’été, une deuxième gamme de produits devrait être commercialisée, Stout et IPA inclus. Par la suite, des produits saisonniers, au gré de l’imagination créative du brasseur et de son assistant, apparaîtront fréquemment sur les tablettes, visant davantage à séduire les aventuriers de l’orge et du houblon.



Pour en revenir au salon, la microbrasserie ne semble pas avoir l’ambition de fournir des produits différents au Picoleur par rapport à sa gamme embouteillée. De plus, la nature des locaux, quoique agréablement décorés et meublés pour une brasserie ne visant pas à s’établir comme broue-pub, se prête davantage à des événements corporatifs qu’à une clientèle touristique ou gastronome. N’empêche, l’établissement fournit une opportunité facile d’accès de découvrir leur gamme entière, opportunité facilité par sa proximité de l’autoroute 20. Simplement, il est peut-être préférable d’attendre que la gamme se trouve élargie davantage avant d’aller la découvrir. Il faudra aussi voir si Le Picoleur parvient à fidéliser une clientèle plus régulière à mesure qu’ils auront été en mesure de se faire connaître par les Maskoutains, ce qui pourrait alors justifier l’instauration d’un menu de boustifaille plus élaboré justifiant une visite plus prolongée. Par contre, pour avoir un aperçu des projets de cette nouvelle brasserie et de ses ambitions, rien ne vaudra une visite au Picoleur alors que sa clientèle n’est pas encore bien établie. Le personnel se montre on ne peut plus sympathique et généreux de leur bonne compagnie.






Vivement le prochain feuilleton de cette jeune saga.


6 juil. 2011

Freiburg im Breisgau et les brasseries de la Forêt Noire allemande


La brasserie Feierling ne pourrait pas jouir d'un emplacement plus idyllique



À chaque chant du coucou, qu'il provienne de ces horloges traditionnellement fabriquées dans la forêt noire ou de votre imaginaire assoiffé, il est possible, à Freiburg im Breisgau, de déguster une nouvelle bière. Mais, si comme nous vous tenez à votre santé, mieux vaut étaler le plaisir sur quelques jours. Que ce soit dans les brouepubs de cette ville verte, dans les nombreux bars de son centre médieval ou à partir des kiosques extérieurs du coin Oberlinden, plusieurs bières locales différentes sont disponibles fraîches dans un environnement charmant réservé aux piétons et aux bicyclettes.




La Schwabentor, devant laquelle les kiosques et terrasses de la Oberlinden s'installent en soirée



Outre les satisfaisantes Martin’s Bräu, Alpirsbacher Kloster et Waldhaus, qui brassent toutes de bien admirables Pilseners, les bières de 4 brasseries de la forêt noire nous ont charmées. Vous pouvez bien évidemment aller les déguster sur place, mais si vous préférez demeurer à Freiburg im Breisgau, vous les trouverez toutes dans un état inspirant.



Voici donc sans plus tarder nos coups de cœur de la région, surtout reconnue pour son jambon et son gâteau au chocolat et aux cerises macérées dans le kirschwasser:



Hausbrauerei Feierling, à Freiburg im Breisgau




Avec possiblement le plus beau biergarten de la ville, sous les marronniers, à quelques pas d'un canal rappelant ceux de Venise, il est difficile de ne pas tomber sous l'emprise de ce brouepub. Décidément, côté emplacement, Feierling est dur à surclasser. Et la seule bière de la maison est toute aussi séduisante. Soyeuse et douillette comme plusieurs pilseners tchèques non filtrées, donc moins sèche que la Pilsener allemande moyenne, la Insel Hopf de Feierling se laisse boire et déguster à coups de grandes pintes. Foin, citron et herbes se succèdent sur le palais, toujours relevés par un petit coussin de sucre bien agréable.



Badischen Staatsbrauerei Rothaus, à Rothaus




Près de Grafenhausen, dans la campagne de la forêt noire, vous pourrez trouver le gasthof de cette brasserie des plus impressionnantes. Si vous ne disposez pas d'une voiture ou d'un conducteur designé, ne désespérez pas. Rothaus est une brasserie étatique (comme les plus connues Weihenstephaner et Hofbräuhaus de Munich) et leurs trois bières sont distribuées en bouteille un peu partout dans le sud-ouest de l’Allemagne. Celles-ci sont élégantes et fragiles, comme la majorité des lagers allemandes d'ailleurs. Il vaut donc mieux les découvrir ici, dans leur région natale. La Pils, même en bouteille, nous fait frémir de sa délicatesse, renfermant une complexité houblonnée surprenamment longue en bouche. Leur Weizen est toute aussi impeccable en plus d'être munie d'une personnalité citronnée se démarquant des Weizens classiques. À noter que leurs bières possèdent des noms différents lorsque embouteillées dans de petits formats. La Pils devient Tannen Zäpfle et la Märzen Export devient Eis Zäpfle...



Ganter Brauerei, à Freiburg im Breisgau




Sur la courue Münsterplatz, à l’ombre de l’énorme cathédrale qui domine le square de la capitale de la forêt noire, vous trouverez le brauereiausschank de cette brasserie régionale. C'est ici que vous pourrez déguster leur Wodan, une Doppelbock diplomatique et complexe. Elle est servie au fût l’année durant, chose très rare dans une Allemagne brassicole qui vit au cours des saisons. Son nez de pruneaux, de caramel et de fruits rouges mène à un admirable corps non gorgé par les sucres résiduels, chose inhabituelle pour le style. On prend plaisir à la boire autant que la Urtrunk de la maison d'ailleurs. Cette derniàre, une lager non-filtrée, est un bel exemple d'une biàre rurale, empreinte d'un caractère levuré rappelant le pain, équilibré par des houblons herbacés et épicés. On se croirait presque dans la campagne franconienne...



Löwenbrauerei Elzacher, à Elzach




Le village d'Elzach est facilement accessible de Freiburg en empruntant un train. C'est là-bas que vous dégusterez dans leur meilleure condition les bières de cette petite brasserie. Leur Weizen (nommée Der Weisse Löwe, ou le lion blanc) et leur Kräusen Pils (non filtrée, issue d'un assemblage de jeune pils et de pils mature) possèdent toutes deux la signature de la brasserie. Elles possèdent une sécheresse plaisante, une effervescence marquée ainsi qu'une touche rustique provenant surtout des levures et des conditions de fermentation. Leurs bouteilles sont presque impossibles à trouver à Freiburg (essayez le Hauck Getränkemarkt sur Günterstalstrasse) et les bières, définitivement absentes des bars de la ville. Qu'à cela ne tienne, les produits de cette brasserie méritent d'être explorés en priorité lors de votre séjour dans la forêt noire allemande. Chasseurs de grands crus expérimentés, celle-ci est pour vous!





La semaine prochaine, on squatte à Cologne, le pays de la Kölsch!



1 juil. 2011

Les bières de Het Anker disponibles en importation privée

La brasserie Het Anker, pour ceux qui la connaissent moins, ravira tout amateur de bières belges capiteuses, épicées et chaleureuses, généreuses en sucres résiduels. Leurs multiples brunes figurent d'ailleurs très haut au palmarès des bières belges les plus accomplies. Que ce soit pour célébrer une soirée fraîche ou pour se réchauffer le gosier en hiver, la gamme Gouden Carolus (appelée Carolus d'Or pour le marché francophone) ne cesse de séduire les dégustateurs en quête de complexité et de saveurs abouties. Bonne dégustation!

Carolus d’Or Classique (8,5%)
Gouden Carolus Classic
Une brune liquoreuse aux accents prononcés de raisin sec, de rhum brun, de réglisse et de malts rôtis. Sucrée, mais atténuée en bouche par une chaleur d’alcool, cette grande bière n’a rien à envier aux bières trappistes si réputées.

Carolus d’Or Triple (9%)
Gouden Carolus Tripel
Plus chaleureuse et ronde que la Tripel moyenne, cette version de Het Anker possède tout de même des esters fruités alléchants aux côtés de houblons herbacés. Ses sucres résiduels sont peut-être plus importants qu’une Westmalle Tripel, mais elle ne sombre jamais dans l’excès.

Carolus d’Or Ambrio (8%)
Gouden Carolus Ambrio
Une belge ambrée dans laquelle sévit un équilibre savoureux de houblons épicés, d’esters fruités et de malts subtilement caramélisés. Élégante, elle sait rallier des épices subtiles à un caractère de levure marqué.

Carolus d’Or Hopsinjoor (8%)
Gouden Carolus Hopsinjoor
Voici une cousine de la Houblon Chouffe, cette blonde forte belge qui marie les houblons hyper aromatiques et amers du nouveau monde aux fermentations typiquement belges. Les houblons citronnés et épicés poussent sur des céréales aux allures de paille craquante avant de plonger dans une amertume poignante.

Carolus d’Or Noël (10,5%)
Gouden Carolus Christmas
Un bonhomme au pain d’épices fond dans des malts chocolatés enveloppés de sucres réglisses et poivrés. Une recette festive, parfaitement exécutée, qui réchauffera les papilles et les cœurs de toute âme ouverte d’esprit. Un des chefs d'oeuvres de la maison.

Carolus d’Or Grand Cru de l’Empereur Bleu (11%)
Gouden Carolus Cuvée Van de Keizer Blauw
Massepain et alcool boisé enveloppent une confiture de fruits noirs (prunes, dates, cerises, raisins) dans un corps décadent qui nous force à respecter l’empereur. Puis, si votre curiosité vous pousse à goûter plus loin, vous y trouverez peut-être tabac, rhum brun, réglisse, chocolat, etc. La profondeur de cette bière est inouïe. 

Carolus d’Or Grand Cru de l’Empereur Rouge (10%)
Gouden Carolus Cuvée Van de Keizer Rood
Forts du succès fulgurant de la Grand Cru de l’Empereur Bleu, la brasserie Het Anker récidive avec une bière qui se veut du même acabit. Séduisante de son profil anisé fermement planté dans des malts bien miellés, cette bière présente peut-être moins de complexité que sa consœur plus foncée, mais elle demeure toute aussi chaleureuse.

Maneblusser  (6%)
Sûrement la bière la plus facile d’accès de cette commande, cette blondinette rafraichit de ses levures typées et de son équilibre de malts miellés et de houblons herbacés.

Lucifer (8%)
Ceux qui l’ont connu il y a plusieurs années dans les dépanneurs du Québec sauront ravis de savoir que la recette de la défunte brasserie Riva a été obtenue par Het Anker. Difficile de comparer avec justesse avec la version feu Riva sinon que Het Anker a souvent tendance à laisser les sucres parler, ce qui n’était pas nécessairement le cas de la version de Riva. Vous aurez donc droit à une blonde forte qui se veut inspirée de la grande Duvel. Toute une tâche à accomplir, si vous voulez notre avis...

30 juin 2011

Guide de voyage brassicole - L'Allemagne



  
Pas moins de 1300 brasseries. Des siècles et des siècles d’histoire brassicole. Une multitude de types de bières créés, encore brassés aujourd’hui bien au-delà de ses frontières. Certains disent qu’aucun autre pays n’a autant influencé la planète-bière que l’Allemagne. Son statut est tel que la « bière allemande » tente de se faire reconnaître par l’UNESCO comme faisant partie du patrimoine mondial immatériel.

Évidemment, il serait ridicule et ambitieux de prétendre vouloir faire un survol compréhensif et critique de toutes les brasseries du pays germanique. Steve Thomas, auteur du Good Beer Guide to Germany, signe dans son livre une liste gargantuesque de chaque brasserie allemande, mais ne se targue pas de toutes les avoir dégustées. Son foie le remercie sûrement. De notre côté, nous ne prétendons pas non plus avoir foulé le sol de toutes les régions ou avoir bu toutes les bières d’une région visitée. Il faudrait une vie entière consacrée uniquement au pays germanique afin de réussir cet exploit. Toutefois, après trois voyages brassicoles en Allemagne dans les six dernières années, nous croyons pouvoir vous élaborer un guide qui sera utile à la très grande majorité des amateurs de bières visitant le pays. Vous nous en donnerez des nouvelles!


C’est au long d’une quinzaine d’articles donc que nous vous détaillerons nos coups de cœur allemands, comme il fût le cas pour nos autres guides brassicoles sur ce blogue, classés par région urbaine. Le pays est si dense et si peuplé en brasseries qu’il mériterait de multiples ouvrages à lui seul. Mais bon, nous nous disons qu’une quinzaine d’articles suffiraient pour convaincre n'importe quel dégustateur de bières que l’Allemagne se doit d’être prise au sérieux dans toute conversation bièrologique ou toute planification de voyage.

Nous commencerons tout d’abord la semaine prochaine par une région souvent oubliée par les bièrophiles, mais qui possède un lot très intéressant de grands crus : la Forêt Noire. À vos jambons, la Pils coulera à flot!

Tschüss! 

26 juin 2011

La nouveauté à tout prix



Notre dernier article, Goûter 365 bières en une année, avait pour mandat de fournir quelques trucs pour faciliter la tâche de ceux qui cherchent à étendre l’étendue des bières qu’ils ont essayées. À notre avis, c’est une excellente approche pour tout dégustateur que de se frotter à la nouveauté de la sorte, de manière à laisser le monde de la bière le surprendre et à en suivre l’évolution. De plus, les dégustateurs se dotent ainsi d’un cadre de référence à partir duquel ils sont mieux à même de déterminer des bières qu’ils préfèrent. Par la suite, ils peuvent faire des choix plus éclairés en fonction de leurs préférences personnelles, maintenant beaucoup plus claires. Certains consommateurs poussent toutefois cette pratique à l’extrême. Face aux tablettes bien garnies d’un détaillant spécialisé, ils choisiront toujours cette bouteille qu’ils n’ont jamais essayée auparavant, laissant derrière de nombreuses bières qu’ils adorent et ne se lassent pas de vanter à qui mieux mieux.

L’explication de ce comportement tient probablement à une application quelque peu tordue de la loi de l’utilité marginale décroissante selon laquelle chaque unité supplémentaire d’un même bien apporte une satisfaction moindre que celle qui la précède. En étirant cette loi économique dans ses plus profonds retranchements, nous pouvons imaginer que pour le dégustateur avide de nouveautés, acheter la même bière plus d’une fois apporte beaucoup moins de plaisir que de se procurer une nouveauté. La nouveauté peut combler cet esprit du collectionneur qui sommeille en nous, esprit pour lequel une nouvelle bière comporte une valeur ajoutée en ce qu’elle représente la conquête de l’inconnu, comme l’atterrissage d’un avion dans un pays que nous n’avons encore jamais visité. Ultimement, certains dégustateurs préféreront une vie d’aventuriers et accorderont plus d’importance à la nouveauté alors que d’autres se montreront plus casaniers dans leurs habitudes. Entre ces extrêmes, il existe une multitude d’équilibres et les prochains paragraphes vous aideront à mieux cerner le nôtre.

Sincèrement, nous sommes déjà passés par cette phase de recherche de la nouveauté à tout prix. C’est une période très mouvementée et riche en apprentissages dans une carrière de dégustateur. Cependant, nous optons maintenant pour davantage de modération à l’égard de l’achat systématique de tout nouveau produit. L’objet du reste de cet article est d’en fournir quelques justifications.

Premièrement, certaines brasseries produisent malheureusement des produits de piètre qualité. En achetant régulièrement leurs nouvelles offrandes, nous contribuons à leur survie. Et leur survie enlève des parts de marché aux nombreuses microbrasseries qui méritent davantage de succès tout en décourageant certains néophytes dont le premier contact avec la bière artisanale est peu concluant puisque la saveur de comptoir de pharmacie ou une bouteille qui se vide d’elle-même à l’ouverture ne constitue pas un pas en avant.

Ensuite, la quantité de nouveautés est nettement supérieure en 2011 par rapport à ne serait-ce que quelques années auparavant. Ce faisant, l’intention noble d’être au-dessus de ses affaires et d’avoir essayé toutes les bières disponibles sur les tablettes du Québec n’est carrément plus possible. Or, tenter de presque tout essayer est loin de fournir la même motivation que de réussir à tout essayer.



Par ailleurs, sans nécessairement compter nos consommations, nous considérons que celles-ci demeurent relativement limitées. Outre lors de périodes exceptionnelles comme des vacances à l’étranger (dans ces moments de grâce, la recherche de la nouveauté reprend souvent le dessus!) ou des festivals de bière, nous limitons notre consommation à des seuils qui pourraient être jugés raisonnables. Le mardi soir typique est rarement arrosé de plusieurs bières différentes. Or, pour parcourir le déferlement impressionnant de nouveautés qui défilent sur le Québec, il faudrait soit accroître notre consommation au-delà d’un niveau qui nous semble confortable, soit délaisser complètement tout ce qui n’est pas nouveau. Ceci nous amène à la prochaine raison… Nous tenons à visiter régulièrement certains produits qui nous font vibrer! Après plusieurs années de dégustation, certaines bières se sont bien établies au sommet de nos hiérarchies personnelles. Ce qui est intéressant dans tout ça, c’est que ce ne sont pas toutes des bières difficiles à dénicher. Qui plus est, après avoir essayé plusieurs milliers de bières, il est peu risqué d’assumer que nos favorites ont été bien soupesées, étudiées sous toutes leurs coutures et sont réellement des produits d’exception à nos papilles. Il serait ridicule d’avoir travaillé fort à établir une base de référence d’une certaine profondeur en essayant plusieurs produits sans, par la suite, tirer bénéfice des bières qui ont marqué nos parcours en les revisitant fréquemment.

Il faut toutefois demeurer conscient que notre bagage de dégustateur est en continuelle évolution, tout comme les modes parmi les brasseurs et leur clientèle. Nos goûts changent aussi de manière bien perceptible au fil des mois et des années. Il convient donc de revisiter, occasionnellement, certains produits qui nous ont plus ou moins charmé afin de tester la robustesse de nos références. Nous continuons donc à essayer quantité de nouveautés, avec une attention particulière pour certaines brasseries qui nous ont offert de beaux moments par le passé. Ce faisant, nous avons toujours espoir d’être séduits par une nouveauté qui s’intégrera à notre palmarès de bières immensément agréables que nous voudrons visiter à répétition. Après tout, la polygamie est mieux acceptée par les bières québécoises que par les femmes, surtout quand on paie pour leurs services.

21 juin 2011

Goûter 365 nouvelles bières en une année

Vous ne comprenez pas votre ami qui s’acharne à escalader les plus hauts sommets du monde, ou cet autre qui prend l’avion trois fois par année pour aller se démener à courir des marathons? Et bien, c’est leur vie, ils en font ce qu’ils veulent. Ayant retenu une passion un peu plus modeste, la bière, vous-même, comment pourriez-vous Accomplir avec un grand « A » ? Quelles réalisations pourriez-vous tirer de votre passion pour la bière de manière à ne pas crouler sous la honte lorsque vos amis vos déballeront la longue liste d’épicerie de leurs accomplissements estivaux? Pourquoi ne pas leur clouer le bec en leur faisant part de votre nouveau défi? Pourquoi ne pas tenter de déguster 365 bières différentes en 365 jours? Impossible? Bien sûr que c’est possible et c’est en fait beaucoup plus facile qu’il n’y paraît. Vous aurez ainsi à votre disposition le récit de cet exploit à raconter à vos aïeuls sans même avoir eu besoin d’y investir les efforts démesurés de ceux qui se collent à des défis plus exigeants, et ces pauvres loups n’en auront pas moins qu’un seul défi à raconter!

Ainsi donc, comment mettre la main sur 365 bières différentes en une année? Voici quelques-uns de nos meilleurs trucs.

Profiter de ces collègues et parents qui voyagent
Votre sœur part en voyage pour les deux prochains mois et vous avez peur de vous ennuyer? Rassurez-vous en voyant l’aspect positif de ce départ, le pays dont elle foulera la terre présente sans doute plusieurs opportunités de mettre la main sur des bières qui ne sont pas disponibles au Québec. Facilitez la tâche de votre soeurette en lui fournissant quelques adresses de magasins où elle risque de tomber sur une rareté qui s’insère bien entre deux gaminets d’une valise qui ne demande qu’un léger excédent de poids. Des sites Internet comme www.ratebeer.com et www.beeradvocate.com vous aideront à trouver ces magasins de perles rares un peu partout dans le monde. Le désavantage : sachant qu’elle vous ramène un souvenir, vous vous ennuierez encore bien davantage de votre sœur…

Les festivals de bière
Au cours des dernières années, nous avons assisté à la prolifération des festivals de bières en sol québécois. Plusieurs festivals plus régionaux ont joint les rangs des pionniers que sont les fêtes de Chambly et de Montréal (Mondial de la Bière). Ces événements permettent de découvrir des dizaines de brassins différents en quelques jours.

Visiter fréquemment les broue-pubs
Certains broue-pubs produisent une impressionnante quantité d’offrandes distinctes au cours d’une année. Des endroits comme le Trou du Diable, le Cheval Blanc ou encore Dieu du Ciel! donnent à leurs habitués l’opportunité d’essayer au moins une trentaine de cervoises variées le temps de quatre saisons.

Les magasins spécialisés
Tout comme les broue-pubs, les brasseurs québécois qui embouteillent sont plus nombreux et mieux distribués que jamais. Dans les meilleurs magasins de la province, on doit bien voir déferler une centaine de nouveaux produits lors d’une année. Le visiteur assidu peut donc y combler une bonne portion de son défi annuel.

Profiter de nos déplacements et des douanes généreuses
Amateurs d’escalade, de musées ou autres détenteurs de passions étrangères à la bière, sachez que le Québec n’est pas la seule région bien nantie en fait de microbrasseries. Si vous vous rendez à New York pour un spectacle de Broadway, rien ne vous empêche de terminer la soirée dans un des nombreux bars à bières de la ville. En fait, où que vous alliez, il y a de bonnes chances que votre chemin puisse comporter une escale dans un magasin ou une brasserie vous permettant d’aller chercher quelques conquêtes parmi les 365 recherchées.




Le magasin Half Time de Poughkeepsie, New York, offre plus d'un millier de bières différentes



Ce qu’il y a de plus fantastique pour l’amateur de bière qui voyage, c’est que les douanes canadiennes s’avèrent nettement plus avantageuses pour la bière que pour les autres types d’alcool. Une caisse entière peut être exonérée de toutes taxes pour chaque personne ayant séjourné plus de 48 heures à l’étranger. Votre fin de semaine au Vermont pourrait donc vous rapporter plusieurs dizaines de conquêtes, surtout si vous vous emparez du quota de votre généreuse douce moitié…

Deux têtes valent mieux qu’une, mais trois valent mieux que deux
La méthode la plus efficace (et la plus agréable!) d’apprécier un défi est souvent de le partager. Après tout, si vos collègues trouvent votre intérêt pour la bière à tout le moins surprenant, cela ne signifie pas pour autant que vous êtes seul dans le bateau. À preuve, vous n’étiez sûrement pas le seul client du dernier broue-pub où vous êtes allé. Si les amateurs de bière ne pullulent pas déjà votre cercle d’amis, il serait avisé de convertir les amis que vous avez déjà ou encore d’y intégrer de nouveaux membres amateurs de bière. Vos soupers pourront alors devenir de véritables petits festivals où tous partagent allègrement les bouteilles qu’ils ont rapporté de leur dernier voyage. Du coup, au lieu de découvrir deux nouvelles bières dans la solitude, vous en découvrirez beaucoup plus tout en ayant du bon temps.

En appliquant ces quelques conseils systématiquement, vous aurez tôt fait d’accomplir votre objectif. Dans un prochain article, nous discuterons toutefois de la recherche de la nouveauté à tout coup et des dangers qu’elle comporte.